• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Tribune Libre > Mourir dans la sérénité

Mourir dans la sérénité

JPEG

Quand la mémoire flanche, c’est le signe que nous avons terminé un certain travail d’exploration de la vie et qu’il est temps de laisser la place à un nouvel explorateur plongé dans un environnement bien différent, avec des pensées que nous n’aurions pu imaginer.

« Ainsi le germe doit s’effacer devant la pousse » Nãgãrjunã (II-IIIe siècle).

« Si le grain de blé qui est tombé en terre ne meurt, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruits » Évangile selon Jean.

Vient-il un moment où plus rien n’a d’importance ?

Peut-être que, débarrassé des futilités encombrant la mémoire, enfin véritablement relié de l’intérieur au mouvement perpétuel de l’agencement de toutes choses, nous ressentons et comprenons alors, ce qu’est la vacuité.

Car rien n’existe en soi, tout existe seulement en fonction de quelque chose d’autre (Bertrand Russell).

En revanche, à l’intérieur de nous, comme en toutes choses, animées ou non, règne l’Equilibre le plus parfait, aux antipodes de toute morale humaine, de tout jugement.

La mort comme la vie fait partie de l’Equilibre.

Profitons de la paix, de la sérénité, de la confiance totale dans cette éternité qui nous habite pendant le bref instant de la vie.

« La mort ? Elle nous nettoie de tout, elle nous délie, elle nous délivre de nos guerres, de nos croyances, de nos prisons, de nos effrois » Henri Gougaud, Le jour où Félicie a tué la mort.

Si chacun était mort à son heure, après avoir tenté une guérison par les plantes que les femmes de l’ancien temps connaissaient si bien, la mort serait devenue notre amie.

Or la mort est devenue ce monstre invisible qui nous guette et nous plonge dans l’angoisse la plus désespérante. La mort est aujourd’hui une industrie et un marché. La pensée égarée jamais ne revient en arrière.

L'angoisse de la mort c'est la peur de perdre tous ces objets de pacotille, toutes ces illusions qui ont représenté pour nous tant de buts incontournables, de quêtes incessantes.

C'est l'intuition des regrets qui vont nous submerger lorsque nous allons quitter tous les biens terrestres que nous avons eu tant de mal à accumuler sans discernement et auxquels nous nous sommes tant attachés.

Alors qu'il n'y a plus de retour en arrière possible, c'est la peur de découvrir la vanité de toute vie, de tant d'exploits, de tant de souffrances reçues et distribuées sur notre chemin de prédateur impénitent.

Plus l’ego est boursouflé, plus la mort fait peur.

Celui qui a réussi à maîtriser son ego ne craint pas la mort.

Nous avons été mis dans le monde de force, par violence et sans rien savoir d’où nous venions et de ce que nous avions à y faire.

La véritable naissance nécessite un « accoucheur des esprits » ainsi se nomme Socrate.

Par l’observation du monde, de ses paradoxes et de ses apories, il s’agit de découvrir derrières les croyances sociales, la "connaissance" cachée en soi.

C’est-à-dire, l’intuition, à partir de quelques pièces du puzzle que l’on a découvertes par soi-même, de l’ensemble de la fresque.

« Pour comprendre cette question de la mort, nous devons nous débarrasser de la peur, qui invente toutes les diverses théories liées à l’immortalité ou à la réincarnation […] Rien n’a de permanence. Et c’est ainsi que l’esprit [qui a peur] invente ce quelque chose, qui est permanent et qu’il appelle l’âme ». Jiddu Krishnamurti, La première et la dernière liberté.

La mort a peu d’importance pour celui qui se met dans la "vacuité", le vide vivant, là où toutes les probabilités autoorganisent, autocréent le monde.

L’humain met toute son énergie et tout son génie à ne pas entendre, à ne pas voir.

Il a horreur du vide, il a horreur de se retrouver face à lui-même, face à ses contradictions, face à la tristesse de sa condition.

Et cette peur l’incite constamment à se meubler le mental.

Parce que le mental n’est qu’un outil qui doit toujours avoir quelque chose à faire, une pensée à faire passer dans ses circuits.

« Le mental c’est le commentaire ininterrompu accompagnant le film de la vie… On peut l’appeler autrement : l’ego » Placide Gaboury, Le voyage intérieur

L’ego est culturel, il résulte du fait que l’animal dénaturé s’est libéré des limites inspirées par l’"esprit" de la nature. Il n’est plus accessible à la conscience de son espèce. L’ego emprisonne alors chacun dans des conflits inéluctables avec l’autre.

Le mental n’est pas l’esprit, c’est un mécanisme d’interprétation de la réalité permettant l’action de survie.

L’esprit est le résultat du travail du mental, il se construit en observant et écoutant le monde. Ainsi il peut s’élever jusqu’à ressentir le mental collectif, c’est-à-dire l’esprit de toutes choses.

Plus on a les chevilles qui enflent, plus l’esprit perd de l’altitude.

C'est effarant comme la plupart des discussions des gens paraissent futiles. On dirait que leur seule utilité est de faire fonctionner le mental.

