Bonjour Argo,

excellent... si ce n’était pas aussi tragique.

J’ai connu il y a trois ans, moi aussi, le parcours dont vous parlez ; meetic, ainsi que les clubs de célibataires, solos, divorcés, etc...

L’impression que tous celà m’a laissé, c’est d’une foule de gens paumés, perdus, même si d’un niveau aisé, et se refusant évidemment à se l’avouer : il faut garder la « face » en public et vis à vis de soi-même : la vie de solo, excellent ! La liberté, quel pied !

Sauf que quand on gratte un peu, on se rend compte que tout le monde et chacun, dans son superbe épanouissement solitaire, reste complètement obsédé par l’espoir de trouver un jour « l’autre »...

Dans la mesure où les gens aujourd’hui ne savent plus, non seulement « qui » il sont, mais surtout « ce » qu’il sont, ce qu’est la nature humaine donc, comment voulez-vous qu’ils sachent ce qu’il veulent, ce dont ils ont besoin et ce qu’ils peuvent apporter ?

Quel rôle ils sont appelés à jouer dans un couple : ce que la nature attend d’eux, en somme ; et on découvre alors deux êtres individuels aussi ignorants d’eux-mêmes que des adolescents, et se cachant derrière des personnages et des silhouettes de médias, et des conventions sociales plus rigides que les tabous les plus « primitifs » !

Mais aujourd’hui, on ne cherche plus « quelqu’un », mais « quelque chose : les uns (eux) cherchent une relation, satisfaisante physiquement bien sûr et valorisante pour l’image de leur égo (boudins s’abstenir !) ; les autres (elles) cherchent une »histoire d’amour"...

Dans les deux cas, pour la majorité, celà revient plus à la recherche d’une consommation, d’un produit particulier, que de vouloir partager une vie à deux :

On cherche la (le) partenaire pour le meilleur seulement, le pire s’abstenir, svp.

Aimer... Qui dans cette miraculeuse société avancée connait encore le sens de ce terme ?

Quand on va se promener dans cette hallucinante gallerie de Madame Tussaud qu’est Meetic, une chose frappe : dans les annonces, mâles ou femelle, le même style de formule revient toujours, « je suis comme ci, comme ça, j’aime ci, j’aime ça, je cherche lui ou elle qui puisse m’apporter ci ou ça, me faire ci ou ça, mais jamais, par exemple :  »cherche quelqu’un à choyer, à cajoler et à soigner avec amour, sans compter, et sans conditions...

Dans un système individualiste par essence, il est normal que ne subsiste à terme que le « moi je, moi je », mais ces pauvres individus « citoyens », « libérés », méritent-ils encore d’être couronnés du qualificatif d’« êtres humains » ?

J’ai vu l’Amour, parfois : ici, occasionnellement, chez des gens très agés ; mais c’est dans les pays « non évolués » qu’on le rencontre le plus souvent, chez des gens qui sont ensemble « pour le meilleur et pour le pire », tout simplement, et qui acceptent l’un et l’autre d’une même égalité d’âme, sans révolte et sans se poser de question sur la « qualité de leur relation ».

Cordialement Thierry