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Accueil du site > Tribune Libre > Les peuples d’Europe, proches du théâtre de guerre en Ukraine, (...)

Les peuples d’Europe, proches du théâtre de guerre en Ukraine, doivent sortir de l’engrenage de la guerre avant qu’il ne soit trop tard

Qu’augure-t-elle la guerre en l’Ukraine pour le monde ? Rien n’indique que l’armée ukrainienne pourrait changer le rapport des forces, un vœu pieux compte tenu des rapports de forces entre une grande puissance nucléaire et une puissance moyenne non nucléaire. Une guerre presque sans mouvement, une guerre statique, tout est remis sur les fortes fortifications russes dont les champs de mines sur des centaines de km, les tranchées, l’artillerie défensive, et aussi joue le moral des troupes dans ce piétinement de guerre qui s’opère dans le surplace et le pouvoir central de Kiev déclare qu’il n’y a pas d’impasse dans la guerre en Ukraine, alors que l’ex-chef de l’armée dit qu’il y a impasse. Et s’ils le déclarent et utilisent ce mot contradictoirement, c’est que réellement il y a impasse dans cette guerre.
 

Et que donne la guerre de drones et de tirs de missiles, de part et d’autre des deux belligérants ? Des destructions limitées, des incendies, des zones résidentielles endommagées, des morts et des blessés qui se comptent en centaines de milliers depuis deux ans trois mois et 18 jours ; une guerre qui s’est tournée vers l’enlisement ; l’Occident campe sur cette guerre par procuration ; tout laisse penser que la guerre en Ukraine qui s’enlise dans la durée va provoquer des incertitudes telles que tout peut arriver. Alors que des solutions existent si réellement les deux camps veulent mettre fin à la guerre et se dirigent résolument vers la paix.
 

Des questions légitimes se posent sur cette guerre. D’abord, qu’entend-on par incertitudes sur cette guerre qui dure ? Qu’arrivera-t-il en 2024 et en 2025 ? Peut-on penser que la guerre en Ukraine restera en l’état, i.e. d’un côté l’Ukraine soutenue par l’Europe et les États-Unis, de l’autre la Fédération de Russie qui s’épuise dans la guerre sans visibilité de sortie ; les combats durent depuis plus de deux ans ; le conflit armé a bouclé deux ans, le 24 février 2024 ; la guerre est dans sa troisième année.
 

Certes, des armements toujours massifs qu’apportent les États-Unis et l’Europe à l’Ukraine, et une volonté du pouvoir de Kiev de libérer ses territoires occupés par les forces russes, la guerre continuera jusqu’à la victoire, et c’est sur cette pensée qui n’est toujours pas infléchi que l’Ukraine et ses alliés occidentaux n’y voient que le succès comme s’ils sont habités par quelque esprit dont ils ne peuvent se départir et comprendre que le rapport des forces entre l’Ukraine et la Russie est inégal. L’Ukraine, une puissance militaire moyenne qui ne fait pas partie des puissances nucléaires ; si elle l’était, certainement qu’il n’y aurait pas eu de guerre et n’aurait pas eu besoin d’aides de l’Occident.
 

Or, ce n’est pas le cas pour l’Ukraine, alors que la Fédération de Russie est une grande puissance nucléaire ; par le nombre d’ogives nucléaires, elle est la première puissance mondiale, devançant même les États-Unis. D’autre part, par la puissance de son armée, la Russie est dans le top des trois plus grandes armées du monde, avec la Chine et les États-Unis. On comprend que plus le conflit dure plus la situation devient difficile pour l’Ukraine ; le facteur temps ne va profiter à l’Ukraine même si elle est en permanence soutenue par les armements et aidée financièrement ; quant à la Fédération de Russie, avec une forte population ukrainienne d’origine russe dans les quatre régions annexées en plus de la Crimée, il est hors de question, comme le déclarent les hommes politiques russes, qu’elle revient sur ses annexions. Aussi peut-on dire que la Fédération de Russie comme pour l’Occident et l’Ukraine – une guerre par procuration contre la Russie –, les deux camps vont continuer à s’opposer ; il n’y aura pas de solution tant les enjeux qu’englobe cette guerre sont planétaires.
 