Comme si on craignait qu'il s'arrête. Comme ces camions dans le Grand Nord dont on laisse tourner le moteur de peur de ne plus pouvoir le faire redémarrer. 

Arrivé dans le grand âge, on se rend compte enfin que de tout ce qui a fait notre vie, il reste si peu.

Même s’il n’en restait rien, qu’importe !

Nous avons joué et n’emporterons rien.

Nous n’avons donc rien gagné et rien perdu.

Notre vie ne fut qu’un vol de papillon.

Fusion enfin de l’être et du non-être.

Se fondre dans la sérénité du Rien.

Le plus grand défi de la vie est de comprendre sa mort.

Un défi qui nécessite de prendre sa mort prochaine ou lointaine, à bras le corps.

S’en occuper, y préparer ses proches avec sérénité, avec le sourire, afin de les affranchir de ces siècles d’angoisses et de fantasmes distillés en continu dans les esprits. Quel est le bilan de notre vie ? Avons-nous été juste avec le monde, avec les autres, avec notre Mère la Terre ? Non.

Certes cela ne date pas d’aujourd’hui.

Alors n’est-ce pas une chance de quitter cette humanité qui trop abusé de la patience de Dame-nature ?

Et gaussons-nous de tous les idéologues du « toujours plus » qui s’échinent à ne pas voir venir la grande incidence.

À ne pas entendre les cassandres précurseurs de l’écologie profonde.

Acceptons la mort qui vient avec sérénité.

Remercions la vie de nous avoir accueillis puisque nous n’avons pas jugé bon de la quitter.

Nous étions donc capables de la supporter, voire de l’aimer.

Même si nous ne fûmes « qu’un hôte obscur sur une terre ténébreuse » (Goethe).

Sourire à la mort, c’est l’abandon des combats dérisoires et des certitudes illusoires.

Nous ne saurons jamais quel rôle le variable epsilon que nous fûmes aura eu au sein des fantastiques mathématiques quantiques de l’univers.

« [Avec la théorie quantique], la substance même de notre univers et avec elle, celle de notre propre chair s’effondre ». Françoise Tibika, Conscience moléculaire.

« Ils ont peur de la mort et ils ne sont même pas nés » Koan zen.

Le taoïsme comme le bouddhisme originel, atteignent la libération en comprenant que la représentation que nous nous faisons de la réalité, n’est qu’illusion. En particulier la vision pénétrante n’est possible que hors des jeux de l’ego et de ses références continuelles au passé, à ces mémoires accumulées qui nous ramènent toujours à nos multiples attachements. La vision pénétrante ne s’accomplit que dans le silence du mental.

Cette connaissance intuitive est une vision profonde des choses telles qu’elles sont, c’est-à-dire impermanentes, insatisfaisantes et sans essence. C’est une vision cohérente de la totalité des phénomènes en interaction permanente, en dehors de toute séparation, de tout morcellement des faits. Une vision révélée par la méditation, c’est-à-dire par l’observation silencieuse du monde, qui nécessite, rappelons-le, un abandon complet des attachements.

Ce n’est pas ce "Moi" si éphémère qui va continuer à voyager éternellement dans tant de corps animés ou "inertes" et dans tant de temps différents, ce sont les atomes et les molécules dont je fus l’hôte d’un instant. Ces molécules, donc sans doute ces atomes qui les composent, sont dont dotées de la conscience, donc de la mémoire de toutes ces expériences.

Sinon, à quoi servirait ce « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme » d’Antoine Lavoisier (Traité élémentaire de chimie - 1789) ? 

Ainsi participent-elles à l’évolution cosmique.

Les cellules des papilles de la langue, composées de molécules, donc d’atomes, se renouvellent tous les 10 jours en se doublant, l’une remplaçant l’autre. Les cellules de l’odorat tous les 3 mois. Celles de l’œsophage toutes les semaines, celles de l’estomac une année. Les cellules de la peau durent 28 jours. Celles de l’intestin, tous les deux ou trois jours ; chaque minute un million de cellules sont renouvelées.

Le bref instant, en moyenne 5 années, durant lequel les atomes passent dans ce corps, qui pour eux n’est qu’une forme, donc rien qu’un vase, tentons d’en profiter pour écouter leur musique, leurs chants de communication, et nous abandonner dans leur compréhension du tout. Le nirvana est la même chose que le samsara, dit le Bouddha, mais vu de Sirius, vu du Tout.

Le nirvana est cette vacuité. La compréhension de la réalité ultime par élévation de la conscience. Si l’intelligence est partout, la conscience l’est également. Grâce à ces "hôtes" éternels, apprenons à les connaître mieux, et tentons de passer d’une conscience, limitée à nos conditionnements, à ce qu’ils nous disent par leur seule présence.

Mon "Moi" est vide, il n’est que la "forme du vase", contenant l’éternité, les atomes. Et la mort n’est que le retour à la poussière, à l’immortalité de ce qui nous composait. C’est la forme du vase qui a peur de la mort.

Et la forme du vase n’est Rien.

