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Accueil du site > Tribune Libre > Paradis Blanc pour France Gall : adieu douce France

Paradis Blanc pour France Gall : adieu douce France

France Gall vient de s'éteindre pour s'en aller rejoindre l'étoile de son bon Berger. Adieu à cette douce France, désormais dans son "Paradis Blanc" !

PARADIS BLANC POUR FRANCE GALL

ADIEU DOUCE FRANCE

Il est des êtres dont l’importance, la grandeur et la beauté tout à la fois, nous apparaît soudain, paradoxalement, lorsqu’ils ne sont plus là. La tristesse, lorsque semblable mort advient, en est d’autant plus intense, et le chagrin d’autant plus cruel. C’est le cas aujourd’hui, en ce froid et gris matin d’hiver, de France Gall, qui, ce dimanche 7 janvier 2018, vient de nous quitter, à l’âge de 70 ans, après un long et douloureux combat, quoique toujours très digne, contre la récidive d’un cancer du sein. « Evidemment » serait-on donc tenté de dire après coup, paraphrasant là le titre de l’une de ses plus célèbres chansons, à propos de cette icône, par-delà sa légendaire discrétion, de la chanson française !

 

TENDRES ANNEES

Car, oui, après les récents décès de Mireille Darc, Claude Rich, Jeanne Moreau, Jean Rochefort, Jean d’Ormesson et Johnny Hallyday, c’est un autre pan du patrimoine culturel français de la seconde moitié du XXe siècle qui s’en va, inexorablement, ainsi. Et, avec lui, un peu plus encore - hélas ! - de notre propre jeunesse, ces « tendres années » comme le murmurait presque, précisément, Johnny, émouvant, en cette subtile mélodie, plus que jamais.

Certes ne connaissais-je pas France Gall, ni ne l’ai même jamais rencontrée, contrairement à ce qui m’est arrivé avec la plupart des grands écrivains, philosophes ou poètes, de notre temps. Et, pourtant, c’est empli d’une vive et sincère émotion – un sentiment où se mêlent peine, humilité et compassion – que je vis, en cet instant où j’écris ces lignes, la disparition de cette femme d’une rare élégance, d’une exquise noblesse d’âme en même temps que d’une dignité sans pareille, y compris dans les pires moments de son existence, comme ce fut le tragique cas avec les décès prématurés de sa fille adorée, Pauline, morte de mucoviscidose, et de son mari, le très talentueux Michel Berger, foudroyé, en pleine gloire et jeunesse, par une crise cardiaque.

 

LA MORT DES ARTISTES

Ainsi, quoique je ne l’aie donc jamais rencontrée, est-ce non sans admiration également pour son engagement sur le plan social et humain (car elle fut bien autre chose, bien plus profonde et bien moins insouciante, que la Lolita de l’espiègle « Poupée de cire, poupée de son » et autre « Sucettes à l’anis » du génial Gainsbourg) que je lui adresse à présent, sous forme de « déclaration » comme s’intitulait là aussi l’un des ses principaux tubes, ces vers, extraits de « La mort des artistes », l’une de ses plus pénétrantes « Fleurs du Mal », de Charles Baudelaire, mon poète de prédilection :

 

« Il en est qui jamais n’ont connu leur Idole,

Et ces sculpteurs damnés et marqués d’un affront,

Qui vont se martelant la poitrine et le front,

 

N’ont qu’un espoir, étrange et sombre Capitole !

C’est que la Mort, planant comme un soleil nouveau,

Fera s’épanouir les fleurs de leur cerveau ! »

 

DOUCE FRANCE ET SON BON BERGER

Adieu, donc, douce France, merveilleuse incarnation, en sa plus gracieuse, noble et heureuse expression, de cette France que nous chérissons tant : va-t-en donc rejoindre paisiblement aujourd’hui, après les affres de cette maudite maladie que tu affrontas avec tant de courage en tes derniers jours, ce « Paradis Blanc  » où t’attend assurément, tel le plus bienveillant des époux, ton beau et bon Berger, l’éternel amour de ta vie.

Dans ton « Cézanne peint », chanson écrite et composée en 1985 déjà, injustement méconnue et pourtant emblématique des vicissitudes de ta propre existence, tu disais, prémonitoire, avec raison : « Si le bonheur existe, c’est une épreuve d’artiste ». Immortelle France, le beau pays de France, qui te pleure aujourd’hui, t’aimera, elle, encore longtemps : elle ne te « résiste  » plus désormais, « évidemment  » !

 

DANIEL SALVATORE SCHIFFER*

 

*Philosophe, auteur de « Traité de la mort sublime – L’art de mourir de Socrate à David Bowie » (Alma Editeur, Paris).

 


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21 réactions à cet article    


  • lautrecote 7 janvier 2018 20:53

    Merci pour cette « déclaration ».



    • aimable 7 janvier 2018 23:23

      une beauté , une chanteuse qui ne laissait indifférent, j’avoue avoir été touché en apprenant son décès .


      • Fergus Fergus 8 janvier 2018 09:16

        Bonjour, Daniel

        A quoi rime cette manie chez vous de toujours préciser dans vos papiers que vous connaissiez ou pas personnellement les artistes ou écrivains sur lesquels vous écrivez ?

