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Accueil du site > Tribune Libre > La crise de l’éducation en France

La crise de l’éducation en France

 Le site français Marianne a consacré un article au désastre du dernier concours pour aspirants professeurs.

 Les commissions de sélection de toutes les régions de France, jugent le niveau culturel des candidats pauvres et peu de maîtrise de la langue française :

Alors qu’on se désole régulièrement de la baisse du niveau des élèves, les aspirants professeurs des écoles ne font pas beaucoup mieux, si on en croit les rapports des jurys du Concours de recrutement des professeurs des écoles (CRPE). Que ce soit à Lille, Besançon, Clermont-Ferrand, Strasbourg ou Marseille, les correcteurs s'inquiètent du manque de culture générale des candidats et de leurs lacunes de base en orthographe, grammaire ou encore en mathématiques.

Les candidats citent des émissions de téléréalité ou des films Disney, et très peu d'entre eux citent des lectures personnelles. Les candidats ont répondu presque au hasard aux questions qui leur ont été posées et ont mal utilisé les temps des verbes.

 Dans toute l’Europe, le niveau de l’éducation traverse depuis au moins trente ans une crise profonde, liée aux profondes transformations de la société mais, surtout, aux politiques éducatives néolibérales perverses, qui ont tout misé sur le savoir pratique et le profit, à la au détriment des savoirs humanistes, qui sont celles auxquelles sont liées les compétences critiques, la maîtrise des langues et les compétences citoyennes. Les résultats de ces politiques sont désormais également visibles dans les concours destinés aux enseignants. La baisse de la qualité de l'enseignement ne touche plus seulement les étudiants, mais aussi les diplômés.

 Mais il y a plus : au début de leur carrière, un nombre élevé de démissions est signalé parmi les enseignants en herbe. En effet, les enseignants font état d'un décalage entre leur formation et ce que l'on attend d'eux sur le lieu de travail.

 Et quand, enfin, les futurs professeurs gagnent-ils le concours et sont-ils opérationnels sur le lieu de travail ? Les problèmes ne sont certainement pas terminés, car la démotivation et le stress sont toujours à l’affût. Au-delà de la faible rémunération et de la perte progressive de prestige, c’est la résistance psychologique des enseignants qui est attaquée, comme l’affirme Eric Anceau, professeur d’histoire contemporaine à la Sorbonne  :

 « Le métier d’enseignant est devenu à hauts risques physiques et psychologiques. Les problèmes d’incivilités se multiplient. La sécurité de l’emploi et les vacances que les détracteurs des professeurs leur lancent assez souvent à la figure pour les sommer d’arrêter de se plaindre ne suffisent pas à attirer ».

 En France, en Italie, en Belgique, mais aussi dans d’autres pays, les enseignants se plaignent d’une bureaucratie excessive, pour ne pas dire infernale, d’une série d’obligations qui s’accumulent chaque jour à une vitesse vertigineuse et qui affectent gravement tant le temps que les enseignants devraient consacrer à leur discipline que le temps qu'ils vivent tout court.

 Les enseignants sont étouffés par des piles de papiers et de formulaires qu’ils doivent remplir et que personne ne lira jamais, par un flot de réunions pour chaque petite chose, bombardés de communications par courriel et d'activités en ligne, submergés par des heures de formation obligatoire. Tout cela fait que le temps de travail s’élargit, couvrant toute la journée d’un professeur, alors que ce travail prendrait plus de temps à consacrer à des activités d’auto-mise à jour, comme lire des livres, assister à des expositions, participer à des activités culturelles.

 Il est assez clair que lorsqu’un enseignant doit s’occuper de tout (secrétariat, réunions qui ne finissent jamais, entretiens avec les parents, activités de formation obligatoires, etc.) sauf des enfants, il en résulte une démotivation profonde, qui aboutit au burn out (épuisement).

 Il est clair que la culture et la connaissance ne se produisent plus dans les écoles, car les diverses réformes de caractère sociétal ont transformé l’institution scolaire en quelque chose qui n’est plus l’école, générant un profond malaise chez ceux qui y travaillent. Selon l’EU-OSHA (report “Calculating the cost of work-related stress and psychosocial risks”), le coût économique du stress au travail en Europe est de 20 milliards d'euros par an.

 A la base de la mauvaise préparation des aspirants enseignants se trouvent des problèmes complexes qui doivent être étudiés et approfondis. L'école, lieu de formation des citoyens, ne peut être transformée en un lieu reproduisant les modes de fonctionnement de l'entreprise. L’école n’y gagne pas, les étudiants n’y gagnent pas, mais surtout la démocratie n’y gagne pas.