La transcendance est à l’intérieur.

À plonger dans le cosmos on en sort plus vivant.

Et que la mort nous ouvre à l’univers.

« Tout ce qui s’est composé sera décomposé » dit le Bouddha.

« Tout ce qui est né, tout ce qui est créé, tous les éléments de la nature sont imbriqués et unis entre eux. Tout ce qui est composé sera décomposé ; tout reviendra à ses racines ; la matière retournera aux origines de la matière » dit l’Evangile de Marie-Madeleine.

Marie-Madeleine, la compagne de Jésus avait-elle connaissance de la philosophie du Bouddha (env 560-480 av J.-C.) et de celle d’Anaxagore de Clazomènes (env 500-428 av. J.-C.) :

« Rien ne naît ni ne périt, mais les choses déjà existantes se combinent puis se séparent de nouveau » ? Cela signifie qu’il n’existe pas d’élément insécable, ni de limite à la petitesse, comme de limite à la grandeur. 

Pour Anaxagore, c’est ainsi que la chair peut provenir de ce qui n’est pas elle : des végétaux contiennent des germes de la chair. Toutes choses sont dans chaque chose !

Le contenant n’était rien, et il n’est toujours rien.

Mais ne devrions-nous pas avoir un sentiment de plénitude, en réalisant que nous sommes composés de tant de morceaux d’éternité ? Nous sommes mortels et c’est la meilleure destinée que nous pouvions souhaiter. Notre corps si éphémère, n’est fait que d’atomes immortels.

Á notre mort, ils continueront leur perpétuelle exploration de la matière. Et nous auront eu la joie d’avoir été leur hôte. Le vertige quantique, loin de nous effrayer, semble nous porter vers une sorte de mysticisme laïque.

Loin du pessimisme comme de l’optimisme, il s’agit seulement de cette sérénité qui nous fait accepter « ce qui est ».

Nous ne pouvons juger de rien, puisque tout ce qui est, n’est que le résultat de combinaisons extraordinairement complexes.

Après la mort, les particules se dispersent, mais chacune d’entre-elles, étant également ondulatoire, doit partir avec la mémoire du corps qu’elle a habité.

Immortelle, elle est donc dotée d’une mémoire extraordinaire, accumulée et synthétisée depuis des temps immémoriaux. C’est ainsi que le vivant peut vivre. Chez les animaux nous appelons cela l’instinct. C’est également ainsi que la plupart des activités de notre corps sont automatiques, et font partie de nos "instincts".

Plus la connaissance du monde progresse, plus nos valeurs et le sens de notre propre vie sont mis en question.

Tout ce qui est matière est fait de ce que l’humain a décidé d’appeler Bien et Mal.

Ils sont inséparables, c’est le principe même du vivant, son moteur. C’est l’équilibre, l’harmonie taoïste.

De façon plus générale, la pourriture comme la corruption est un des paramètres de l'équation de la dynamique de la vie.

La pureté totale ne se trouve qu'au sein des milieux stériles.

Sortis des entrailles de la mère, qui ou que sommes-nous ?

Nous nous construisons de ce que nous mangeons, de tout ce que la terre nous offre : la putréfaction des chairs, des végétaux, la décomposition des roches.

De toutes les défécations qui enrichissent l’humus nous extrayons ce qui apporte de l’énergie à nos cellules. Répétons que des millions de molécules et donc d’atomes éternels entrent et sortent à chaque instant afin de maintenir ce corps en "vie".

« [L’homme] porte en lui un repas, un animal qui la veille encore, courait de-ci de-là, à présent je l’absorbe, je l’assimile à moi-même, où commence et où fini mon Moi ? […] Il voudrait se vomir lui-même en en vomissant son repas impur… » Peter Wessel Zapffe, Le dernier Messie (1933).

« La physique nous a fait comprendre que tout ce que nous voyons n’est généré que par une vingtaine de particules qui interagissent à travers quelques forces élémentaires […] Une protéine est en gros une séquence d’une dizaine d’acides aminés. Les combinaisons possibles sont tellement nombreuses que même si nous réussissions à produire une protéine différente par seconde, la durée de l’univers ne nous laisserait pas le temps de produire qu’une partie de toutes les protéines possibles… Autrement dit, l’étendue des structures possibles de la vie est encore presque totalement inexplorée, non seulement par nous, mais aussi par la nature ». Carlo Rovelli, Écrits vagabonds.

À sa mort l’organisme vivant se décompose en atomes, mais le savoir-faire des molécules doit demeurer tout en s’enrichissant des expériences acquises durant des millions d’années, dans tout le vivant comme dans tout l’"inanimé". Sinon à quoi serviraient-elles ?

« Quand notre heure sonnera, nos molécules, selon leurs lois, se tourneront ailleurs, vers une autre "vie", en supprimant la nôtre. Elles le feront en se souciant peu de savoir si cela convient ou pas à notre esprit ». Françoise Tibika, Conscience moléculaire.

Nous ne sommes que le véhicule provisoire de nos atomes, qui eux, ni ne naissent, ni ne meurent. Les protons, les électrons et les neutrinos semblent quasiment immortels. La durée de "vie" de l’électron serait d’environ 6,6.10²⁸.

