On voit ici des discours
se tenir à fronts renversés. Certains se proposent de combattre
l’impérialisme en marche en Ukraine, mais sans forcément se rendfre
compte que leur position s’incrit dans le fil d’une tradition toute
aussi impérialiste.
La France ne peut pas
constituer un modèle pour la Russie, la Crimée, l’Ukraine ou
l’Europe en général. Si les peuples qui constituaient la France
sont pour la plupart en voie de disparition, la faute en incombe
uniquement au lavage de cerveau imposé par les jacobins. Laissons
les Corses à leurs sur-subventionnements, sans lesquels ils ne sont
rien, et qui sont même leur seul motif de se sentir français – la
réalité restant à peu près la même qu’à l’époque où
Jean-Pierre Chevènement était ministre de l’intérieur, qu’on leur
supprime tous ces subsides et ils ne verront plus beaucoup de raisons
d’être français. Dans le même temps, certains sondages ont aussi
montré que parmi les populations voisines de la Suisse, une majorité
préféraient la rejoindre, ce qui s’explique par le fait qu’elles
sont excédées par le centralisme tatillon qu’on leur impose et
qu’elles sont fatiguées du discours redistributeur. Et c’est ainsi
que les jacobins/républicains ont interprété les émeutes
bretonnes comme étant l’expression d’une volonté
d’auto-asservissement par des esclaves désireux de défendre leur
soumission à leurs maîtres (sic). Ils ne pouvaient à vrai dire pas
faire autrement que de réagir ainsi, car c’est dans leur ADN. Toute
forme d’identité régionale leur étant rigoureusement
incompréhensible, ils ne peuvent être que conduits à exprimer des
pensées absurdes de ce genre.
Parler de lutte contre
l’UE motivée par le respect des nations est dans le cas français un
non-sens, puisque la France est la non-nation par excellence. Rien
d’autre que la création artificielle autoritaire d’un Etat impérial.
L’hypocrisie des jacobins envers l’Europe n’en apparaît là que plus
écrasante, car ils ne font que dénoncer ce qu’ils pratiquent chez
eux. Et d’autant plus que les agissements qu’ils condamnent chez l’UE
sont largement sortis de leur imagination enfièvrée. Jamais l’UE
n’a essayé d’imposer une culture commune à ses membres, jamais elle
n’a essayé d’éradiquer leur identité et n’a persécuté quiconque
pour parler une langue ou pratiquer une culture qui ne lui plaît
pas, jamais elle n’a fait la guerre pour étendre son territoire et
sa domination politico-économique. Il y a par contre bien eu volonté
des jacobins français de faire d’elle tout cela, la notion d’une
construction européenne centralisée et super-puissance était celle
que poussaient les français à ses débuts. Cela bien sûr afin
d’étendre leurs conceptions uniformisatrices à l’ensemble des
européens, en leur imposant des institutions françaises, et une
identité française ou du moins francisée. Mais ça n’a pas marché
parce que personne ne voulait de leur modèle, l’époque
révolutionnaire-napoléonnienne c’est terminé. En fait, les
jacobins sont simplement aigris et furieux de ce fait, dépités de
voir que l’Europe ne se construit pas sous leurs auspices, et que le
modèle français est vu ailleurs comme un repoussoir. Furieux de
constater que leur projet originel de voir l’UE sous leur férule
française ne se concrétisera jamais, ils la conspuent maintenant,
et l’accusent d’être à l’origine de maux causés par leurs
politiques ineptes.
Les jacobins, s’ils
avaient la moindre honnêteté intellectuelle, soutiendraient l’Union
Européenne pour le désir qu’ils lui attribuent de vouloir imposer
une uniformisation culturelle et institutionnelle. Mais c’est bête,
il se trouve que cette uniformisation désormais non-française et
non-francisante interférerait avec leurs projets nationalistes et
hégémoniques français.
Rien de tout cela ne doit
interférer avec la nécessité de contrer l’impérialisme
occidental, qui se trouve être aussi l’impérialisme français.
Identité que les mêmes voix rejettent, de la même façon qu’en
Syrie, elles soutenaient la thèse simpliste et inepte selon laquelle
la France était à la remorque des USA alors qu’elle était en tête
de l’agression et des manipulations, et que c’étaient les USA
d’Obama qui apparaissaient à sa traîne. Après tout, l’impérialisme
français précède de beaucoup celui des USA, et a causé plus de
morts et de pilllage. Mais bon, à esprit simpliste, vision du monde
simpliste, et même intégriste : il vaut mieux rejeter le fait
que leur « beau pays » puisse causer du mal sur une
intervention extérieure. The devil made me do it. Mais leur « beau
pays » en question est bien une composante dirigeante du mal,
en Ukraine comme en Syrie, comme en Afrique qu’il agresse
régulièrement. Le plus fort, est que ces voix « gaulliennes »
oublient que leurs prédécesseurs jacobins avaient de tous temps
défendu le colonialisme français, au même moment où ils
transformaient la France en une vaste caserne à grands coups de
propagande ultra-nationaliste et préparaient la boucherie de la
première guerre mondiale. Leur idéologie de l’ « alternative
française » n’est pas une alternative, car la France, Etat
impérialiste par nature, ne peut pas être une alternative.
Mais impérialisme
occidental général ou impérialisme français particulier, il peut
se justifier de soutenir la Russie, même impériale, dans ses
projets de les contrer. Cela n’implique aucunement de soutenir les
méthodes et le projet de société de Poutine, que je considère
comme un gangster. Mais simplement de mener une politique pragmatique
afin de contenir la progression du plus puissant des impérialismes,
qui est bien l’occidental, et c’est là qu’est l’urgence.
L’impérialisme russe existe, mais il est limité, et à la longue
les deux se neutraliseront.