@ Ecométa
Vous affirmez que « de Gaulle - s’il était encore là - ne rejetterait pas l’Europe totalement », et vous concluez cette phrase d’un point d’exclamation pour en souligner le caractère incontestable à vos yeux.
Permettez-moi néanmoins de contester totalement votre affirmation.
Sans
vouloir faire parler les morts, j’estime quant à moi que de Gaulle
aurait fait sortir la France depuis déjà bien longtemps de cette
machination américaine.
A l’appui de mon analyse, et au risque de vous irriter une nouvelle fois, je me permets de vous suggérer de lire mon Dossier « De Gaulle était-il pour l’Europe » que vous trouverez, excusez-moi, en cliquant sur
http://upr63.fr/wp-content/uploads/2009/04/mensonge-de-gaulle.pdf
Je précise que je complèterai d’ailleurs ce dossier très prochainement en y ajoutant un élément décisif - sur lequel je ne me suis pas suffisamment étendu - , qui porte sur la stratégie de l’Allemagne vis-à-vis de la construction européenne.
Il n’est en effet pas possible de bien comprendre l’évolution de la stratégie de De Gaulle face à la construction dite « européenne » si l’on ne comprend pas que, confronté au traité de Rome signé en 1957 avant son retour au pouvoir, De Gaulle tenta dans un premier temps de subvertir de l’intérieur ce qu’il avait très vite analysé comme un projet américain de vassalisation du continent européen.
N’ayant nullement les mains libres sur cette question puisqu’il était, hélas, obligé de s’appuyer sur une majorité parlementaire en partie composée de députés MRP ultra-européistes, le chef de la France Libre tenta de transformer le projet américain en une « Europe européenne ». En s’affranchissant de tout lien de sujétion à la fois avec les USA et le camp soviétique, ce contre-projet aurait placé de facto la « construction européenne » sous le magistère de la France, compte tenu de la première place que la France occupait - dans tous les domaines sauf industriel - dans ce qui n’était encore que l’Europe des Six dans les années 1960.
Pour avoir des chances de succès, cette contre-stratégie gaullienne devait cependant réussir impérativement deux choses :
Vous y découvrirez notamment ce que le
président-fondateur de la Ve République avait confié à Alain Peyrefitte,
son ministre de l’information, en décembre 1963 - donc six mois après
le coup de Jarnac du Bundestag - dans un échange qu’il convient de citer
ici en entier, car il apporte le plus puissant démenti à votre
affirmation :
Alain Peyrefitte : - « Est-ce que nous pourrons changer de fusil d’épaule ? »
Charles de Gaulle : - «
Mais bien sûr ! Croyez-vous que nous ayons besoin du Marché commun pour
respirer ? En face de la manœuvre des Anglais, des Américains et des
Allemands, notre manœuvre à nous ce sera de dire : « la fin du Marché
commun, ça ne nous contrarie pas ». Je n’avais pas été favorable à
l’intégration européenne. Mais dès lors qu’on avait signé le traité de
Rome, j’ai pensé, quand je suis arrivé aux affaires, qu’il fallait qu’on
l’applique. S’il n’est pas appliqué, la France s’en tirera très bien
autrement ».
Alain Peyrefitte : - « Il y a une
conviction répandue dans les esprits, surtout dans la jeunesse, c’est
que, sans l’Europe, la France ne sera plus rien ».
Charles de Gaulle : - «
Il est possible que la fin du Marché commun, ce soit justement la fin
de ce mythe. Ce serait heureux : il a été forgé par les fumistes qui ont
voulu faire croire à l’Europe supranationale. [...] Nous avons voulu
faire une politique d’entente avec les Allemands. Si les Allemands nous
glissent entre les doigts, eh bien, nous avons les moyens de nous
retourner ! Le monde est vaste et la France a un grand jeu à jouer ».
Source : C’était de Gaulle, Alain Peyrefitte, Fayard, 1997, tome 2, pp. 253 - 254
Pour le reste, je vous laisse lire ce dossier.
Je me permets au passage de vous remercier pour le ton plus serein avec lequel vous abordez maintenant ma contribution aux débats sur ce forum.
François Asselineau
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