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Commentaire de Nick Corey

sur Todd et la variable économique dans Où en sommes-nous ?


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Nick Corey 2 mars 2020 19:43

@eau-pression
Leroi-Gourhan, qui propose le lien entre le geste (l’économique) et la parole
Je n’ai rien lu de lui... Incompétent total.

 que faites-vous du sentiment religieux chez l’individu de l’époque ? 
Excellente question !
Dans mon brouillon  oui, j’écris au brouillon, j’avais inclus un passage sur, non pas exactement ce point, mais du moins sur la question religieuse proprement dite.

En fait, je pense que vous serez d’accord que, au XVIè siècle (et même avant et encore après), rien ne se fait au dehors du religieux. Toutes les activités de la vie ont un sens religieux, les gens ne pensent qu’à leurs rédemptions, on va a à la messe tous les jours, toutes les étapes de l’année sont des marqueurs religieux, etc.
Je pense que même les athées étaient bien trop imprégnés de religion pour être vraiment athées.
Attention, je ne juge rien, je parle simplement des faits.
Je pense que j’aurai été un gros bigot, moi... Bien relou. Ou alors à la Zwingli, super bordellique.
Ici, il faut faire une remarque sur le travail de Todd.
Dans Où en sommes-nous ?, il passe de l’Antiquité à la Réforme sans trop parler de la période médiévale. C’est tout de même étrange pour un chercheur qui dit se fonder sur la variable religieuse, la période médiévale étant l’apogée de la pensée religieuse en Occident. Todd parle de variable religieuse.
Mais au Moyen-Âge, la variable religieuse fait l’union de toutes les variables  et condamne même les variables qui oseraient s’échapper. Et elle fait tout pour ne pas varier, même si elle y est obligée régulièrement.
À la sortie, on peut expliquer tous les événements du M-Â par des causes religieuses, mais alors, on n’aura rien dit.
En fait, la Réforme, c’est le moment où la variable religieuse se détache des autres. C’est le moment où il devient intéressant de l’étudier. Mais c’est, du même coup, une des limites de la démarche toddienne.

Pour revenir à votre question, je pense qu’il faut mettre en parallèle avec les Diggers anglais du dix-septième siècle, qui résistaient contre les enclosures, et avaient des revendications religieuses profondes — mais à une époque protestante de plusieurs générations. Et avec ce que dit Todd sur la religion, aussi bien que l’idée d’un Christ communiste (dont le prophète aurait été Henri Guillemin, non ?).
La révolte est une crise morale, un bouleversement de valeurs. À l’échelle d’une société, une crise morale se manifeste par des oppositions et des ralliements. Un ralliement moral contient, en quelque sorte, du religio, il a quelque chose du fait religieux.
Jésukrist, tout comme les Bundschuhe et les Diggers s’expriment par le religieux parce que c’est le mode d’appréhension du réel pour eux. Aussi, les trois dénoncent les « marchands du temple », en même temps qu’ils veulent purifier, simplifier le culte, devenu à leurs yeux, un foutoir corrompu.
À mon avis, le vrai sens chrono-logique peut s’exprimer comme suit.
Tps 0  Tout va bien, la religion maîtrise tout.
Tps1  Des problèmes divers apparaissent. Ils paraissent risibles, on les nie.
Tps2  Des problèmes économiques apparaissent. Les gens les plus en bas de la société ne sont plus dupes, mais il reste les classes moyennes pleines de foi.
Tps3  Tout craque et la religion, incapable de maintenir la société est remise en question.
Le problème de la foi religieuse, du rapport au sacré, arrive en dernier, puisqu’il est ce qui maintient le tout.
Pour les paysans, Luther a servi d’allumette, mais leur tonneau de poudre était économique. Que Luther se soit désolidarisé ne les a pas empêchés de continuer. Tout comme les Diggers, abandonnés par la New Model Army, et les puritains.

Todd parle de religion 2.0 dans l’idée que, maintenant que tout craque de partout, il faut lancer une vague morale qui prend les caractères d’une forme nouvelle de religio, et poserait les bases d’une nouvelle organisation sociétale.
Mais 2.0, ça existe déjà, en fait, c’est internet, la religion libérale, qui ne répond pas aux interrogations sur la vie après la mort, puisque pu personne s’en fout, mais qui offre à peu de frais des paradis terrestres en tous genre, et est devenu, comme l’Église médiévale, le point incontournable pour toutes les démarches administratives. Et c’est flippant.

Je pense que même les low-techs sont bien trop imprégnés de numérique pour être vraiment low-techs.


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