        Si vous ne les connaissez pas, cette précision n’a aucun intérêt. Si vous les connaissez, cela n’est intéressant que si cela vous permet de rapporter un propos de nature à éclairer le fond de votre article.


        • ZenZoe ZenZoe 8 janvier 2018 14:26

          @Fergus
          Ce que vous dites est très bien vu mais moi je trouve que c’est touchant au fond. Et même un peu triste. Un psy dirait sans doute que les personnes qui s’adonnent à ce genre de pratique doutent de leur légitimité personnelle, et ne se sentent exister qu’à travers les autres.

          Faites preuve d’un peu de bienveillance Fergus, chacun utilise les ficelles qu’il peut pour ne pas couler quelquefois. Et à tout prendre, je préfère lire un article élogieux sur quelqu’un que des bouffées délirantes comme celles de Spartacus, voire même l’étalage d’une fausse bonté comme la Rosemar du bord de mer.

          Dans le même genre que l’auteur , on a Rakoquelquechose.. Pas de mauvais bougres. C’est rafraîchissant.


        • Fergus Fergus 8 janvier 2018 15:41

          Re-bonjour, ZenZoe

          Aucune malveillance en l’occurrence, mais je l’avoue une légère pointe d’irritation qui m’a fait écrire ce commentaire sans doute un peu rugueux.

          Cela dit, je reconnais bien volontiers à l’auteur des qualités de rédacteur et de la sincérité dans ses écrits.

          Cela tombe bien, j’appréciais France Gall, et pas seulement par nostalgie de mes jeunes années (je suis né 5 semaines après elle !).


        • Fergus Fergus 8 janvier 2018 15:52


          À propos de France Gall, j’avais consacré en novembre 2016 un article à la chanson de son répertoire la plus sujette à commentaires amusés :

          1966 : un goût de sucettes.


        • aimable 8 janvier 2018 18:22

          @Fergus
          du coup vous avez changer de case l’ année dernière  smiley


        • Yohan Yohan 9 janvier 2018 20:58

          @Fergus


          Rue de l’abricot, c’est pas mal non plus

        • zygzornifle zygzornifle 8 janvier 2018 09:21
          Paradis Blanc ? Paradis des sous-chiens ?

          • juluch juluch 8 janvier 2018 11:47

            Un bel hommage à une grande chanteuse qui a bercé notre enfance......reposez en paix auprès de Michel Berger au Paradis blanc..... smiley


            • ZenZoe ZenZoe 8 janvier 2018 11:49

              C’est surtout un peu de la France des années 60 qui s’en va avec elle, perruques blondes, yeux de biche, minijupes sages et ballerines plates... Et la nostalgie est toujours un peu triste.

              Quant à France Gall elle-même, certes une jolie voix et une jolie frimousse, mais ni plus élégante qu’une autre ni même très bienveillante à ce qu’on dit, elle a surtout eu le talent de détourner un peu de celui des autres à son profit... Qu’elle repose en paix.


              • gegene 8 janvier 2018 13:21

                Il n’y a pas, semble-t-il, pour un grand philosophe, de petit sujet qui ne fasse l’affaire pour se rappeler au bon souvenir de la populace !


                • ZenZoe ZenZoe 8 janvier 2018 14:09

                  @gegene
                  Mauvaise langue ! smiley


                • Francis, agnotologue JL 8 janvier 2018 15:32

                  Adieu France Gall.
                   
                  Une grande artiste, a big little woman.
                   
                  Deux époques : avant Michel Berger, et après ; elle nous a donné une grande et belle discographie.


                  • Fergus Fergus 8 janvier 2018 15:44

                    Bonjour, JL

                    Encore faut-il apprécier le style Hamburger. Personnellement, et même si cela ne volait pas haut, ni en termes de musique ni en termes de paroles, c’est sa période Gainsbourg que j’aimais bien.



                  • Paul Leleu 8 janvier 2018 15:48

                    putain... toute cette France médiocre du second 20ème siècle qui fout le camp... je trouve que ça laisse enfin la place libre à de nouvelles constructions... 


                    la chanson à la pisse des années castrées de la guerre froide, c’est vraiment relou... 

                    • Yohan Yohan 9 janvier 2018 19:51

                      Jolie voix, je n’irai pas jusque là. Une voix qui s’est sans doute améliorée au fil des années mais à ses débuts, c’était quand même une horrible voix de tête. En revanche, pour moi, France Gall, c’est beaucoup de souvenirs qui remontent  : le poste à transistor, Age tendre et têtes de bois, Raymond Marcillac à sport dimanche, l’odeur du préau, les bouteilles de Vérigoud consignées, Gévéor, le velours de l’estomac, la Renault alpine, les vacances, la plage, les copines, les surboums, les premiers roulages de pelle. Oooh ! la belle vie comme dirais Sacha Distel.


                      • Yohan Yohan 9 janvier 2018 20:33
                        Moins connue de Gainsbourg, probablement censurée à l’époque 

                        https://www.youtube.com/watch?v=93bJOkP180U

                        • Yohan Yohan 9 janvier 2018 20:39

                          Je préfère encore ses années 60 jazzy 


                          Les mièvreries de Berger me lassent

                          • Yohan Yohan 9 janvier 2018 21:18

                            France Gall période Jazz (cool non ?)

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