C’est tout l’avenir de l’Occident qui est en jeu dans cette guerre, il en va de même pour la Russie ; la seule différence, c’est que la Russie est véritablement en guerre, ses forces sont projetées dans le combat avec toutes les difficultés que représente l’autre partie, i.e. l’armée ukrainienne, constamment approvisionnée en armements, alors que l’Occident ne fait la guerre que par procuration ; prenant soin d’éviter une confrontation directe qui le mènerait à une Troisième guerre mondiale, ce qui engendrerait une destruction mutuelle des deux camps ; ce que les deux camps opposés ne voudront en aucun cas.
 

Cependant, le facteur temps dans une guerre d’usure qui s’est installée ne sera favorable ni à la Russie ni à l’Ukraine ; certainement, il sera pire pour l’Ukraine pour la seule raison que l’Occident demandera des résultats et donc ne pourra indéfiniment prolonger cette guerre si l’armée ukrainienne, malgré les livraisons d’avions F16 en quantité, des systèmes de missiles à plus grande portée, de chars lourds et autres matériels de guerre ; en clair, comme pour le pouvoir de Kiev comme pour l’armée ukrainienne, ils sont tenus d’apporter des résultats ; le facteur temps est contre eux alors que la Fédération de Russie, son objectif est surtout de rester sur la défensive, protégeant les régions annexées ; et des offensives russes, réponse aux contre-offensives ukrainiennes, se soldant par d’autres villages pris au territoire ukrainien servant à renforcer ses annexions, et éventuellement à négocier leur retour lors des pourparlers de paix à venir ; l’offensive russe sert surtout à déstabiliser le camp adverse.
 

Et ni les sanctions économiques, financières et bancaires ni le plafonnement du prix du baril de pétrole pour les exportations russes n’ont produit d’effet suffisant pour infléchir la position russe ; la Russie est restée ferme, elle s’est adaptée même à la nouvelle donne de son économie, et ce à sa position mondiale avec les autres pays du monde comme l’attestent sa place dans le groupe des pays du BRICS+5 (Chine, Inde, Brésil, Russie, Afrique du Sud, Iran, Arabie saoudite, Égypte, Émirats arabes unis, Éthiopie), et son influence en Asie, en Afrique et en Amérique du Sud. Cette situation géostratégique montre que la Russie fait partie des trois grands pôles de puissance du monde ; la Russie, la Chine et les États-Unis régentent, sur le triple plan, économique, financier et militaire, le monde.
 

Donc, dire que la Russie battra en retraite et quittera l’Ukraine qui est déjà une option retenue par les pays occidentaux comme pour le régime de Kiev n’est qu’illusion mais une illusion qui marche pour affaiblir la Russie ; on comprend le souci de l’Occident d’élargir son aire d’influence à la Géorgie, la Moldavie, la Serbie et d’autres pays. L’objectif est de contrer l’axe Russie-Chine ; ce qui explique aussi l’aire d’influence occidentale à Taïwan, et à d’autres régions asiatiques. Le soutien progressif presque sans réserve de tous les types d’armements dont l’Ukraine a besoin, de même son financement par les États-Unis et l’Europe, relèvent de cette stratégie de puissance face aux grandes puissances adverses.
 

Et pour revenir à l’illusion de l’Occident dans la guerre en Ukraine, au départ ce n’était pas une illusion, en effet c’est la Russie qui a laissé cette illusion se développer et s’entretenir en Occident ; elle n’a rien fait pour l’arrêter ou ne pouvait l’arrêter ; elle en était incapable tant les forces de l’histoire étaient contre elles.
 

Il faut se rappeler qu’après la débâcle qu’a vécue l’Union soviétique, dans la deuxième moitié des années 1980, et a fini par disparaître le 26 décembre 1991, les États-Unis restés seuls superpuissance militaire du monde avaient gagné la guerre froide sans guerre. Ils affichaient une supériorité militaire et technologique écrasante sur les autres pays ; les guerres hautement médiatisées du Golfe (Irak 1990-1991) et du Kosovo (1998-1999) ont consacré la domination au triple plan économique, monétaire et militaire des États-Unis et de leurs alliés, les pays d’Europe, sur le reste du monde.
 

