@BOLLORé... Président !
La « déportation » d’Arméniens obéit à une logique militaire bien plus prosaïque face à une insurrection comme l’explique Maxime Gauin dans l’article cité. Pourrait-on s’éloigner du simple bon sens ?
« ... La décision de déplacer une partie des Arméniens ottomans,
de plusieurs régions d’Anatolie, notamment orientale, vers d’autres et
surtout vers les provinces arabes, est une décision militaire répondant à un problème militaire.
Comme l’indique Hovannès Katchaznouni, dirigeant de la FRA et premier
chef de gouvernement de l’Arménie indépendante (1918-1919), son parti
proclame certes sa neutralité lors de son congrès tenu en août 1914,
mais il viole sa propre résolution juste après, commençant à recruter
des volontaires (y compris de nationalité ottomane) pour l’armée russe
dès cet été-là (17). Ainsi, le 29 octobre 1914, le consul britannique à
Batoum estime le total de ces volontaires à presque 45 000 (18). À
Erzurum, les désertions (principalement d’Arméniens) atteignent des
proportions hémorragiques dès avant l’entrée en guerre de l’Empire
ottoman (le 2 novembre 1914), des armes sont distribuées secrètement par
la Russie à la FRA locale (19), et le premier affrontement entre une
bande de révolutionnaires arméniens et l’armée ottomane a lieu en
octobre 1914 (20).
En mars-avril 1915, la politique du gouvernement ottoman consiste
en des déplacements localisés (expulsion des Arméniens de Zeytun, par
exemple) et des opérations de police, la plus connue étant celle des 23
et 24 avril : 180 personnes arrêtées, cinquante-cinq autres dans les
jours suivants ; sur ces 235, dix-huit sont condamnées à mort et
exécutées ; une seule meurt en prison ; dix-neuf Mauser (pistolets
convertibles en carabines), soixante-quatorze fusils Martini, cent onze
carabines Winchester, 3 591 pistolets et 45 221 cartouches pour pistolet
sont saisis au domicile des suspects (29).
À la fin de mai 1915, le gouvernement ottoman constate
que ces mesures ne suffisent pas ; or, l’essentiel de l’armée se
trouvant au front, il décide d’employer une technique déjà utilisée par
l’armée espagnole contre les indépendantistes cubains (1896-1898), par
l’armée américaines contre les indépendantistes philippins et par
l’armée britannique contre les Boers en Afrique du sud (1899-1901) : un
insurgé doit boire et manger ; donc une insurrection n’est dangereuse
que si elle soutenue de gré ou de force par toute ou partie de la
population civile ; donc, si l’élimination d’une insurrection est
impossible par des moyens conventionnels, il faut déplacer les civils,
afin de priver les insurgés de tout appui matériel (30) »