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Commentaire de Armelle Barguillet Hauteloire

sur Auguste Rodin (1840-1917) et Camille Claudel (1864-1943) : Pygmalion et Galatée ou l'Amour des dieux


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Armelle Barguillet Hauteloire Armelle Barguillet Hauteloire 1er mai 2008 10:52

Camille et Auguste, une passion qui s’est vite consumée, car deux génies ne peuvent cohabiter sous le même toit. D’autant qu’Auguste est déjà en ménage avec Rose et qu’il a de nombreuses liaisons, la plupart ne durent pas et sont liées à la transe d’une oeuvre, mais n’importe ! Camille est jalouse et en veut à son amant de se refuser au mariage à cause d’une femme bornée et vieillissante. Elle se vengera en faisant de Rose sa Clotho, hideux portrait de la vieillesse et, curieusement, alors qu’elle détruira la plupart de ses sculptures d’atelier, elle préservera intact ce plâtre de Clotho.

Humiliée, elle décide de s’éloigner, mais cet éloignement l’anéantira. Eloignement radical à partir de 1895 où elle prie fermement Rodin de ne plus se présenter devant elle. Ame fière et tourmentée, elle ne peut accepter d’être la seconde derrière le maître et se persuade que ce dernier s’inspire de ses oeuvres, lui vole son inspiration, se nourrit de son génie. Auguste tente bien de l’aider, mais en vain ! La rupture est consommée et Rodin en sera profondément affecté, à un point tel que ses proches craindront un moment pour sa vie. Quant à Camille, elle est détruite. ce n’est plus que l’ombre d’elle-même, une femme auprès de laquelle ne rôde plus que la folie. Si son talent est reconnu - certains amateurs seront prêts à s’endetter pour acquérir l’une de ses sculptures - elle n’en demeure pas moins dans l’esprit de tous l’élève de Rodin.

Pour une femme, comme elle, persuadée depuis l’enfance, que le génie est venu à deux reprises investir sa famille - oui, le petit Paul et elle, lui qui sculpte les phrases comme elle sculpte la glaise - c’est est trop : la seconde en amour après Rose, la seconde dans son art après Rodin !

De son imaginaire, son seul et ultime refuge, elle fera surgir, pour derniers témoins, un Persée et une Gorgone, personnages mythiques qui représentent la tragédie qu’elle vit au quotidien. Cette Gorgone, n’est-ce pas elle Camille, une belle femme coupable d’avoir trop aimé ? Avec un regard terrifiant et captif comme l’est dorénavant le sien ?

Camille s’est laissée couler, loin d’Auguste qui oeuvre loin d’elle, sans doute mal consolé de l’avoir perdue. Deux génies, dont l’un mourra dans les honneurs, l’autre emmurée dans un asile. Comme Mozart, elle sera ensevelie dans une fosse commune. Comme Rimbaud, elle tournera le dos à son art, laissant à la postérité le soin de la juger.
 ARMELLE

 


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