Le monde était réellement dominé par les États-Unis ; un monde unipolaire naissait ; les pays sortis de l’ex-aire soviétique cherchaient à conforter leur indépendance, ce qui est naturel pour des pays qui n’ont connu que des guerres et leur assujettissement à une puissance tutélaire ; ils n’avaient pas de réelle indépendance. L’Occident leur offrait une planche du salut, celui de les intégrer l’Union européenne et l’OTAN. Et un cadre démocratique à ces États souverains qui deviennent en fait des « les Alliés » à l’Occident – celui-ci leur permettant de débattre de questions politiques, économiques et de sécurité, et les décisions prises collectivement et par consensus –, ne pouvait être qu’attractif.
 

L’URSS n’existant plus, après son éclatement, la Russie, héritière de l’URSS mais restée faible et très fragilisée, c’était l’époque de Boris Eltsine ; puis Vladimir Poutine prend la relève et devient président de la Fédération de Russie, début 2000. L’Occident profite de cet affaiblissement, ce qui est en fait dans l’intégration des pays d’Europe centrale et orientale (PECO), une marche naturelle, une marche nouvelle de l’histoire du monde.
 

Les trois premiers pays à entrer dans l’OTAN ont été la Pologne, la Hongrie et la Tchéquie (issue de l’ex-Tchécoslovaquie), faisant passer l’OTAN de 16 membres en 1982 à 19 membres, en 1999 ; en 2004, huit pays des PECO entrent dans l’Union européenne, ce sont la Pologne, la République tchèque, la Hongrie, la Slovaquie, la Slovénie, la Lettonie, la Lituanie, l’Estonie, plus Malte et Chypre dont sept membres rejoignent l’OTAN, le faisant passer de 19 à 26 membres. En 2009, l’intégration de l’Albanie et la Croatie font passer l’OTAN à 28 ; le Monténégro intégré en 2017, l’OTAN est à 29 ; la Macédoine du Nord en 2020, le faisant passer à 30 ; la Finlande en 2023, l’OTAN est à 31. Avec la Suède en 2024, l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN ou NATO en anglais) ou Alliance atlantique compte aujourd’hui 32 membres.

Un processus historique tout naturel que cette intégration des pays d’Europe centrale et orientale à l’Union européenne et l’OTAN. Reste quelques pays européens dont l’Ukraine qui n’ont pas encore rejoint l’Union européenne et l’OTAN. Pourquoi l’Ukraine pose un grand problème ? Tout d’abord c’est un grand pays d’Europe en termes de population, de superficie et de ses capacités militaires, et dispose de quatre centrales nucléaires ; la centrale nucléaire de Zaporijjia est occupée par les forces russes depuis mars 2022.

Mais le problème de l’Ukraine, c’est que les régions à l’Est et au Sud-Est de l’Ukraine sont peuplées majoritairement par des Ukrainiens russophones, d’origine russe ; ce sont la péninsule de Crimée, entourée par la mer Noire et la mer d’Azov, les régions de Donetsk et Louhansk, Kherson, Zaporijjia ; ces régions, bordées par la mer Noire et la mer d’Azov se trouvent à la frontière de la Russie.
 

Le problème de l’Ukraine n’a pas été pensé à sa juste mesure par l’Occident ; encouragé par l’intégration de la presque totalité des pays d’Europe centrale et orientale, il n’a pas pris en compte le problème des populations russophones qui sont d’ethnie russe. Dans sa stratégie d’englober l’ex-glacis soviétique pour faire face à l’alliance stratégique Russie-Chine, misant sur les avantages très attractifs offerts à ces pays, l’Occident a négligé la résistance de la Russie, estimant qu’elle suivrait le mouvement, que les résistances seraient dépassées d’autant plus que tous ces pays d’Europe centrale et orientale seraient dans une situation bien meilleure sur le plan économique, par des investissements massifs occidentaux, mais aussi sur le plan politique, puisque jouissant d’un débat démocratique, au sein de l’Union européenne et dans l’OTAN, sur toute décision collective.
 

