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François Asselineau François Asselineau 26 octobre 2010 13:40

@ Ecométa

Vous affirmez que « de Gaulle - s’il était encore là - ne rejetterait pas l’Europe totalement », et vous concluez cette phrase d’un point d’exclamation pour en souligner le caractère incontestable à vos yeux.

Permettez-moi néanmoins de contester totalement votre affirmation.
Sans vouloir faire parler les morts, j’estime quant à moi que de Gaulle aurait fait sortir la France depuis déjà bien longtemps de cette machination américaine.

A l’appui de mon analyse, et au risque de vous irriter une nouvelle fois, je me permets de vous suggérer de lire mon Dossier « De Gaulle était-il pour l’Europe » que vous trouverez, excusez-moi, en cliquant sur
http://upr63.fr/wp-content/uploads/2009/04/mensonge-de-gaulle.pdf

Je précise que je complèterai d’ailleurs ce dossier très prochainement en y ajoutant un élément décisif - sur lequel je ne me suis pas suffisamment étendu - , qui porte sur la stratégie de l’Allemagne vis-à-vis de la construction européenne.

Il n’est en effet pas possible de bien comprendre l’évolution de la stratégie de De Gaulle face à la construction dite « européenne » si l’on ne comprend pas que, confronté au traité de Rome signé en 1957 avant son retour au pouvoir, De Gaulle tenta dans un premier temps de subvertir de l’intérieur ce qu’il avait très vite analysé comme un projet américain de vassalisation du continent européen.

N’ayant nullement les mains libres sur cette question puisqu’il était, hélas, obligé de s’appuyer sur une majorité parlementaire en partie composée de députés MRP ultra-européistes, le chef de la France Libre tenta de transformer le projet américain en une « Europe européenne ». En s’affranchissant de tout lien de sujétion à la fois avec les USA et le camp soviétique, ce contre-projet aurait placé de facto la « construction européenne » sous le magistère de la France, compte tenu de la première place que la France occupait - dans tous les domaines sauf industriel - dans ce qui n’était encore que l’Europe des Six dans les années 1960.

Pour avoir des chances de succès, cette contre-stratégie gaullienne devait cependant réussir impérativement deux choses :

  • - d’une part empêcher absolument le Royaume-Uni d’entrer dans ladite construction car ce serait sinon le « cheval de Troie » anglo-saxon qui ruinerait à jamais la possibilité de se soustraire à l’influence américaine ;
  • - d’autre part obtenir un « découplage » stratégique entre l’Allemagne et les Etats-Unis, l’Allemagne acceptant de se placer sous le parapluie nucléaire français et donc de n’être que le « n°1-bis » de cette « Europe européenne ». D’où le traité de l’Elysée de janvier 1963 et les rencontres De Gaulle -Adenauer.

Or il faut savoir que les autorités allemandes ont vidèrent de substance le traité franco-allemand de l’Elysée de janvier 1963 au moment de sa ratification en juin 1963 et qu’elles ont toujours, depuis 60 ans, joué le jeu des Etats-Unis contre celui de la France. En juin 1963, le Bundestag ne ratifia en effet ce fameux traité qu’en l’assortissant d’un préambule qui plaçait délibérément la construction européenne sous une totale sujétion américaine et dans une perspective ultra-atlantiste.

Cette véritable trahison révéla à Charles de Gaulle que son projet d’Europe européenne sous magistère français 
- certes astucieux - ne tenait pas la route. Il en tira alors les conséquences que j’expose dans ce dossier dont je vous recommande la lecture.

Vous y découvrirez notamment ce que le président-fondateur de la Ve République avait confié à Alain Peyrefitte, son ministre de l’information, en décembre 1963 - donc six mois après le coup de Jarnac du Bundestag - dans un échange qu’il convient de citer ici en entier, car il apporte le plus puissant démenti à votre affirmation :
 
Alain Peyrefitte : - « Est-ce que nous pourrons changer de fusil d’épaule ? »

Charles de Gaulle : - «  Mais bien sûr ! Croyez-vous que nous ayons besoin du Marché commun pour respirer ? En face de la manœuvre des Anglais, des Américains et des Allemands, notre manœuvre à nous ce sera de dire : « la fin du Marché commun, ça ne nous contrarie pas ». Je n’avais pas été favorable à l’intégration européenne. Mais dès lors qu’on avait signé le traité de Rome, j’ai pensé, quand je suis arrivé aux affaires, qu’il fallait qu’on l’applique. S’il n’est pas appliqué, la France s’en tirera très bien autrement ».

Alain Peyrefitte : - « Il y a une conviction répandue dans les esprits, surtout dans la jeunesse, c’est que, sans l’Europe, la France ne sera plus rien ».

Charles de Gaulle : - «  Il est possible que la fin du Marché commun, ce soit justement la fin de ce mythe. Ce serait heureux : il a été forgé par les fumistes qui ont voulu faire croire à l’Europe supranationale. [...] Nous avons voulu faire une politique d’entente avec les Allemands. Si les Allemands nous glissent entre les doigts, eh bien, nous avons les moyens de nous retourner ! Le monde est vaste et la France a un grand jeu à jouer ».

 Source : C’était de Gaulle, Alain Peyrefitte, Fayard, 1997, tome 2, pp. 253 - 254

Pour le reste, je vous laisse lire ce dossier.

Je me permets au passage de vous remercier pour le ton plus serein avec lequel vous abordez maintenant ma contribution aux débats sur ce forum.

François Asselineau


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