La forme physique n’est qu’illusion. Cela ne signifie pas qu’elle n’existe pas, mais qu’elle contient, comme tout dans l’univers, l’infiniment petit et l’infiniment grand ; notre corps fait partie de l’univers, mais il est aussi une sorte d’univers.

 « L’homme est infiniment grand par rapport à l’infiniment petit et infiniment petit par rapport à l’infiniment grand ; ce qui le réduit presque à zéro. » Vladimir Jankélévitch.

« Un univers immensément étendu est en réalité la même chose qu’un univers immensément petit » Roger Penrose, (1931), mathématicien et cosmologiste.

« L’infiniment petit est aussi vaste que l’infiniment grand. L’infiniment grand est aussi petit que l’infiniment petit peut l’être. Lorsque les limites objectives sont reléguées hors de la vue » Seng Ts’an (520-602).

Tout point sur l’infini est à la fois infiniment petit et infiniment grand. Nous sommes tout et rien à la fois. Notre identité est une construction mentale, parmi d’autres constructions mentales possibles. Notre seul libre-arbitre réside dans notre possibilité de changer notre perception des faits et non les faits eux-mêmes.

En un siècle, la médecine a réalisé des progrès gigantesques, pourtant que savons-nous de l’extrêmement microscopique, de l’invisible, au sein même de notre corps ? À la différence des atomes qui nous constituent, nous sommes essentiellement éphémères.

Nous ne sommes que quelques atomes (environ 10³⁶), perdus dans l’infini.

Nous n’avons pas plus d’importance qu’un cancrelat ; ses atomes comme les nôtres se retrouveront éparpillés dans la terre et dans l’atmosphère. Et au bout de quelques kalpas, écrasés au sein de Sagittarius A*, le gigantesque trou noir qui, au centre de notre galaxie, absorbe tout ce qui passe à sa portée.

Françoise Tibika, docteure en chimie à l’Université hébraïque de Jérusalem, ajoute que selon Ilya Prigogine (1947-2003), dans (Order out of Chaos), pour pouvoir se comporter de manière cohérente, une communication doit exister entre les molécules.

À partir d’ondes que nous ne pouvons encore détecter ?

« La réalité est faite à la fois d’ondes et de particules. L’onde est immatérielle, présente en tous points de l’univers, hors du temps et de l’espace, alors que la particule appartient à notre univers spatio-temporel. La particule est toujours associée à une onde qui porte l’information et le souvenir, donc la mémoire. L’immatériel et le matériel sont toujours liés ensemble. Les choses visibles sont faites de choses invisibles ». Jacqueline Bousquet, Au cœur du vivant.

« On peut imaginer notre univers comme un véritable réseau, où rien n’est isolé de rien, et où finalement tout est lié à tout ». Françoise Tibika, ibid.

Par conséquent toutes les parties sont également respectables, puisqu’elles dépendent les unes des autres et vice versa.

Proies et prédateurs sont également nécessaires à la vie.

La survie et la mort sont toutes deux nécessaires et également respectables. 

C’est ce que l’esprit humain, endoctriné depuis trop longtemps par les religions et les idéologies, a bien du mal à saisir.

Qu’as-tu fait "Homo sapiens"  ? Qui t’a autorisé, toi si éphémère, à porter ta main destructrice sur cette Terre ?

Qui t’a permis, vil prétentieux, de toucher à l’Inconnaissable ?

Cette interdépendance mène à l’intuition de la logique des choses et donc également à l’acceptation de la mort.

Nous partirons sans regrets.

C’est la fusion de l’être et du non-être.

Se fondre dans la sérénité du Tout et donc du Rien.

C’est le seul espoir d’apaiser cette hypersensibilité quasiment insupportable au sein d’un monde si agressif, qui oblige à continuellement être sur ses gardes, méfiant et craintif.

Certes nous laisserons nos enfants dans cette vallée de larmes.

Par-delà la mort nous serons encore responsables de leurs peines, que leurs éphémères joies ne pourront jamais compenser.

Ce fut le seul trébuchement sur le chemin chaotique de la vie vers la paix du néant.

Sourire à la mort qui nous affranchis de toutes les peurs.

On regarde alors ceux qui tentent de nous effrayer en face, les yeux dans les yeux.

Philippe Annaba, auteur de « L’Homo sapiens, un animal dénaturé ».


Moyenne des avis sur cet article :  1.71/5   (21 votes)




Réagissez à l'article

17 réactions à cet article    


  • Brutus Brutus 19 avril 09:18

    « La mort est un manque de savoir-vivre. »

    Alphonse Allais


    C’est donc la conséquence d’un manque d’éducation.


    • Fergus Fergus 19 avril 15:35

      Bonjour, Brutus

      Mourir est un moyen de poser des lapins sans avoir à payer la taxe.


    • Clocel Clocel 19 avril 09:24

      Valar morghulis.

      « La peur est plus tranchante qu’aucune épée.