L’objectif visé dans l’élargissement à l’est de l’Europe, et l’intégration à l’OTAN pour l’Occident est d’imposer sa suprématie sur le reste du monde. Si les pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique du Sud ne peuvent remettre en cause l’ordre unipolaire dominé par les États-Unis depuis la chute de l’URSS, il n’en est pas de même pour les deux grandes puissances, la Chine et la Russie, qui prônent et travaillent pour fonder un monde multipolaire. L’objectif de l’Occident est d’opposer un front aussi vaste que possible face à la Chine et à la Russie, ce qui explique le soutien durable pour l’Ukraine
 

L’enjeu est donc planétaire et dépasse de loin les objectifs occidentaux qu’ukrainiens pour ce qui est de récupérer par la guerre les territoires ukrainiens annexés, après référendums, par la Russie. L’objectif de l’Occident dans cette guerre, en fait, est de contrecarrer à tout prix son déclin ; un monde multipolaire n’avantage ni pour les États-Unis ni pour l’Europe.

Les grandes puissances dont la Chine et la Russie qui ont véritablement émergé en ce début de XXIe siècle pourraient non seulement bouleverser l’ordre dominé aujourd’hui par l’Occident mais ce que l’Occident craint le plus est qu’il soit supplanté par les puissances montantes, à moyen terme ; une perspective qui est réellement potentielle dans les décennies à venir.
 

Aussi, peut-on dire que, certes l’Occident a intégré la presque totalité de l’Europe centrale et orientale, mais il n’a pas su s’arrêter à temps ; ne serait-ce que prendre en considération les populations russophones qui ont refusé de rejoindre l’Union européenne et l’OTAN. Or, c’est là l’erreur, l’Occident a préféré rester dans sa ligne de conduite stratégique, et pousser le gouvernement de l’Ukraine à s’opposer à ses propres régions pour les ramener par la force conformément au plan établi depuis longtemps. Un plan occidental qui était censé, par ses élargissements à d’autres pays en Europe et proche d’Europe, dont l’Ukraine, à décupler sa puissance face aux deux puissances adverses.
 

L’Occident, en fait n’a vu que ses intérêts stratégiques propres dans l’intégration de l’Europe de l’Est. De même, les pays de l’Europe de l’Est étaient aussi partants. Mais quand une stratégie ne va pas avec les objectifs tracés, insuffisamment pensés historiquement, qui relèvent en fait d’une illusion de pensée de la part des décideurs occidentaux, « bâtie » sur trop d’optimisme en leur puissance, ou plus simplement dit, l’Occident ne veut pas d’un monde multipolaire parce qu’il sait que si ce monde multipolaire venait à exister, les rapports des forces ne resteront pas ce qu’elles sont aujourd’hui dans un monde multipolaire ; forcément l’Occident perdra son leadership et son hégémonie sur le monde. Une défaite de l’Ukraine face à la Russie sera un tournant pour le monde puisqu’elle sera aussi une défaite pour l’Occident.
 

Aussi avancer dans cette guerre et l’Occident qui dit qu’il ne fait qu’aider l’Ukraine pour récupérer ses territoires, alors qu’il vise, à travers la guerre en Ukraine à affaiblir la Russie, et ce faisant, l’Occident maintient son hégémonie sur le monde, et donc sur la Russie et la Chine. Qu’il promette à l’Ukraine, par des réformes, à devenir une démocratie, membre de l’Union européenne et de l’OTAN, et qu’il est engagé à faire respecter sa souveraineté et son intégrité territoriale, à se défendre et à résister aux attaques russes, il n’empêche que tout revient aux capacités propres de l’Ukraine pour faire reculer la Russie, ce qui n’est pas acquit ; la lassitude même est en train de gagner les forces ukrainiennes devant une puissance qui n’est pas dans les capacités de l’Ukraine de lui faire la guerre ; l’écart des forces est trop grand entre les deux pays.
 