 La destruction de l’école publique, dans un pays de grandes traditions culturelles comme la France, ainsi que dans une grande partie du monde, est le plus grand échec de la politique, désormais au service des groupes de pouvoir industriels et financiers, qui ne s’intéressent qu'à l'homme consommateur et donc esclave, et certainement pas à la personne humaine, qui ne devient libre que dans la connaissance.


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24 réactions à cet article    


  • Jean Keim Jean Keim 26 décembre 2022 09:26

    Dans la lecture d’un livre ou dans le visionnement d’une vidéo, le cerveau ne fonctionne pas et donc n’apprend pas de la même façon.


    • JPCiron JPCiron 26 décembre 2022 10:41

      @Jean Keim

      Oui, l’ un est en mode est actif, l’autre passif.

      L’un ’construit’, l’autre ’consomme’


    • sophie 26 décembre 2022 10:41

      @Jean Keim
      vous êtes sur pour la lecture d’un livre ?


    • Attila Attila 26 décembre 2022 13:23

      @sophie
      Oui, le texte écrit s’imprime mieux dans la mémoire que le même texte récité dans une vidéo : ça rentre par une oreille et ça sort par l’autre.
      Avec le texte écrit, il est beaucoup plus facile de revenir en arrière pour vérifier que l’auteur n’a pas dit le contraire quelques pages plus haut .
      Il est beaucoup plus facile d’analyser, de comprendre et de retenir un texte écrit que le même texte débité oralement.

      .


    • Jean Keim Jean Keim 27 décembre 2022 10:20

      @Attila & Sophie,

      Absolument, de plus au cours de la lecture d’un texte, si on bute sur un mot que l’on ne connaît pas, on peut facilement et naturellement compulser un dictionnaire, le visionnement d’une vidéo par contre nous entraîne dans un courant qu’il est plus difficile d’interrompre.

      Également l’imaginaire est plus sollicité dans la lecture et plus imposé dans une vidéo, de plus le texte peut révéler une idée quand une vidéo imprime des image, il me semble que l’impact n’est pas le même.


    • sophie 27 décembre 2022 10:34

      @Jean Keim
      Je pense aussi pareil, la lecture en mode « tranquille » d’un livre papier et visionner quelque chose sont différents pour le cerveau, alors que dire des BD ? (Bande- dessinées)


    • Jean Keim Jean Keim 27 décembre 2022 12:44

      @sophie

      Les BD sont probablement un compromis qui allie à la fois la lecture et les images.

      Il est probable également que les difficultés des jeunes en français (et pas qu’eux) proviennent d’une culture plus vidéographique que livresque.


    • mmbbb 26 décembre 2022 10:47

      l educ nat a été sciemment destructurée . seul le privé a sauve les meubles . et comble de l ironie au pays de l égalité , les riches s en tapent royalement , ils peuvent mettre leur mioches dans des écoles privées ou des ecoles internationales.

      J apprécie M Brighelli qui a dénoncé sans fard le dépérissement de cette ecole ( l usine à crétin .

      Quant cette institution enseigne avant tout la theorie du genre , deconstruit les savoirs notamment pas l ecriture inclusive et la réécriture des oeuvres du passés . en négligeant les fondements , cette ecole est en décadence . 

      Voir l exemple de l elite Science PO 

      Ce pays est devenu un pays de merde ; un pays l ombre de lui même.


      • sophie 26 décembre 2022 10:55

        @mmbbb
        Cela me rappel ce qui s’est passé dans de nombreux pays notamment Africains, 1_création d’écoles privées
        2_recrutement de profs
        3_affaiblissement du niveau des écoles « gratuites »...
        et le tour est joué


      • Lynwec 26 décembre 2022 10:58

        Pas une crise, un sabotage, depuis 1968 et l’occupation de la France . Pour détruire un pays sans que ce soit trop vite évident, commencez par détruire sa jeunesse...

        La France portait avant cela des valeurs insupportables à la clique qui sévit actuellement au grand jour ...


        • Brunehaut 26 décembre 2022 11:24

          Bonnes gens, j’étais jacobine au départ de ma carrière. Aujourd’hui, pétrie de doutes concernant la capacité du système à se réformer à partir de ce qu’il est devenu, j’en arrive à souhaiter sa libéralisation totale. La Suède l’a entreprise avant nous, avec succès. Peut-être la solution ... Parce que, finir sa carrière en ayant fait toute sa vie de son mieux et parfois au-delà, mais la finir avec la honte de servir l’Education Nationale et d’avoir contribué, à son corps défendant, à la déroute actuelle, ce n’est pas drôle... Et je ne dois pas être la seule. 