      Qui a peur de perdre a déjà perdu ».

      Bravo ! Exercice périlleux mais réussi, selon moi. smiley


      • zygzornifle zygzornifle 19 avril 09:44
        Mourir dans la sérénité

         sous les bombes des dictateurs 


        • tiers_inclus tiers_inclus 19 avril 11:55

          Vivre pour retrouver la sérénité perdue qui est la condition de l’illusion d’être né.

          Sisyphe peut alors sortir du piège de l’Absurde.

          Un programme que l’égo, l’avidité, l’aversion et l’ignorance sapent vicieusement par auto-réalisation.


          • Seth 19 avril 13:44

            @tiers_inclus

            Merci de développer, moi yen a rien comprendre mais je suis un peu simplet, c’est vrai. smiley


          • Fergus Fergus 19 avril 15:36

            Bonjour, Seth

            Idem pour moi, tout aussi simplet.


          • SilentArrow 19 avril 17:20

            @Fergus

            Simplet ou pas, l’essentiel est de mourir de notre vivant comme ce bon Jacques de La Palice.


          • zygzornifle zygzornifle 19 avril 15:59

            Pour pas mal de monde c’est mourir dans la sénilité ....


            • ZenZoe ZenZoe 19 avril 17:34

              Et donc ?


              • Jean Keim Jean Keim 19 avril 18:14

                Beaucoup de citations, trop peut-être, une citation nous expulse à l’extérieur.

                Nous ne voyons que l’extérieur de la mort, tels le gisant, le cercueil, la cérémonie funèbre, la mise en bière puis au tombeau ou l’incinération, les chagrins, etc., la pompe funèbre n’est pas la mort, tout cela n’est que conjurations, la mort est comme la croyance une affaire strictement personnelle, nous pouvons accompagner un mourant mais pas aller au-delà.


                •  C BARRATIER C BARRATIER 19 avril 18:56

                  j’avais pensé en lisant le titre qu’il s’agissait de « mourir dans la dignité » au sens de la loi qui se prépare, et qui permettra à chacun dans des cas de maladies et de souffrances désespérées, d’être aidé pour en finir sans être obligé d’aller passer ses derniers jours en Belgique.

                  Mais votre article va plus loin, et c’est une réflexion sur le sens de la vie et de l’univers

                  J’ai abouti à ma propre réflexion sur le sujet, c’est idi

                  http://chessy2008.free.fr/news/news.php?id=59


                  • Epsilone 20 avril 10:04

                    Que des affirmations et aucune réflexion, c’est dommage car le thème est intéressant.


                    • Sylfaën.H. Sylfaën.H. 20 avril 11:39

                      @Epsilone

                      ou dit de même : diversité et incohérence

                      Notre seul libre-arbitre réside dans notre possibilité de changer notre perception des faits et non les faits eux-mêmes.

                      comme traduit en pdf. C’est la seule chose que j’ai retenu.


                    • ilias 20 avril 17:00

                      Vous avez cité le boudhisme, le taoisme, etc ; mais malheureusement vous avez omis une autre voie tout aussi importante pour quiconque veut se mettre au courant des expériences humaines du voyage d’éveil à la conscience de la dialectique finitude-infinitude de l’existant.

                      De quelques Dits du soufi Muhyiddin Ibn Arabi

                      En réalité nous ne cessons jamais d’être en voyage depuis l’instant de notre constitution originelle et celui de la constitution de nos principes physiques, jusqu’à l’infini. Quand t’apparaît une demeure, tu te dis : voici le terme ; mais à partir d’elle s’ouvre une autre voie dont tu tires un viatique pour un nouveau départ.

                      L’existence a pour origine le mouvement. Il ne peut donc y avoir d’immobilité en elle, car si elle restait immobile, elle reviendrait à son origine qui est le néant. Le voyage ne cesse donc jamais dans le monde supérieur et inférieur.

                      A l’amour nous nous adonnons.

                      Que d’ennemis haineux dans les rangs des mosquées !"

                      Mon cœur est devenu capable d’adopter toutes les formes.

                      Il est pâturage pour les gazelles

                      Et abbaye pour les moines

                      Il est un temple pour les idoles

                      Et la Ka`ba pour qui en fait le tour

                      Il est les Tables de la Torah

                      Et aussi les feuillets du Coran.

                      La religion que je professe est celle de l’amour

                      Partout où ses montures se tournent,

                      L’amour est ma religion et ma foi.


                      L’homme possède deux aspects de perfection. Par le premier, il accède au degré de la Présence divine et par l’autre, au degré de la présence du monde de la génération (kiyâniyya). D’une part, on dit de lui qu’il est un serviteur du fait qu’il est assujetti (mukallaf), qu’il n’existait pas puis vint à l’existence à l’instar du Cosmos ; d’autre part, on dit de lui qu’il est seigneur (rabb) sous le rapport de la Lieutenance (khalîfa), de la forme (cûra) et de la plus belle constitution (ahsan taqwîm). (cf. Coran 95 : 4). Il est aussi un Isthme (barzakh) entre le Monde et Dieu le Réel, il synthétise (jâmi’) la créature (khalq) et Dieu le Réel (haqq). Il est la ligne de séparation entre le degré de la Présence divine et celui du monde de la génération (kawmiyya), comme la ligne [imaginaire] séparant l’ombre du soleil. Telle est sa réalité.

