La journée d’une auxiliaire de vie diplômée
• La richesse des humbles et la pauvreté des puissants •
•• Salaire 8 euros net de l’heure en 2016 ! ••
Et une aide à domicile pour 7 euros net bien sûr ! (°)
Témoignage :
« Aujourd'hui super journée de travail : à 7h45 j'étais chez une dame (c'est la seconde fois que j'y vais le week-end) qui a la maladie d'Alzheimer, très avancée, son mari est parti à la chasse. On dirait une enfant, elle parle comme une enfant, elle est adorable. Durant une heure et demi j'ai chanté et dansé avec elle, je crois qu'elle a aimé car lorsque sa fille est venu prendre la relève, elle m'a dit “tu reviendras ?”. C'est comme ça que l'on est remercié pour le travail social que l'on fait. Tu ne peux pas savoir comme cela m'a fait plaisir !
Ensuite un vieux monsieur grabataire qui a toute sa tête. J’aime discuter avec lui. Il a beaucoup d’humour et des tas d’anecdotes à raconter. Je le connais depuis près de deux ans. Il est dans cette association d’aide à domicile dont je fais partie. Il est très intéressant.
Après, je file à la colocation qui est un regroupement de retraités qui sont dans une maison en colocation à l’initiative d’une infirmière retraitée. Un magnifique lieu de vie où chacun a sa chambre et sa salle de bain indépendante ainsi, qu’un salon avec une grande baie vitrée qui donne sur un champ ou paissent des ânes et des chèvres… Alors là j'aime encore plus, un lieu super où vivent 6 personnes, dont quatre dépendantes. Il faut leur servir le repas qui est livré par un traiteur, aider à manger celle qui est aveugle (ma préférée), faire ensuite le ménage, etc. Pour te dire : Une des filles de mon association qui allait là-bas n'aimait pas du tout ! Elle me disait qu'il n'y avait pas de dialogue, qu'elle faisait juste un service. Pour moi, c'est le contraire, je blague avec tout le monde, en plus c'est un lieu magnifique “l'éco-location”. Il y a une femme de mon âge non dépendante mais qui a eu un AVC et parle difficilement, un homme non dépendant qui est là avec sa femme de 65 ans qui elle aussi est “Alzheimer”. Une ancienne artiste, tous deux adorables.
Mon travail terminé, je suis allée rendre visite à une mamie chez qui j'allais deux fois par jour (assez loin, je m'en plaignais pour le trajet). Depuis les fêtes de fin d'année où elle est tombée et ne marche plus (et il semble qu'elle ne remarchera peut-être jamais) je vais la voir régulièrement dans son centre de rééducation, pour lui changer les idées. Elle n'arrête pas de me dire qu'on s'entendait bien et me remercie de passer, elle est heureuse comme tout de papoter avec moi !
Bref, j'aime tous ces gens et n'échangerais ce travail pour rien au monde !
Bref, j'aime tous ces gens et n'échangerais ce travail pour rien au monde ! Je crois avoir toujours fait ça. Retourner rendre visite à celles des personnes pour lesquelles j'ai aimé travailler.
Celle qui appréciait le plus ma venue, c'était une dame de 70 ans atteinte d'un cancer des os. Il y avait aussi bien sûr, ma voisine pour qui j'allais, de plus en plus loin, rendre visite dans sa maison de retraite pendant quatre ans. Dans la Drôme où j'habitais à l'époque, sa fille m'avait embauchée pour lui donner sa morphine matin et soir et l'aider à la toilette, plus quelques autres services, genre l'accompagner à l'hôpital en ambulance (bénévolement) pour essayer de comprendre ce que l'oncologue lui expliquait. On s'était liées du coup sa fille et moi. Une rigolote très sympa qui m'a été reconnaissante pour tout ce que j'ai fait pour sa maman. Et bien durant trois ou quatre mois, je prenais de mon temps pour aller lui tenir compagnie dans son centre de soins palliatifs deux fois par semaine jusqu'à sa mort. Mon compagnon me disait que je n'étais pas obligée d'y aller aussi souvent. Mais quand je partais et qu'elle me disait “vous revenez jeudi ?”, deuxième jour dans la semaine où je pouvais lui rendre visite après mon travail, je ne pouvais pas lui dire non. Je savais qu'elle n'en avait plus pour longtemps et je n'aurais pas pu dormir de lui refuser mes visites.