          • Pierrot 26 décembre 2022 12:38

            @Brunehaut
            « j’en arrive à souhaiter sa libéralisation totale »
            Il me paraît difficile de justifier ce souhait qu’aboutisse finalement cette opération de sabotage de l’éducation populaire au profit d’un système privé, au service des riches et des puissants, que vous avez cherché à éviter.

            Votre honte à servir aujourd’hui l’Éducation Nationale reste du domaine de l’émotionnel, et elle ne devrait pas prendre le pas sur les résultats concrets de votre contribution à freiner ce mouvement délétère.

            Parce qu’aujourd’hui la situation n’est peut-être pas bonne, mais elle aurait pu être pire. En effet, sans la résistance active d’une grande part du corps enseignant, les desseins malfaisants de l’oligarchie auraient déjà pu s’accomplir il y a plusieurs décennies (la casse manifeste des programmes de l’Éducation Nationale ayant commencé il y a plus de trente ans). Cela signifie que plusieurs générations d’élèves ont réussi à échapper en partie au massacre des esprits, et c’est toujours ça de gagné.


          • Brunehaut 26 décembre 2022 13:04

            @Pierrot
            Je crois savoir qu’en Suède, le chèque éducation bénéficie à toutes les familles, quels que soient leurs revenus, et qu’il assure aux parents un vrai choix en matière d’éducation. La concurrence entre les établissements a contribué aussi à améliorer la qualité de l’enseignement. Comprenez bien que je ne milite pas pour la libéralisation du système. Mais je tire des leçons de la réalité. Quand elle me montre que l’idéologie ( centralisée, égalitariste ... ) a tort et que le système ne tient que par la résistance engagée au quotidien des enseignants, alors j’abandonne l’idéologie...


          • amiaplacidus amiaplacidus 26 décembre 2022 12:09

            Plantons le décor.

            Vous venez de finir un master. Pensez-vous sérieusement partir dans l’éducation nationale pour un salaire misérable et des conditions de travail encore pires*, alors que, si vous avez bien réussi vous études, on vous fait des propositions avec des salaires 3-4 fois supérieurs ?

            Alors, seuls postulent ceux qui ont plus au moins survécu au cursus des études en obtenant un diplôme par quasi miracle. Alors ne pas s’étonner du résultat.

            .

            .

            * Avoir affaire à 30-35 garnements dont même les parents disent ne pas savoir comment « en faire façon ». Sans compter les parents (pas les mêmes) qui estiment que leur rejetons ont tous les droits, y compris celui d’insulter les enseignants. Ne parlons pas de l’irruption des superstitions religieuses à l’école.

            Et tout ceci en étant constamment abandonné par la hiérarchie.


            • Rincevent Rincevent 26 décembre 2022 13:37

              @amiaplacidus

              Sans compter les parents (pas les mêmes). Pour moi, ce sont les mêmes. Dans les deux cas, c’est bien le résultat de ‘’l’éducation’’ d’un ‘’enfant-roi’’ à qui on ne pose pas de limites au départ. Parti comme ça, cet enfant aura du mal, plus tard, à admettre le minimum des règles qui régissent la vie en société (l’école en étant la deuxième mouture après la famille).


            • zygzornifle zygzornifle 26 décembre 2022 15:02

              LOL , heureusement qu’il y a un nouveau ministre plein d’entrain a chaque quinquennat ......


              • Julien30 Julien30 26 décembre 2022 15:16

                « la société mais, surtout, aux politiques éducatives néolibérales perverses, »

                Ce ne sont pas les néo-libéraux qui ont détruit l’école mais principalement la gauche et ses idéologues pédagogistes avec leurs méthodes d’enseignement défaillantes, leur refus de l’excellence en mettant en place un égalitarisme du plus petit dénominateur commun, sans parler de l’offensive woke actuelle qui a aussi son impact sur les programmes.


                • amiaplacidus amiaplacidus 26 décembre 2022 15:54

                  @Julien30
                  Ce n’est pas la gauche qui est responsable, mais les gens qui actuellement se prétendent de gauche et qui ne sont que des bobos, à l’affût de la moindre nouveauté qui peut les mettre en évidence (voir les 15 minutes de célébrité d’Andy Wahrol), et qui ne veulent que la prolongation de leur mode de vie personnel, fait essentiellement de modes idiotes à suivre (caste parfaitement bien décrite dans les années 1970 par la dessinatrice Claire Bretécher dans sa série des Frustrés, les « conformistes de l’anticonformisme »).