                      Celui qui est fixé sur telle adoration particulière ignore nécessairement la vérité intrinsèque d’autre croyances, par cela même que sa croyance en Dieu implique la négation d’autres formes de croyance. S’il connaissait le sens de la parole de Junayd : « La couleur de l’eau, c’est la couleur de son récipient », il admettrait la validité de toute croyance, et il reconnaîtrait Dieu en toute forme et en tout objet de foi.

                      La Réalité Divine Essentielle (al-Haqîqatu-l-Ilâhiyya) est trop élevée pour être contemplée par l’« œil » qui doit contempler, tant que subsiste une trace de la condition de créature dans l’« œil » du contemplant. Mais lorsque « s’éteint ce qui n’a pas été » - et qui est (par nature) périssant - « et reste ce qui n’a jamais cessé d’être » - ce qui est (par nature) permanent- alors se lève le Soleil de la preuve décisive pour la Vision par soi (al-’lyân). Alors se produit la sublimation absolue (at-tanazzuhu-l-mutlaq) effective dans la Beauté Absolue (al-Jamâlu-l-Mutlaq), et c’est cela l’« Œil de la Synthèse et de la Réalisation par excellence » (’Aynu-l-Jam’i wa-l-Wujûd) et la « Station de la Quiétude et de la Suffisance Immuable » (Maqâmu-sSukûni wa-l-Jumûd). Cet Œil voit alors les Nombres comme étant un « Unique », le nombre « Un » (Wâhid), qui, cependant, voyage dans des degrés numéraux et qui par ce voyage manifeste les entités des Nombres. C’est à cette station contemplative que se produit la glissade de celui qui professe (la doctrine de) l’« unification » (al-ittihâd), Celui-ci, voyant que l’Unique voyage dans des degrés numéraux dont l’existence est purement estimative (wahmiyya), où Il reçoit toutefois des noms qui varient avec les degrés, ne voit pas les Nombres comme étant autre chose que l’Un (al-Ahad) : alors il dit qu’il y a eu « unification », Or (I’Unique, ou l’Un) ne paraît avec son propre nom (ism), en même temps qu’avec son essence (dhât), dans aucun autre degré que dans celui de l’Unité première (al-Wahdâniyya) ; toutes les fois qu’il paraît dans d’autres degrés que celui-là avec son essence, il ne fait pas paraître son propre nom, mais est nommé alors d’après ce que confère la réalité des degrés numéraux respectifs. Ainsi, par son « nom » propre, il produit l’extinction (yufnî) et par son « essence », il produit la permanence : quand tu dis « un » (ou « unique ») (wâhid) s’éteint ce qui est autre que lui, par la vertu de ce nom, et quand tu dis « deux », l’entité du « deux » paraît par la présence de l’essence de l’Un à ce degré numéral, mais évidemment pas en raison du nom de Celui-ci, car ce nom est contradictoire avec l’existence dudit degré numéral, alors que son essence n’y fait aucune opposition.

                      Si le Quatrième Ciel est le « centre vital »(10) du monde humain, où brille « la lumière des hommes », c’est aussi le cœur du domaine subtil où se produisent et se situent les rêves, ce qui montre l’unité profonde des développements apparemment sans lien que comporte le présent chapitre.


                      • ilias 20 avril 17:37

                        La publication précédente de mon post a été tronquée automatiquement. Je republie le même commentaire, tronquée cette fois par moi-même pour cause de limite de caractères imposée par agoravox. Vous avez cité le boudhisme, le taoisme, etc ; mais malheureusement vous avez omis une autre voie tout aussi importante pour quiconque veut se mettre au courant des expériences humaines du voyage d’éveil à la conscience de la dialectique finitude-infinitude de l’existant.

                        De quelques Dits du soufi Muhyiddin Ibn Arabi

                        En réalité nous ne cessons jamais d’être en voyage depuis l’instant de notre constitution originelle et celui de la constitution de nos principes physiques, jusqu’à l’infini. Quand t’apparaît une demeure, tu te dis : voici le terme ; mais à partir d’elle s’ouvre une autre voie dont tu tires un viatique pour un nouveau départ.

                        L’existence a pour origine le mouvement. Il ne peut donc y avoir d’immobilité en elle, car si elle restait immobile, elle reviendrait à son origine qui est le néant. Le voyage ne cesse donc jamais dans le monde supérieur et inférieur.

                        De l’amour nous sommes issus,
                        Selon l’amour nous sommes faits.
                        C’est vers l’amour que nous tendons.
                        A l’amour nous nous adonnons.

                        Que de saints bien-aimés dans les synagogues et les églises !
                        Que d’ennemis haineux dans les rangs des mosquées !"

                        Mon cœur est devenu capable d’adopter toutes les formes.

