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Accueil du site > Tribune Libre > Le Printemps arabe, prélude à l’Hiver islamiste

Le Printemps arabe, prélude à l’Hiver islamiste

Le fondamentalisme islamique, à ne pas confondre avec cette grande culture qu’est l’islam, est en train de mettre à feu et à sang certaines régions du monde, dont ces pays où l'Occident, et notre Europe en particulier, a naïvement cru que ce qu’une certaine intelligentsia appela un peu trop vite le « printemps arabe » allait y favoriser l’émergence de la démocratie après les atroces dictatures de Ben Ali (Tunisie) de Moubarak (Egypte) ou de Kadhafi (Libye).

 

LES FOUS D’ALLAH

Car, force est de le constater aujourd’hui, c'est exactement le contraire qui s'y passe, notamment à l'égard du statut de la femme, qui y fait un épouvantable bond en arrière : les libertés de ces femmes, pour lesquelles nous avons tant combattu, et parfois de haute lutte, y sont de plus en plus restreintes, sinon outrageusement niées, sous l’obscurantiste loi d’une charia qui est en train d’y faire le redoutable lit des fous d’Allah.

De même les chrétiens, et plus généralement tout ce qui n’est pas musulman, y sont-ils trop souvent persécutés, sinon menacés jusque dans leur vie, et leurs églises mêmes y sont parfois incendiées, pillées jusqu’au dernier des symboles religieux. Il n’est que d’entendre pour s’en convaincre - et ce n’est pas le tout récent voyage du Pape à Beyrouth qui nous persuadera du contraire - la peur que manifestent désormais ouvertement, du Caire à Damas, les catholiques, coptes et autres maronites, d’Egypte, du Liban ou de Syrie.

La Syrie, justement. C’est peu dire que le danger de l’intégrisme religieux menace également ce pays. Certes convient-il d’y condamner de la manière la plus ferme qui soit ce tyran sanguinaire qu’est Bachar El Assad, lequel ne trouve rien de mieux à faire, pour mettre fin à la guerre civile qui y fait rage, que de bombarder, sans pitié, son propre peuple : d’Alep à Homs, ce sont autant de villes martyres, de ruines et de cadavres, que nous voyons défiler quotidiennement, impuissants et révoltés à la fois, sur nos écrans de télévision.

 

LICENCE TO KILL

Mais voilà : le grave problème, qui devient pour nos consciences d’humaniste un douloureux dilemme, c’est que ceux qui combattent à juste titre cet autre fou furieux d’Assad, à peine moins despotique que le tristement célèbre Kadhafi, ne valent guère mieux que lui.

Car il est un fait - terrible et indéniable fait - que ces révolutionnaires qui y mènent désormais la très macabre danse là-bas, sont massivement infiltrés, voire honteusement manipulés, par Al Qaïda et ses suppôts, les très cruels talibans de feu Oussama Ben Laden. Ce sont mêmes eux qui, il y a quelques jours seulement, pour venger la mort d’un des leurs, planifièrent l’assaut de l’Ambassade des Etats-Unis à Benghazi, dont un certain Bernard-Henri Lévy nous vanta naguère le prétendu esprit de tolérance pour mieux nous vendre sa guerre de Libye, et y tuèrent finalement un de ceux-là mêmes, l’ambassadeur américain, qui les aidèrent, il y a quelques mois à peine, à se libérer du joug de leur oppresseur.

Le motif de pareil et odieux assassinat ? Un film, « L’Innocence des Musulmans », qui, pour médiocre et inacceptable qu’il soit, est en train de donner un énorme mais fallacieux prétexte à la nouvelle barbarie islamiste pour tuer, égorger, étriper, lyncher, lapider, massacrer, détruire : « licence to kill  », au nom même d’Allah !