                  Tous gens bien loin des « hussards noirs de la République » qui avaient porté l’Éducation Nationale française à l’excellence qu’elle avait il y a une cinquantaine d’années. Hussards noirs qui, dans leur immense majorité, étaient vraiment de gauche.

                  Je peux témoigner de cette excellence, j’en suis un produit, c’est grâce à des instituteurs et institutrices, la plupart du temps de gauche (et pas des professeurs des écoles, qui se croient de gauche) que j’ai appris que le savoir se méritait par des efforts soutenus, et qu’apprendre ce n’est pas jouer mais du travail. Cela m’a permis, fils d’ouvrier, de faire des études supérieures.

                  Je ne peux que déplorer que l’éducation nationale, du modèle qu’elle était, soit devenue un repoussoir.


                • Rincevent Rincevent 26 décembre 2022 18:33

                  @amiaplacidus

                  J’ai eu affaire aussi aux hussards noirs, plutôt gris (la blouse…) avec leur chef d’escadron : le dirlo ! Je me souviens encore aujourd’hui de son discours alors que j’avais flanché (juste un peu) au 2 ème trimestre « quant on a la chance d’avoir vos facilités, on n’a pas le droit de les gâcher. Regardez X, lui il est obligé de travailler plus pour y arriver, il est plus méritant que vous ! ».

                  Ce compliment/engueulade résumait bien sa vison de ce qu’était (ou pas) l’égalité. Une égalité qui ne vous tirait pas vers le bas...


                • xana 27 décembre 2022 10:05

                  Bonnes réactions dans l’ensemble, mais qui aurait une solution à part un changement brutal de société ?


                  • Wald 27 décembre 2022 14:57

                    @xana
                    Pareil que vous, le seul changement possible viendrait de l’attitude des parents, sur des choses aussi fondamentales que le rapport à l’effort, au savoir (en tant que valeur), à l’avenir. Hors de ça, rien à espérer, mais ce serait une autre société en effet.


                  • xana 27 décembre 2022 13:52

                    Bien évidemment.

                    Mais comment les « virer et (les) éliminer » ?

                    Rétablir la peine de mort pour toutes les formes de trahison !

                    Abolir le principe de non-rétroactivité concernant des personnes ou des groupes ayant eu le pouvoir de faire voter des lois, des amendements etc grâce auxquels eux-mêmes pourront échapper à la peine capitale.

                    Il est inadmissible que des politiciens puissent s’octroyer leur propre grâce par des manoeuvres destinées à abolir leur responsabilité dans les cas de trahison, ou en faisant supprimer la peine de mort sous prétexte d’humanité pour de petits criminels dont la culpabilité serait mal établie.

                    La République n’a pas hésité à condamner à mort des hommes comme Louis XVI, plus pour l’exemple que pour sa présumée collusion avec les princes étrangers, pourquoi laisserait-elle vivre des scélérats comme Macron ? Comme Véran ?


                    • Jean-Paul Foscarvel Jean-Paul Foscarvel 27 décembre 2022 14:39

                      "Dans toute l’Europe, le niveau de l’éducation traverse depuis au moins trente ans une crise profonde, liée aux profondes transformations de la société mais, surtout, aux politiques éducatives néolibérales perverses, qui ont tout misé sur le savoir pratique et le profit, à la au détriment des savoirs humanistes, qui sont celles auxquelles sont liées les compétences critiques, la maîtrise des langues et les compétences citoyennes."

                      Désolé, mais lorsqu’on critique la non maîtrise de la langue chez autrui, il faudrait la posséder soi-même. Peut-être un problème de relecture (c’est humain) ?

                      Sinon, je suis assez d’accord pour l’article dans son ensemble. La transmission des connaissances n’est plus au cœur de l’instruction publique, devenue éducation nationale, ce qui reflète une transformation (l’éducation est du ressort des parents, l’instruction de l’enseignement). Il ne faut plus traumatiser les élèves en leur faisant penser qu’ils ont des lacunes. Ils ne savent rien, mais ils sont parfaits. Alors que c’est à partir de la reconnaissance des lacunes que l’on peut progresser et devenir autonome dans sa pensée. Mais n’est-ce pas justement la crainte de cette autonomie qui justifie l’état actuel de l’enseignement ?


                      • On n’entend plus Yoyo qui déclara :

                        un taux de réussite < à 85% signifierait l’incompétence du corps enseignant

                        C’était au temps où le terrorisme intellectuel de ’gôche’ avait force de loi !

                        Qu’ils aillent faire du prosélytisme dans « leurs » banlieues merdiques maintenant... pour ramener le calme dans les immeubles où les gens se jettent par les fenêtres chaque semaine.

                        « Vv le socialisme à la Française »

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