                        Il est pâturage pour les gazelles

                        Et abbaye pour les moines

                        Il est un temple pour les idoles

                        Et la Ka`ba pour qui en fait le tour

                        Il est les Tables de la Torah

                        Et aussi les feuillets du Coran.

                        La religion que je professe est celle de l’amour

                        Partout où ses montures se tournent,

                        L’amour est ma religion et ma foi.

                        L’homme possède deux aspects de perfection. Par le premier, il accède au degré de la Présence divine et par l’autre, au degré de la présence du monde de la génération (kiyâniyya). D’une part, on dit de lui qu’il est un serviteur du fait qu’il est assujetti (mukallaf), qu’il n’existait pas puis vint à l’existence à l’instar du Cosmos ; d’autre part, on dit de lui qu’il est seigneur (rabb) sous le rapport de la Lieutenance (khalîfa), de la forme (cûra) et de la plus belle constitution (ahsan taqwîm). (cf. Coran 95 : 4). Il est aussi un Isthme (barzakh) entre le Monde et Dieu le Réel, il synthétise (jâmi’) la créature (khalq) et Dieu le Réel (haqq). Il est la ligne de séparation entre le degré de la Présence divine et celui du monde de la génération (kawmiyya), comme la ligne [imaginaire] séparant l’ombre du soleil. Telle est sa réalité.

                        Celui qui est fixé sur telle adoration particulière ignore nécessairement la vérité intrinsèque d’autre croyances, par cela même que sa croyance en Dieu implique la négation d’autres formes de croyance. S’il connaissait le sens de la parole de Junayd : "La couleur de l’eau, c’est la couleur de son récipient", il admettrait la validité de toute croyance, et il reconnaîtrait Dieu en toute forme et en tout objet de foi.

                        La Réalité Divine Essentielle (al-Haqîqatu-l-Ilâhiyya) est trop élevée pour être contemplée par l’« œil » qui doit contempler, tant que subsiste une trace de la condition de créature dans l’« œil » du contemplant. Mais lorsque "s’éteint ce qui n’a pas été« - et qui est (par nature) périssant - »et reste ce qui n’a jamais cessé d’être" - ce qui est (par nature) permanent- alors se lève le Soleil de la preuve décisive pour la Vision par soi (al-’lyân). Alors se produit la sublimation absolue (at-tanazzuhu-l-mutlaq) effective dans la Beauté Absolue (al-Jamâlu-l-Mutlaq), et c’est cela l’"Œil de la Synthèse et de la Réalisation par excellence" (’Aynu-l-Jam’i wa-l-Wujûd) et la « Station de la Quiétude et de la Suffisance Immuable » (Maqâmu-sSukûni wa-l-Jumûd). Cet Œil voit alors les Nombres comme étant un « Unique », le nombre « Un » (Wâhid), qui, cependant, voyage dans des degrés numéraux et qui par ce voyage manifeste les entités des Nombres. C’est à cette station contemplative que se produit la glissade de celui qui professe (la doctrine de) l’« unification » (al-ittihâd), Celui-ci, voyant que l’Unique voyage dans des degrés numéraux dont l’existence est purement estimative (wahmiyya), où Il reçoit toutefois des noms qui varient avec les degrés, ne voit pas les Nombres comme étant autre chose que l’Un (al-Ahad) : alors il dit qu’il y a eu « unification », Or (I’Unique, ou l’Un) ne paraît avec son propre nom (ism), en même temps qu’avec son essence (dhât), dans aucun autre degré que dans celui de l’Unité première (al-Wahdâniyya) ; toutes les fois qu’il paraît dans d’autres degrés que celui-là avec son essence, il ne fait pas paraître son propre nom, mais est nommé alors d’après ce que confère la réalité des degrés numéraux respectifs. Ainsi, par son « nom » propre, il produit l’extinction (yufnî) et par son « essence », il produit la permanence : quand tu dis « un » (ou « unique ») (wâhid) s’éteint ce qui est autre que lui, par la vertu de ce nom, et quand tu dis « deux », l’entité du « deux » paraît par la présence de l’essence de l’Un à ce degré numéral, mais évidemment pas en raison du nom de Celui-ci, car ce nom est contradictoire avec l’existence dudit degré numéral, alors que son essence n’y fait aucune opposition.

