Totalement d’accord avec le début. Vient ensuite :
"Même dans une vision bornée aux quarante dernières années,
l’égalité a progressé encore sans perdre de sa légitimité. Il faut dire aussi
que la mécanisation a fini par limiter les travaux de force et les travaux dangereux
(nous les délocalisons). Les raisons d’une différence de statut s’étiolent
ainsi avec le progrès technique (chariots transporteurs, direction assistée, tout ça...).
La libération sexuelle, que vous dites non égalitaire, a
permis à la femme de revendiquer son plaisir, de s’approprier son corps et sa fécondité,
et de choisir librement si elle veut ou non un enfant. On passe d’une maternité
subie à une maternité choisie. L’essentiel de la révolution sexuelle est là. Le
reste, le plaisir, les communautés, l’affranchissement des contraintes
conjugales, n’en sont que les conséquences.
C’est un bien, auquel s’opposent
évidemment ceux qui peinent à faire jouir leur partenaire et qui ont de quoi
s’inquiéter de ses découvertes extraconjugales, ainsi que les vieux cons
nostalgique de cette survivance du servage où l’acte de mariage valait acte de
propriété sur la femme. Je croyais leurs cadavres pourrissant dans les
poubelles de l’histoire mais leurs zombies semblent avoir appris à poster sur
Agoravox (je ne dis pas ça pour vous, Spitoven).
Il faudrait dire un mot également de l’accroissement de
l’espérance de vie et du poids croissant qu’elle a pesé sur la conception de la
fidélité conjugale, de l’adultère, finalement dépénalisé, et du divorce, admis
enfin par consentement mutuel depuis
1974.
Vous semblez ne pas avoir conscience des changements induits
aussi au bénéfice du mâle : toute la législation du travail, notamment, toutes
les normes, tout ce qui éradique la dangerosité a été inspiré au législateur
avec l’idée que les travailleurs à protéger étaient en partie des femmes. Or,
ces normes nous profitent abondamment.
Dans ce courant de modernité, les misogynes s’aveuglent sur combien les normes sociales
ont évolué et se sont adaptées, bien avant qu’il ne faille que la loi en tire
les conséquences en se réformant enfin."
Cela, ce ne sont que les effets positifs. Qui, normalement, auraient dû être les seuls. C’est sans compter sur la récupération du phénomène par la ploutocratie, ce qui a fait l’objet de la fin de l’article. Le libéralisme comportemental dans la société, qui est en soi un progrès indéniable, a été dévoyé principalement de deux manières :
- Reprise de l’argumentation pour justifier l’extension continue du libéralisme en matière d’économie, ce qui a donné naissance à l’ultra-capitalisme, selon la doctrine : chacun a le droit de faire tout ce qu’il veut s’il ne nuit pas directement à autrui - ce qui, en matière d’économie moderne, est particulièrement pernicieux puisque les nuisances sont généralement indirectes et vastes, surtout avec le système spéculatif, et a donné lieu à d’innombrables excès dont les pires sont encore à venir.
- Encouragement exclusif et systématique auprès des citoyens des pratiques augmentant la consommation (hyperactivité sexuelle, hédonisme, impulsivité, individualité forte, irresponsabilité sociale), en les poussant jusqu’à l’excès inverse du point de départ (ascèse, restrictions et soumission autoritaires) pour créer des individus tout aussi abîmés que les précédents, voire même plus encore à cause du choc de la nouvelle idéologie avec les anciennes (en opposition radicale), ainsi que de la perversion de la notion de liberté (puisque ce mouvement promeut de façon excessive un seul type de comportement et dévalorise les choix de vie différents, neutralisant ainsi la liberté mentale de l’individu sous l’effet de la pression sociale - comme c’était le cas auparavant -, tout en présentant le type de comportement encouragé comme la définition même de l’exercice de la liberté individuelle, qui reviendrait donc à céder à tous ses désirs et pulsions plutôt que d’effecteur un choix raisonné).
Non seulement aucun de ces deux points n’est généralement admis par les initiateurs et les héritiers des changements sociaux que vous avez soulignés, mais en plus le second est souvent lui-même considéré en tant que progrès social... Bien entendu, il ne s’agit pas de les rendre coupables d’avoir initié de ces dérives, puisqu’elles sont du fait de l’action ploutocratique, mais il faudrait au moins qu’ils cessent de les ignorer - ou pire, de s’en féliciter -, et qu’ils contribuent à redresser la barre.