Et de fait - autre terrible et indéniable fait - c’est le plus effrayant des cris de guerre qu’Allah y est en train, très paradoxalement pour un dieu censé apporter la paix parmi les hommes, de devenir, tous kalachnikovs levés au ciel et tous lance-roquettes pointés vers l’ennemi, en ces régions meurtries : « Allah Akbar ! » s’écrient fiévreusement, quasi hystériques, ces fanatiques lorsqu’ils tuent ! Et ce sans même se rendre compte, tant ils sont sourds à toute autre plainte que la leur, qu’on hurle exactement la même chose, et pour les mêmes meurtres, dans le camp adverse…

 

LA DICTATURE RELIGIEUSE APRES LA DICTATURE POLITIQUE

D’où, dramatique, ce constat : ce pouvoir qu’entendent mettre en place aujourd’hui, par exemple, les rebelles de Syrie, ne vaut guère mieux, pour compréhensible que soit leur haine à l’encontre d’Assad, que celui qu’ils ambitionnent de renverser légitimement. Ce ne sera jamais là, hélas, qu’une nouvelle dictature religieuse qui se substituera, à l’instar de ce qui se passe actuellement en Egypte avec les Frères Musulmans, à l’ancienne dictature politique ou militaire !

Bref : un mal remplace l’autre, et l’on ne saurait dire, objectivement, quel est le moins pire des deux, sinon, circonstance aggravante pour les totalitarismes théologiques, que ce sont les consciences en ce qu’elles ont de plus intimement sacré qu’elles s’appliquent à brimer, à étouffer et à embrigader, jusqu’à la mort de toute pensée libre !

A stopper donc, de toute urgence, le manichéisme idéologique, le conformisme médiatique, le schématisme simplificateur : Allah, lorsqu’il tue, est le même et tyrannique criminel, assoiffé de sang et ivre de pouvoir, qu’Assad ou Khadafi lorsqu’ils se livrent à leurs turpitudes. Il est même peut-être pire - si cela est possible -, car il tue, lui, en son propre et seul nom !

 

POUR CHARLIE-HEBDO, AU NOM DE LA LIBERTE DE PENSEE, DE PAROLE ET D’EXPRESSION

Ainsi, pour en revenir à notre Europe, que ceux qui dénoncent sans ambages et condamnent sans appel les pauvres caricatures de Mahomet au sein de quelque journal satyrique, comme c’est l’épineux quoique dérisoire cas aujourd’hui en France avec un journal tel que « Charlie Hebdo », ne se trompent pas de cible : c’est cet islam-là, celui des fous d’Allah, celui qui tue au nom de Dieu, qui s’avère, en réalité, la véritable et très déshonorante caricature, et la plus violente qui soit, de lui-même !

Davantage, et je le clame ici haut et fort : ces caricatures de Mahomet illustrant aujourd’hui la « une » de « Charlie Hebdo » font partie intégrante, même si je n’en apprécie guère le goût douteux, de notre culture européenne, et française tout particulièrement. Elles sont le cru, obtenu là aussi d’historique et héroïque lutte, de notre civilisation en ce qu’elle a peut-être de plus noble : la liberté de pensée et de parole, la liberté d’expression, l’intelligence critique, la tolérance et la laïcité.

Nier ces sacro-saints principes, que tout esprit épris d’humanisme voudrait universels, équivaudrait à nous nier nous-mêmes ; à nier nos valeurs morales comme nos fondements philosophiques tout autant que notre assise politique ; à renier tous les acquits, ceux-là mêmes que nous enseignèrent nos ancêtres les Lumières (de Voltaire à Montesquieu et de Diderot à Rousseau), de la Révolution Française ; à mettre en danger notre démocratie même, qu’il nous incombe de défendre à tout prix : elle est un bien suprême, comme notre liberté s’avère inaliénable.

 

D’où, tragique, cette conclusion : j’ai bien peur que ce fameux printemps arabe que nous promettaient, il n’y a guère si longtemps, les plus illuminés de nos intellectuels de salon parisien ne se soit déjà révélé, finalement, que le prélude à un rude hiver islamiste !