L’Ukraine n’est pas l’Afghanistan ; la guerre en Afghanistan face à l’URSS a duré 9 ans ; la guerre en Afghanistan face aux États-Unis et l’OTAN a duré près de 20 ans ; l’URSS comme les États-Unis et l’OTAN ont été forcés évacuer ce pays parce que le peuple afghan peu importe le temps vit dans la guerre et ne baissera jamais les armes ; le peuple afghan ne peut vivre sans son choix de vivre ; que des Talibans gouvernent le peuple afghan, peu importe, le peuple l’accepte, parce que ce sont des Afghans et font partie du peuple. Et c’est cette lutte contre des étrangers qui a mû le peuple tout entier dans la guerre, dusse-t-elle durer ce qu’elle doit durer jusqu’à la victoire.
 

L’Ukraine ne peut pas mener une guerre pendant huit ans, dix ans voire plus ; son peuple ne l’accepterait pas ; il ne peut se sacrifier pour un temps long, à une guerre ; qu’à la fin, il prend conscience que ce n’est pas sa guerre ; que le pouvoir central ukrainien, l’état-major et son armée, et surtout le peuple ukrainien, comprendraient qu’ils ne peuvent retourner des populations entières des régions de Crimée et du Donbass qui ne veulent pas d’eux et qui ont choisi la Russie.
 

Tant que la guerre est supportable avec l’aide occidentale pour l’Ukraine comme pour la Russie, elle se poursuivra ; mais, passé un temps d’usure et de lassitude, lorsque le peuple ukrainien comme son armée qui est issue du peuple comprendra que la cause est vaine, que le sacrifice n’a pas de sens tant les peuples de Crimée et du Donbass rejettent cette Ukraine devenue leur ennemie, forcément, par lassitude, il ordonnera la fin de la guerre. Ce sera le peuple et l’armée qui obligeront le pouvoir central ukrainien de mettre fin à la guerre.
 

De même, si la guerre n’est pas supportable pour la Russie si on prend en compte toutes les dernières promesses sur les armements, au mois de mai 2024, que les pays occidentaux doivent transférés à l’Ukraine, et que les forces armées ukrainiennes mettent en difficulté les forces russes, et le temps passe, 2024, 2025, 2026…, il est évident que trois ans, quatre ans de guerre et plus, et toujours pas de solution pour sortir de la guerre, une « situation de guerre extrême peut se faire jour. »

La Russie qui a déjà lancé des avertissements sur l’emploi d’armes nucléaires si la Russie se sentait en danger pourrait avancer cette option si elle voit que l’Occident est en situation de force avec une armée en Ukraine qui résiste et rend coup pour coup aux forces russes.

Aussi, dans cette situation extrême, tout peut être possible ; la Russie pourrait étendre la guerre aux pays européens par où transitent les armements à l’Ukraine ou qu’ils octroient des aides massives à l’Ukraine ; la Pologne peut être touchée par la guerre, l’Allemagne et d’autres pays d’Europe centrale peuvent l’être. Il est évident que tant les États-Unis que la France et la Grande-Bretagne, les principaux pays nucléaires membres de l’OTAN, ne pourront activer l’article 5 du traité de l’OTAN, prévoyant une assistance mutuelle des États membres en cas d’agression, que de manière limitative pour éviter une guerre nucléaire avec la Russie, pouvant déboucher sur une Troisième guerre mondiale.

Et, à ce titre, l’article 5 précise qu’une « attaque armée contre l’une ou plusieurs [parties] survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties ». En conséquence, si une attaque survient, chaque État membre « assistera la partie ou les parties ainsi attaquées en prenant aussitôt, individuellement et d’accord avec les autres parties, telle action qu’elle jugera nécessaire, y compris l’emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité dans la région de l’Atlantique Nord ».

Ce qui, en clair, l’article 5 engage tous les pays membres de l’Alliance à fournir en cas d’agression une assistance, qu’elle soit militaire, humanitaire ou autre. Mais face à une grande puissance nucléaire, comme c’est le cas avec la Russie, ce sera inévitablement l’escalade et les grandes puissances seront conscientes que la guerre a changé, ce n’est plus l’Ukraine, ce sont des pays de l’OTAN qui sont engagés dans la guerre.

