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#29 des Tendances

L’Homme qui marche est-il toujours la métaphore de la condition de l’individu ?

Né avec le XXème siècle en Suisse Alberto Giacometti (1901-1966) est issu d'une lignée d'artistes, l'influence de son père déterminant son devenir. Son parcours partagé entre la peinture, la sculpture et le dessin va se dérouler essentiellement à Paris. Son œuvre est radicale parce qu'il emprunte un chemin solitaire au temps des avant-gardes du cubisme et du surréalisme. Il se détourne d'une carrière toute tracée et privilégie une voie personnelle, exigeante, hors des sentiers battus.

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Au cours des années 1940, il rencontre Annette Arm qui deviendra son épouse et l'un de ses modèles favoris. Pendant la deuxième guerre mondiale il se réfugie à Genève et réalise des figures minuscules en bronze placées sur des socles disproportionnés. A son retour à Paris en 1945, il multiplie les femmes debout, immobiles et les hommes en marche, figures longilignes et majestueuses, à la structure linéaire, conçues dans une économie du modelage au terme d'un long et difficile cheminement. Sartre, dont il est proche, évoque à propos de son travail : 'La matière de Giacometti, cette étrange farine qui poudroie, ensevelit lentement son atelier, se glisse sous ses ongles et dans les rides profondes de son visage, c'est de la poussière d'espace'. Son unique sujet devient alors la représentation de l'être humain et il va tenter de façonner l'homme dans sa présence au monde, sans, selon lui, jamais y parvenir, artiste exigeant toujours en recherche, jamais satisfait de lui-même, entièrement dédié à la création de sculptures d'une grande intensité visuelle.

L'Homme qui marche, 1960
L'Homme qui marche apparaît dépouillé de tout superflu, de toute arrogance, au profit de l'essentiel. L'Homme qui marche d'un pas si décidé et fragile à la fois, sa silhouette décharnée surgissant d'un large socle en plâtre d'où les pieds s'arrachent à la matière. Pas de pathos dans ce personnage aux pieds alourdis par la terre sur laquelle ils sont posés, personnage irrémédiablement seul et on ne peut plus humain. Notre regard s'attarde sur le vide, le creux laissé par l'enjambée et dont l'enjeu est pour son créateur aussi important que l'est le plein. Solitaire et hors d'atteinte, courbé par le poids du monde, il continue de marcher à l'encontre de la violence de la société. Figure volontaire il marche avec une grande détermination, tout comme Giacometti, tout comme nous tous. L'Homme qui marche est l'icône de l'Art contemporain et la représentation de la gravité de la vie. Réalisé par l'artiste six ans avant sa mort à un moment où la création devient pour lui une marche implacable, obstinée, indispensable.

La marche comme contact avec le monde, nous rappelle sans cesse notre finitude
Marcher, ce n'est pas s'illusionner par la vitesse ou l'élévation sur notre condition mortelle, mais avancer à l'encontre de cette exposition à la solidité du sol, à ce mouvement d'enfoncement. Marcher, c'est se contraindre à être ce corps incliné, corps de plomb qui à chaque pas retombe sur la terre, pour y reprendre racine. La marche, en ce sens, est une invitation de l'artiste à mourir debout, et plus largement une métaphore de l'homme universel, qui les pieds sur terre continue d'avancer et d'un grand pas et persévère dans le faire et le vivre, sans fuite en avant égotique, tourné vers l'avenir et ce toujours dans la même direction .
Il y a mille manières de se projeter dans l'art de Giacometti, qui de par sa résistance à toute opulence matérielle, de par la fragilité et l'intensité de ses sculptures et de leur beauté austère, sombre, saturnienne, de par son chemin singulier, radical et solitaire, reste une énigme. La consécration lui vient avec le prix de sculpture de la biennale de Venise en 1962 et reçoit la même année le grand prix national des arts en France. Au moment où l'on observe en France la montée de nationalismes xénophobes, le discrédit des élites politiques, la violence de la guerre en Europe, l'épuisement des ressources et l'urgence écologique cette oeuvre énigmatique et inclassable se doit de raisonner très fortement, parce qu'elle est à jamais contemporaine.
C'est l'institut Giacometti qui, à Paris, fait résonner son oeuvre :
https://www.fondation-giacometti.fr/fr/ Institut Giacometti


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2 réactions à cet article    


  • raymond 25 juin 17:09

    tient il nous manque pas mal d’habituels comme rosemard et autres.


    • Xenozoid Xenozoid 25 juin 17:29

      @raymond

       les robots, je sais certains ici ne me prennent pas au sérieux, mais on peux ici sur avx les aider à se développer, lol

      je suis neutre, mais si demain un robot montre de l’empathie pour l’autre, je ferais pareil

      blague d’Asimov

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