 

ACTE DE RESISTANCE FACE A LA BARBARIE AMBIANTE

Certes, ne manqueront pas de me rétorquer les partisans de ces prétendus « printemps arabes », avons-nous eu nous aussi, la Révolution Française à peine terminée, notre tout aussi effroyable lot de terreur, où bien d’innocentes têtes y furent, là aussi, décapitées sous de tout aussi infâmes guillotines.

Soit, leur répliquerais-je à mon tour : mais c’était en 1789, et nous sommes bien, que je sache, en 2012. Serait-ce donc que ce nouvel islam ait très paradoxalement aujourd’hui, n’en déplaise à ses défenseurs et autres théoriciens de pacotille, plus de deux siècles de retard (223 ans très exactement) sur notre modernité ? Si oui, c’est d’un islam pour le moins rétrograde dont il s’agit alors ici, et pour le pire ! A réformer donc de toute urgence là encore, tel un nécessaire acte de résistance face à la barbarie ambiante, cet islam quasi moyenâgeux …

 

DANIEL SALVATORE SCHIFFER*

*Philosophe, auteur de « Critique de la déraison pure - La faillite intellectuelle des ‘nouveaux philosophes’ et de leurs épigones » (François Bourin Editeur)


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11 réactions à cet article    


  • titi titi 21 septembre 2012 16:50

    Il semble en effet que l’actualité nous apprend que notre MAM qui voulait vendre des grenades à Ben Ali, est en fait une vraie visionnaire.

    Et c’est ainsi que je pense qu’il est urgent de ne rien faire en Syrie, où les fous de dieu d’Al Quaida, combattent contre les copains des fous de dieu du Hezbollah.

    Ca nous les occupe bien.


    • paul 21 septembre 2012 16:56

      Voici ce que disait mardi à l’émission de Taddeï, votre ami le philosophe médiatisé Pascal Bruckner, qui utilise aussi le terme de l’autre ami Fabius, « l’hiver islamiste » :

      « Le monde musulman fragile et blessé a du mal à réagir à la modernité qui vient de l’Occident ...
      il n’y a pas d’opposition entre Orient et Occident mais des oppositions fondamentales (?)....le rôle de l’Occident est d’aider partout les forces progressistes, laïques ... »

      Voila ce que disait, le 14 septembre, votre porte parole politique ,la pyromane Clinton :

      « Il est important que nous ne perdions pas de vue un fait fondamental :
       L’Amérique doit montrer la voie au monde . Nous le devons à ces quatre hommes ( les victimes de l’ambassade de Benghazi ) » .

      Pouvez vous entrevoir , même vaguement, que le monde arabe, musulman en particulier, nourrit quelques petits ressentiments à l’égard de cet Occident qui apporterait la modernité à l’Orient et lui montrerait la voie, comme au reste du monde .
      Cet Occident qui accomplit des actions purement humanitaires et parfaitement désintéressées des ressources énergétiques de la région ....
       Il y aurait, tout au plus , une légère incompréhension , après les dizaines de milliers de morts en Irak et en Afghanistan . Un détail de l’histoire, M. Schiffer ?


      • epicure 22 septembre 2012 17:44

        L’occident est complexe, est habité par des forces politiques contradictoires, donc les pensées de l’un peuvent être opposées aux pensée de l’autre. C’est une évidence à moins de rester calfeutré, isolé , coupé du monde, des informations, de la vie politique etc...
        En fait c’est devenu la norme en occident depuis l’époque des révolution.
        Donc qu’il y ait un bruckner qui dise une chose et une clinton qui dise autre chose, ce n’est pas anormal, surprenant ou autre. Bruckner tient un discours de gauche, alors que clinton, tient un discours de droite. Il y a des politiques différentes, avec des intérêts divergents parfois, comme avec la guerre en irak en 2003.

        Ces clivages, peuvent exister, et même existent hors de l’occident, mais peuvent être moins audibles, de l’extérieur.
        En fait le passage du printemps arabe à l’hiver islamiste en est le visage le plus visible.