Dès lors, l’assistance des autres pays de l’OTAN aux pays membres attaqués va pousser, en dernière limite, si la Russie n’arrive pas à contenir les forces de l’OTAN, « à avertir » l’Occident qu’elle est prête à faire usage des armes tactiques et non stratégiques qui sont en Biélorussie ; et c’est d’ailleurs ce qui explique les manœuvres qui ont commencé en mai 2024 en Biélorussie, et se poursuivent en ce mois de juin 2024.

On comprend dès lors que la Russie a pris les devants dans ses plans d’état-major, et qu’elle a certainement étudié les différentes situations de guerre qui peuvent se présenter ; et c’est précisément cette situation extrême que la Russie fera « endosser » à l’Occident. Devant le danger réel que la Russie ferait usage d’armes nucléaires, l’Occident ne pourra que reculer ; il n’a pas d’alternatives sinon à aller à un suicide mutuel. Quelques villages ou villes des pays d’OTAN et russes qui seront effacés de la carte ; ce que l’Occident n’accepterait en aucun cas ni la Russie sauf à se pousser mutuellement à une guerre nucléaire.

Ce cas extrême est possible. De toutes les façons, avant que ce cas extrême se présente, il reviendra au peuple ukrainien et aux autres peuples européens de prendre de plus en plus conscience que la guerre en Ukraine pourrait très mal finir, et ce ne sont pas les États-Unis qui en souffriraient. Ce sont certainement les pays d’Europe qui sont proches du théâtre de guerre qui seraient pris dans l’engrenage de la guerre.

Aussi, il revient aux peuples européens de prendre conscience des enjeux et défis à venir, et qu’ils auront à assumer les conséquences qui y surgiraient et qui ne seront certainement pas positives pour les pays d’Europe. Les peuples d’Europe, à travers leurs institutions, auront à choisir leur propre avenir ; quant à l’image de l’Occident qui ressortira de cette guerre, comme pour toutes les guerres passées, ce sera un échec de plus ; ce ne sera pas un cauchemar ; l’Occident n’aura pas à regretter son combat parce qu’il aura agi dans cette guerre pour sa pérennité, en tant qu’Occident qui a pesé longtemps sur le destin du monde.
 

Mais l’histoire de l’humanité ne fait pas du surplace ; des pays de continent entier ont été colonisés et, le temps a passé, puis est venue la décolonisation. Ceci simplement pour dire que les puissances ne connaissent pas leur destinée ; et dans la destinée de tout peuple est inscrit l’« aspiration à tracer son chemin lui-même », en tant que peuple libre par « essence » ; et s’il n’est pas libre, il doit alors lutter pour la liberté qui est la plus chère, et respectueuse vis-à-vis des autres peuples libres.
 

Et, après l’Ukraine, l’Occident continuera à s’opposer aux autres puissances ; il cherchera à trouver d’autres voies pour imposer son hégémonie sur le monde, ce qui est dans son droit, la question est toujours la même : « Pourra-t-il arriver à ses fins ? » Illusion des décideurs occidentaux ou non d’arrêter la marche du monde, quelle est la puissance qui accepterait d’être supplantée par une autre puissance sans rien opposer à ce déclin ?
 

Le monde est ainsi monté ; le combat, la lutte pour se préserver et préserver ses acquits relèvent de la nature humaine, d’essence universelle. Sans ces frictions interhumaines, le monde serait sans sens ; sauf que les puissances qui sont mortelles ne peuvent indéfiniment régenter le monde, sinon le monde serait aussi sans sens.

 

Medjdoub Hamed
Auteur et chercheur spécialisé en Economie mondiale
Relations internationales et Prospective

 


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9 réactions à cet article    


  • Renaud Bouchard 13 juin 15:57

    A l’Auteur et aux Lecteurs.

    Les peuples d’Europe, proches du théâtre de guerre en Ukraine, doivent sortir de l’engrenage de la guerre avant qu’il ne soit trop tard

    Sans plus tarder !

    Comment se fait-il que cet excellent article de M. Medjdoub Hamed

    ne fasse l’objet d’aucune réaction ?

    L’analyse géopolitique ici proposée est remarquable.

    Mes compliments !

    Renaud Bouchard


    • Enki Enki 13 juin 16:41

      @Renaud Bouchard

      La dissolution de Macron nous fait reculer, au contraire, de quelques minutes avant la scène finale européenne.