Et quelques autres, comme cette vieille institutrice atteinte de la maladie de Parkinson, maladie très avancée dans son cas, que j'allais voir à des centaines de km de chez moi, en maison de retraite pour enseignant, lorsqu'elle a dû quitter son logement. Il nous arrivait d'acheter un demi de champagne avec les biscuits roses de Reims qui vont avec, chacune à notre tour et de nous faire plaisir ensemble. Que de bons petits souvenirs j'ai eu avec elle. Je lui écrivais, comme je l'ai fait avec toutes mes mamies, lorsque je partais en vacances.
Tiens pas de papys dans mes histoires, j'en ai eu pourtant de très gentils aussi, mais je n'ai pas gardé de liens avec eux. Tu sais, ça aussi c'est beaucoup aimer, pas uniquement l'amour charnel d'un homme…
Parfois j’interviens pour un dextro (glucomètre, appareil permettant de mesurer la glycémie capillaire chez un patient diabétique), une tension, des médicaments, que j'ai déjà fait par-ci par-là, d'autres pour des toilettes comme par exemple le monsieur où j'interviens ce week-end pour lui préparer son repas et un peu d'aides diverses. Il est très costaud. Il ne peut plus marcher du tout et chaque matin j'aide l'infirmière qui lui fait sa toilette complète au lit. Je l'assiste aussi pour le lever avec le lève-malade. C’est une tache que j'ai effectuée durant 5 ans chez une patiente, lorsque je partais le week-end dans l'Hérault. Mais pour son cas, il est si gros qu'il vaut mieux être deux pour l'asseoir sur son fauteuil. Dans les maisons de retraites plus aisées, il y a des élévateurs spéciaux pour personnes à forte corpulence, mais pas ici. Alors on fait comme on peut.
Pour ma part, ce que je fais, je le fais avec plaisir…
Ce soir je retourne à la colocation.
En fait, voilà où je voulais en venir : Même dans cette colocation, il y a des personnes qui ont les mêmes avis que moi, sur ce qui nous tombe dessus. La vieille dame aveugle (glaucome depuis l'âge de 50 ans) me disait juste avant mon départ que nous allions vers la guerre. Cela ne sert à rien de faire l'autruche, enfin pour moi, je me sens concernée.
Et ce qui est désolant, c’est que tous ces puissants qui disent nous gouverner depuis des décennies (politiques nationaux, européens, internationaux, banquiers, hauts fonctionnaires du FMI, de la Banque mondiale, de l’ONU, multinationales, etc.), ne sont que des incapables, des escrocs, des corrompus, des pilleurs et manipulateurs prétentieux qui ne pensent qu’à leurs petits profits personnels et leur ego, sans savoir l’humanité nécessaire pour conduire avec amour les peuples vers leurs épanouissements. Et devant de tels lâches, nous n’avons pas fini de pleurer sur notre destin à venir.
Pour ma part, ce que je fais, je le fais avec plaisir. La vérité, c'est que lorsque je suis avec ces personnes handicapées ou malades, je remercie sans cesse Dieu de m'avoir donné la santé, le bonheur de marcher, de pouvoir encore regarder et apprécier les merveilles de la nature et je me dis que la vie est injuste ! Certain(e)s cumulent les malheurs, que ce soit physiquement ou épreuves de la vie, quand moi je me porte à merveille et, pour l'instant, n'ai pas encore trop souffert hormis une période plus ancienne de ma vie. »
Propos recueillis par Pierre Sarramagnan-Souchier, le 07 avril 2016.
(°) Pas de soucis ! Rien de changé sous le Ciel : Les pauvres peuvent se brosser sous un régime socialiste français qui assume sa stupidité !
Et pendant ce temps là il y en a qui gagnent… un million d'euro de l'heure !
Un million par heure pour Bernard Arnault :
En un an, la fortune du PDG d’LVMH a grossi de 9,27 milliards d’euros. Grâce à quels coups tordus ce prédateur a-t-il pu monter cet empire ?
http://www.humanite.fr/un-million-par-heure-pour-bernard-arnault-578232
Illustration : Lotus. © Duong Quo Cdjnh.
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