        IL n’y a pas deux blocs monolithiques politiques, où toutes les populations de chaque bloc adhèreraient de façon uniforme à la même idéologie, mais une fragmentation idéologique dans chaque bloc, où les alliances et oppositions peuvent traverser les frontières, parfois selon les circonstances les alliances peuvent se faire ou se défaire ( comme en Libye par exemple ).
        Ce n’est pas le choc des civilisations, mais les chocs des conceptions.


      • morice morice 21 septembre 2012 17:08

        Car il est un fait - terrible et indéniable fait - que ces révolutionnaires qui y mènent désormais la très macabre danse là-bas, sont massivement infiltrés, voire honteusement manipulés, par Al Qaïda et ses suppôts, les très cruels talibans de feu Oussama Ben Laden


        franchement, lire ça en 2012 est sidérant : un mec qui croit encore qu’Al Qaida aie pu être autre chose qu’une création de toutes pièces.... comme Ben Laden.

        alors on lui remet le documentaire fondamental pour qu’il fasse son EDUCATION, car il serait temps... 


        ou

        celui qui ne connaît pas ça ne peut pas parler d’Al Qaida.

        Franchement ; votre texte est ras des pâquerettes : et en plein désert, pourtant....



        • magma magma 21 septembre 2012 22:44

          je suis mort de rire... maurice comme leonard sort tous les six mois de sa poubelle confondant zaratoustra et chevallier lespales, diogène et jean lefebve


        • morice morice 21 septembre 2012 17:09

          D’où, tragique, cette conclusion : j’ai bien peur que ce fameux printemps arabe que nous promettaient, il n’y a guère si longtemps, les plus illuminés de nos intellectuels de salon parisien ne se soit déjà révélé, finalement, que le prélude à un rude hiver islamiste !


          comme intello d’abri de jardin, vous faites la paire il me semble, ici.

          • Traroth Traroth 21 septembre 2012 17:16

            Vous faites une erreur d’analyse à mon avis. L’explosion islamiste dans les pays du « printemps arabe » n’est pas une conséquence de celui-ci, mais un dévoiement, une réaction, largement soutenu par les puissances occidentales qui sont prêtes à tout pour empêcher l’émergence de la démocratie dans la région.


            Ce qui veut dire que, les mêmes causes produisant les mêmes conséquences, les gens se soulèveront à nouveau. D’autant qu’ils ont compris leur force, et que c’est le genre de souvenir difficile à effacer. Ça met plusieurs générations.

            • epicure 22 septembre 2012 17:48

              des gens qui vénèrent l’argent et dieu.
              les deux transcendances n’étant pas incompatibles, elles peuvent se conjuguer pour donner plus de pouvoir à certains.
              Pour le protestantisme, la réussite financière est une bénédiction divine.


            • bert bert 21 septembre 2012 23:14

              écologiquement 

              le monde arabo-islamique « moyen-ägeux » était plus respectueux......

              • bert bert 21 septembre 2012 23:29

                une culture urbaine du raffinement mais aussi du désert de l’économie de l’aubergine et du bon sens smiley


              • bernard29 bernard29 22 septembre 2012 10:28

                La France est le seul lieu au monde où se réunissent les plus nuls des économistes, les pires constitutionnalistes et les philosophes les plus attérants qu’il soit possible d’imaginer. C’est pas pour cela bien entendu que nos « Lumières » s’interdisent de clamer au monde la valeur de leurs mérites. Plus on est nul, plus on parle fort.

                lisez cela  ; des manifestants délogent des milices islamistes à Benghazi . 

                et ça ;

                Lybie ; une marche antimilices éclipse un rassemlement de radicaux. 


                par ailleurs , et malgré tout le cirque autour de Charlie et de la vidéo, dans les médias et le microcosme élitaire français, les manifestations des salafistes ou islamistes radicaux dans le monde arabe ont fait long feu.

                Aux USA , le monde musulman, n’a pas bougé, En France non plus .. Ce qui prouve que les peuples savent reconnaître la médiocrité au grand dam de nos philosophes patentés.

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