      Seul Macron veut la guerre contre la Russie. La LFI et le RN font semblant. Si la distribution politique change après les élections législatives, Macron ne sera plus seul maître à bord et un autre son de cloche va se faire entendre. L’Allemagne belliqueuse aussi a son problème avec le succès électoral de l’AfD, contre la guerre en Russie, voire pro-Russe, anti-OTAN, anti-américain.

      Et ce n’est pas fini. Quel gouvernement à venir après la recomposition des partis à l’Assemblée Nationale ? Encore pire si c’est le RN qui en sort vainqueur. Comment justifier la lutte contre l’extrême droite qu’il répète tous les jours depuis sa première élection alors qu’il aura brisé lui-même la « digue républicaine » dressée depuis 40 ans ?

      Après, il lui faudra encore essayer de tenir les J.O. auxquels il ajoute encore un motif à les saboter. Il paraît qu’il doit se baigner en slip dans la Seine dont le nettoyage a coûté un milliard d’euros...


    • Jean 13 juin 16:55

      @Enki
      « dont le nettoyage a coûté un milliard d’euros... » et n’a toujours donné aucun résultat.


    • Enki Enki 13 juin 17:34

      @Jean

      D’ailleurs, question en aparté, il y a un épisode que j’ai raté. Comment le COJO a accepté les épreuves de natation dans la Seine ? Les résultats ne pourront pas être homologués et il n’y aura pas de records enregistrés avec l’eau courante.

      Dans la piscine publique de Besançon, jamais aucune épreuve sportive officielle ne s’est déroulée. Il manque 1 cm aux 100 mètres réglementaires. Durant sa construction l’épaisseur du ciment pour tenir le carrelage a été oubliée dans les calculs.


    • matinée du 13 juin 2024

      Des combats féroces se poursuivent en direction de Kharkov dans le village. Volchansk. Dans l’est de la ville, l’ennemi, en groupes allant jusqu’à 100 personnes, tente depuis hier matin d’attaquer nos positions ; Dans la zone de l’usine de granulats , de violents combats ont lieu à l’intérieur du bâtiment administratif. Il est rapporté que l’ennemi a commencé ses opérations actives à l’est de Volchansk à partir du village. Calme et a l’intention d’éliminer les unités des forces armées russes des hauteurs dominantes afin d’ouvrir la voie à la zone des immeubles de grande hauteur du centre-ville.

      À l’ouest de Svatovo, il y a des batailles près de Masazhorovka et Andreevka , dont les succès ont été rapportés par le ministère russe de la Défense. Nos troupes se déplacent vers l’ouest.

      La bataille pour le microdistrict oriental du « Canal » de Chasov Yara se poursuit : les unités d’assaut des forces armées russes progressent dans le développement.

      À l’ouest d’ Avdeevka, l’armée russe a occupé la majeure partie de Novopokrovsky , tandis qu’en même temps, depuis le sud, nos troupes ferment le front d’ Umansky . Les forces armées russes progressent également au nord du réservoir de Karlovskoye, en direction de Netailovo .

      Sur le front de Zaporojie , l’ennemi tient des défenses au nord de Rabotino dans des places fortes où opèrent nos systèmes de lance-flammes lourds.

      La population civile de la région de Belgorod continue d’être attaquée par les forces armées ukrainiennes. Dans le village de Golovchino, district urbain de Grayvoronsky, un civil a été blessé à la suite d’une attaque de drone. Sont également attaqués Sovkhozny et Bezymeno. Le village de Prilesye, district de Krasnoyaruzhsky, a été la cible à deux reprises des tirs des forces armées ukrainiennes et des bâtiments résidentiels ont été endommagés. Shebekino a été touchée par les forces armées ukrainiennes avec des armes à sous-munitions et une femme a été blessée.

