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Commentaire de masuyer

sur Manuel Valls : « Changer la gauche pour la faire gagner »


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masuyer masuyer 29 avril 2008 17:37

Salut Péripate,

pour une fois que nous sommes en désaccord, je ne pouvais rater l’occasion de te le faire savoir. Nous avons visiblement écouté la même émission ce matin.

D’entrée de jeu, le plan "blairiste" me fait tordre de rire tant c’est "tarte à la crème". Aujourd’hui toute l’élite politique se définit comme blairiste, j’évite en général une autre tarte à la crème bien galvaudée, "la pensée unique" mais là, c’est approprié.

Qu’est-ce que le blairisme ?

Je dirais que c’est une idéologie qui ne se définit pas comme telle, mais comme une pensée pragmatique qui se résume en une petite phrase "je ne fais pas une politique de gauche ou de droite, je fais une politique qui marche". Ben voyons, ça ne mange pas de pain. Sarkozy est très "blairiste" même si les résultats ne sont pas au rendez-vous. Ce que j’ai trouvé amusant dans l’intervention de Valls, c’est que malgré ce côté pourfendeur des idéologies (terme "diabolique") et apôtre du pragmatisme, il reconnait le mérite à Sarkozy d’avoir renouveler l’idéologie de la droite. Cette opposition pragmatisme/idéologie finit par rendre nos politiques complètement schizophrènes.

On pourrait ajouter au blairisme la dimension morale. "Moraliser le capitalisme", ça m’a toujours fait rire. J’avoue que ça me fait encore plus rire quand je l’entends dans les rangs de "ma gauche", mais ça a aussi sa portée comique dans la bouche d’"un hiérarque du PS ou de l’UMP. Qu’on accepte l’économie capitaliste de marché pourquoi pas, mais qu’on lui demande de se moraliser et je dis stop. Elle est forcément amorale (c’est un système pas un humain) et se doit juste d’être efficace pour elle-même et non pour l’humain. Je préfère cent fois un libertarien pur jus à un capitaliste compassionnel hypocrite.

Autre tarte à la crème de Valls ce matin. La pensée de gauche date d’une époque ou l’économie était national alors que nous vivons l’ère du capitalisme mondialisé. Le "capitalisme mondialisé" ce serait pas le "capitalisme apatride" d’il y a 100 ans ? Les grosses firmes s’appuient toujours sur des Etats souverains, elles sont apatrides quand il faut payer l’impôt, et très "patrides" quand elles ont besoin d’infrastructures pour se développer ou de protection à l’étranger (Chomsky fait assez justement remarquer que dans le coût du baril, il faudrait inclure une bonne partie des dépenses du Pentagone, on pourrait aussi penser à certains déploiement de forces françaises en Afrique). Un gros groupe industriel burkinabe à portée internationale est pour le moment une utopie.

Les mécanismes fondamentaux n’ont pas changé : accumulation du capital par création et augmentation infinie des marges et de la croissance. L’externalisation des coûts est un des outils. Il y a un changement d’échelle au niveau du "dumping social" qui doit au développement des transports et au pétrole pas cher. Mais pas nouveau, il a d’abord eu lieu à l’intérieur même des nations, puis grâce à leur frontières immédiates. Délocalisation et immigration (intérieures ou extérieures) étant deux des bases de la réduction des coûts.

D’ailleurs si le capitalisme n’était plus national, on se demande vraiment pourquoi les Etats ménagent certains pays, en attaquent d’autres indirectement ou directement et pourquoi les dépenses militaires augmentent.

Pour ce qui est de la liberté, je me trouve assez d’accord avec la déclaration de principe du PS : "L’émancipation humaine". C’est le point commun de toutes les courants de pensée de ce qu’on appelle gauche depuis l’apparition des sociétés capitalistes.

Ensuite ces courants de pensée se divisent entre courants révolutionnaires et courants sociaux-démocrates. Pour moi Tony Blair ce n’est plus de la social-démocratie. La social-démocratie en France aujourd’hui ce serait la gauche du PS et le PCF (mes camarades vont hurler). Le problème, c’est que la social-démocratie n’a connu pour le moment que des échecs (je leur reconnait aussi certains succès à la marge) tout comme l’option révolutionnaire. Parce qu’ils ont perdu de vue ce qui aurait du être leur seul gouvernail : "l’émancipation des travailleurs par les travailleurs eux-même".

Ils finissent par se focaliser sur des points de détail. Le montant du SMIC en est un. Ce qui est important c’est le différentiel entre les salaires les plus bas et les salaires les plus haut. D’ailleurs, ce n’est pas tant le salaire que le revenu disponible, puisqu’on essaie de corriger les inégalités par l’impôt.

Mais en dehors de la déclaration de principe, "l’émancipation humaine" n’est pas la préoccupation. Manuel Valls ne fait que prolonger la croyance en "l’homme providentiel" qu’il se propose d’être pour nous. Je pourrais dire la même chose des hiérarques de mon parti. Eternelle resucée du concept de "despote éclairé" dont la forme en matière de pouvoir économique serait "le patron paternaliste".

Mais la réflexion de la part du travail dans la vie elle est où ? Celle de la place de l’Etat ? Celle de la démocratie dans le fonctionnement de l’entreprise ?

Ce dernier point me parait un champ devrait s’emparer la gauche. A quoi bon proposer l’intéressement des salariés s’ils n’ont aucun poids sur les décisions stratégiques de leur entreprise ?

 


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