                        S’agissant du Christ « historique », le pouvoir dont il s’agit est en relation directe avec la doctrine du shubbiha la-hum de Cor, 4, 157, par laquelle est expliquée en Islam la mort apparente du Christ : cette expression signifie littéralement « il a été fait pour eux une image analogue », ce qui veut dire qu’après la Crucifixion la « nature divine » du Christ s’était retirée de sa forme corporelle pour rejoindre le centre subtil « vital » de son étant individuel ; ou encore, pour reprendre les termes de Jandî, que Jésus avait « transporté avec lui par son action de présence » la forme qu’il avait quittée dans le monde sensible de sorte que c’est une forme analogue à celle du supplicié qui était sortie du tombeau « le troisième jour ».
                        Une fois de plus, on constante combien les divergences et les querelles théologiques sont factices et artificielles(1). En effet, si la doctrine exposée ici est ignorée des exotéristes musulmans (qui s’imaginent que ce n’est pas le Christ qui a été crucifié mais un sosie au sens habituel du terme) tout autant que des théologiens chrétiens, elle est néanmoins parfaitement connue dans le Tasawwuf et l’on en retrouve aussi de nombreuses traces dans le dogme chrétien. Ainsi, la parole du Christ en croix Eli, Eli, lamma sabaqta-nî : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » est celle que la forme humaine adresse à la nature divine quand celle-ci l’a «  précédée »(2) dans le centre vital en l’abandonnant dans le domaine extérieur et sensible. D’autre part, la victoire du Christ sur la mort ne s’opère pas au moment de la Résurrection, ainsi que le suggère la présentation théologique habituelle, mais à l’instant même où il expire en disant : « Père, je remets mon esprit entre Tes mains ».
                        On oublie trop aisément que le Symbole de Nicée, entre les mentions « est mort et a été enseveli » et « le troisième jour, est ressuscité d’entre les morts » affirme que le Christ est « descendu aux Enfers », lieu qu’il ne faut pas confondre avec le séjour des damnés puisqu’il correspond en réalité aux Limbes, cette région proche du Paradis où, selon la perspective propre du Christianisme, les Justes attendaient d’être délivrés. C’est en tant qu’il est déjà « vivant » d’une vie nouvelle et vainqueur de la mort que le Christ opère cette délivrance afin de le faire participer à sa Résurrection et à son Ascension dans le Paradis. Enfin, la « forme analogue » assumée par le Christ après sa Résurrection explique les difficultés que ses proches et ses disciples éprouvent à le reconnaître.

                        Si le Quatrième Ciel est le « centre vital »(10) du monde humain, où brille « la lumière des hommes », c’est aussi le cœur du domaine subtil où se produisent et se situent les rêves, ce qui montre l’unité profonde des développements apparemment sans lien que comporte le présent chapitre.


                        • ilias 20 avril 17:49

                          Correction du commentaire précédent. La publication précédente du commentaire a été tronquée automatiquement en certains passages.

                          1.] De l’amour nous sommes issus,
                          Selon l’amour nous sommes faits.
                          C’est vers l’amour que nous tendons.
                          A l’amour nous nous adonnons.

                          Que de saints bien-aimés dans les synagogues et les églises !
                          Que d’ennemis haineux dans les rangs des mosquées  2.] S’agissant du Christ « historique », le pouvoir dont il s’agit est en relation directe avec la doctrine du shubbiha la-hum de Cor, 4, 157, par laquelle est expliquée en Islam la mort apparente du Christ : cette expression signifie littéralement « il a été fait pour eux une image analogue », ce qui veut dire qu’après la Crucifixion la « nature divine » du Christ s’était retirée de sa forme corporelle pour rejoindre le centre subtil «  vital » de son étant individuel ; ou encore, pour reprendre les termes de Jandî, que Jésus avait « transporté avec lui par son action de présence » la forme qu’il avait quittée dans le monde sensible de sorte que c’est une forme analogue à celle du supplicié qui était sortie du tombeau « le troisième jour ».


                          Une fois de plus, on constante combien les divergences et les querelles théologiques sont factices et artificielles(1). En effet, si la doctrine exposée ici est ignorée des exotéristes musulmans (qui s’imaginent que ce n’est pas le Christ qui a été crucifié mais un sosie au sens habituel du terme) tout autant que des théologiens chrétiens, elle est néanmoins parfaitement connue dans le Tasawwuf et l’on en retrouve aussi de nombreuses traces dans le dogme chrétien. Ainsi, la parole du Christ en croix Eli, Eli, lamma sabaqta-nî : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?  » est celle que la forme humaine adresse à la nature divine quand celle-ci l’a « précédée »(2) dans le centre vital en l’abandonnant dans le domaine extérieur et sensible. D’autre part, la victoire du Christ sur la mort ne s’opère pas au moment de la Résurrection, ainsi que le suggère la présentation théologique habituelle, mais à l’instant même où il expire en disant : « Père, je remets mon esprit entre Tes mains ».

                          On oublie trop aisément que le Symbole de Nicée, entre les mentions «  est mort et a été enseveli » et « le troisième jour, est ressuscité d’entre les morts » affirme que le Christ est «  descendu aux Enfers », lieu qu’il ne faut pas confondre avec le séjour des damnés puisqu’il correspond en réalité aux Limbes, cette région proche du Paradis où, selon la perspective propre du Christianisme, les Justes attendaient d’être délivrés. C’est en tant qu’il est déjà « vivant » d’une vie nouvelle et vainqueur de la mort que le Christ opère cette délivrance afin de le faire participer à sa Résurrection et à son Ascension dans le Paradis. Enfin, la « forme analogue » assumée par le Christ après sa Résurrection explique les difficultés que ses proches et ses disciples éprouvent à le reconnaître.

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON

Auteur de l'article

annaba philippe

annaba philippe
Voir ses articles



Publicité




Palmarès



Publicité