      Dans la région de Koursk, les villages de Guevo, Gornal et la colonie de Zaoleshenka dans le district de Sudzhansky, le poste de contrôle « Tyotkino » et le village de Tyotkino, le village d’Elizavetovka dans le district de Glushkovsky et le village de Gordeevka dans le Korenevsky Le district a été bombardé à plusieurs reprises. Des attaques de drones ukrainiens ont été enregistrées près des villages de Medvezhye et Tyotkino dans le district de Glushkovsky, du village de Gornal dans le district de Sudzhansky et du poste de contrôle de Krupets dans le district de Rylsky. 8 drones ukrainiens ont été supprimés par des équipements de guerre électronique dans les zones frontalières.

      En RPD, à la suite des attaques des forces armées ukrainiennes contre la population civile de Donetsk, Gorlovka et Alexandrovka, quatre civils ont été tués et trois ont été blessés.


      • GoldoBlack 13 juin 18:59

        S’ils pouvaient se livrer sans combattre à Poutine, ce serait encore mieux.


        • Matthias Moosdorf, député au Bundestag allemand :

          Les partis ayant obtenu les plus grands gains aux élections européennes sont favorables à l’arrêt des livraisons d’armes et au début immédiat des négociations. On peut juger à quel point ils ont raison au fait que des milliards d’euros, des centaines de milliers de morts, de souffrances et de destructions ont rendu la position de négociation de l’Ukraine aujourd’hui pire que jamais. Si nous avions mis l’accent sur les similitudes plutôt que sur les différences à Istanbul au printemps 2022, nous n’aurions pas eu besoin d’une conférence sur la reconstruction. Nous aurions alors pu utiliser la raison pour achever ce que nous n’avions pas réussi à faire à Minsk. Aujourd’hui, je me souviens du 2 juin 2014. Ce jour-là, des avions militaires ukrainiens ont attaqué pour la première fois la ville de Lougansk, bombardant des bâtiments civils et tuant cinq personnes, dont trois enfants. Même les chaînes de télévision ARD et ZDF avaient déclaré à l’époque qu’il fallait faire pression sur le gouvernement ukrainien pour qu’il épargne au moins les immeubles d’habitation. Je cite ARD et ZDF : « Si l’escalade se poursuit, il est peu probable que la Russie reste les bras croisés. » Comme ils avaient raison à propos des pertes de vies humaines. Je rappelle qu’en mars, le président Zelensky a interdit 11 partis d’opposition et nationalisé la radio. Je vous rappelle qu’à partir de juin 2022, tout est russe, y compris la langue. Pouchkine, Dostoïevski, Tchaïkovski et Tolstoï sont interdits en Ukraine. Je vous rappelle que le décret de Zelensky du 5 octobre 2022 interdit et criminalise les négociations avec la Russie. Pour sortir de l’impasse, ils veulent entraîner le plus grand nombre de pays possible dans un scénario de guerre. Avec l’aide d’entraîneurs, de fournisseurs d’armes et de munitions et éventuellement d’unités spéciales. Selon les milieux militaires, les missiles ATACMS et Storm Shadow sont déjà utilisés par les forces de l’OTAN pour détecter les cibles et contrôler les tirs. Voilà, mesdames et messieurs, la voie vers la guerre. Si ces armes frappent ensuite le territoire russe, comme un système d’alerte nucléaire précoce, même un malentendu suffira. Mais votre satisfaction sera de courte durée.


          • zygzornifle zygzornifle 14 juin 10:34

            S’ils sortent de l’engrenage de la guerre cela ne voudra pas dire qu’ils ne se finiront pas un jour comme l’Ukraine, bombardés en envahis accablés par le regret de ne pas s’y être préparés .... 


            • Zolko Zolko 14 juin 15:50

              @l’auteur : la Hongrie a commencé à se sortir du guêpier de l’OTAN :

               

              https://www.zerohedge.com/geopolitical/orban-got-what-he-wanted-nato-ensured-hungarys-objective-national-interests

               

              En gros, la Hongrie ne peut à elle toute-seule empêcher l’OTAN de faire la guerre, mais la Hongrie peut empêcher l’OTAN d’utiliser les habitants et le territoire Hongrois pour ça.

              L’OTAN a du s’incliner, car si des troupes et/ou du matériel militaire de l’OTAN traversait la Hongrie, il y avait des fortes possibilités de manifestations locales, probablement aussi des blocages des convois.

               

              Espérons que d’autres pays suivront

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Hamed


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