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Airbnb aggrave la crise de l’immobilier dans les grandes villes françaises

Le nombre de nuits réservées sur le site de locations immobilières Airbnb devrait doubler en 2015 par rapport à l'an dernier pour atteindre 80 millions dans le monde. Une activité croissante qui n’est pas sans conséquences alors que certaines zones centrales des grandes villes de l'hexagone - tout particulièrement Paris - des quartiers entiers se vident de leurs habitants, pour mieux accueillir les touristes de passage, affectant sensiblement le marché immobilier et la vie de quartier.

Airbnb s’envole

L'attrait touristique du nouveau continent connaît de beaux jours. Aujourd'hui, environ la moitié des revenus de la société américaine Airbnb provient désormais d'Europe, contre 30 % des Etats-Unis. Le groupe s'apprête également à doubler ses transactions par rapport à l'année dernière, pour atteindre la barre de 80 millions de locations dans le monde et propose aujourd’hui 1,5 million d'hébergements en location sur son site dans plus de 34 000 villes à travers 190 pays.

Si Airbnb ne fait pas encore de bénéfices - il devrait même perdre 150 millions de dollars en 2015 – son chiffre d’affaires a plus que triplé en 2 ans, passant de 250 à 850 millions de dollars. Et ça ne s'arrête pas là. Les pronostics de la direction sont exponentiels : de 10 milliards de dollars en 2020, pour 3 milliards de bénéfices d'ici là. Pour mesurer l'engouement suscité par cette start-up devenue un mammouth de l'économie, sa valeur en bourse serait estimée à deux fois celle du groupe Français AccorHotels (11 milliards d’euros en Bourse), qui, lui, possède la bagatelle de 3 700 hôtels.

Airbnb est devenu proprement incontournable dans une large partie des grandes villes du monde. Et la croissance du géant américain ne s'arrête pas là. L’entreprise développe son réseau dans nos campagnes. Comme l'indique le témoignage de Patricia Lemire, 65 ans, la location d'hébergements particuliers se met au vert : « l’an dernier, j’étais allée à la communion de ma petite-fille près d’Avignon et je ne trouvais pas de logement. J’ai regardé sur Airbnb et j’ai trouvé une chambre à 20 € la nuit dans un château au milieu des vignes de Châteauneuf-du-Pape ». Ce développement concerne principalement le tourisme saisonnier - professionnels l'été ou peur les fêtes locales, vendanges, tour de France, ou de simples curieux. Tous semblent chanter aujourd’hui les louanges du groupe.

Et désertifie tous sur son passage

Au début, le site attirait surtout des étudiants qui, pour se faire un petit revenu (le nom vient de "air bed and breakfast" - matelas gonflant et petit déjeuner) proposaient un matelas dans leur salon à des voyageurs tout aussi désargentés. Mais aujourd’hui, l'aspect de l'offre qui se développe le plus est parle le business et d’appartements de luxe. Et - on le sait maintenant tous - le luxe, c'est l'espace. Or, dans le centre des principales villes françaises, on assiste à une nouvelle forme de désertification. Des quartiers entiers du centre de Paris ont, par exemple, étés transformés en dortoirs pour touristes aisés. Le détournement d'une portion importante du parc immobilier dans un marché locatif déjà moribond, n'est pas sans impact. La pression immobilière, déjà très élevée, ne s'en voit que renforcée.

Le phénomène inquiète en haut lieu, mais les revenus potentiels levées sur l'activité du site - surtout depuis la nouvelle taxe de séjour de 83 centimes par nuitée - ont pour l'instant bloqué ceux qui parmi nos décideurs locaux, ont voulu tirer la sonnette d'alarme. Soucieux de montrer sa bonne volonté vis-à-vis des pouvoirs publics, Airbnb s'est engagé fin août à collecter à partir du 1er octobre une taxe de séjour auprès de ses hôtes à Paris. Et s'il faut se féliciter d'une plus grande flexibilité du parc locatif français - pays qui vit largement de tourisme - la crainte est qu’Airbnb fasse subir aux grandes villes françaises un sort similaire à celui de Barcelone, où ce type d'hébergement a défiguré la cité et largement contribué à la crise immobilière. La location par des Parisiens de leur propre appartement pendant quelques semaines semaines par an (quand les propriétaires partent en vacances) n’est évidemment pas le cœur du problème. Dans les grandes villes, la question est très différente lorsqu'il s'agit des multipropriétaires "spéculateurs", qui louent leur parc immobilier.

Logements à Paris : le grand détournement

Ce problème est d'autant plus avéré que de nombreux propriétaires louent des appartements sans respecter les délais de location légaux en France. Selon la réglementation en vigueur, des propriétaires peuvent louer sans autorisation leur résidence principale dans la limite de 4 mois par an. Ceux qui veulent louer un bien à l'année doivent demander à la mairie une autorisation, accordée sous réserve de transformer en logement des locaux non dévolus à l'habitation (par exemple un bureau ou un commerce). Pourtant, de nombreux hébergements sont détournés à l'année pleine. On estime que jusqu'à 30 000 logements locatifs auraient ainsi basculé en toute illégalité dans une fonction d'hébergement touristique dans la seule ville de Paris. Dans certains immeubles du Marais, un appartement sur quatre a été transformé en meublé touristique. Ainsi, Henri Tordjman, président de l’Association des commerçants de la rue des Ecouffes et de la rue des Rosiers déplore : « Il y a des va-et-vient incessants à toute heure de la nuit. Les voisins ont perdu leur tranquillité. Le quartier se vide de ses habitants. Les commerces de bouche ont de moins en moins de clients. Les touristes ne font pas de courses. Ils vont au restaurant ou mangent des sandwichs ».

La pratique est si courante que des sites professionnels aident désormais au vu et su de tous les multipropriétaires - ou les investisseurs immobiliers - à identifier les appartements les plus rentables pour ce type d'opération. Superficies les plus recherchées, tarifs pratiqués, lieux les plus indiqués, la fraude devient une science. Les abus sont allés si loin que des inspecteurs du bureau de la protection des locaux d’habitation de la mairie de Paris ont retrouvé des immeuble appartenant au domaine public - à l'état, donc - dans certaines annonces sur le site. Ces derniers ayant été délégués à une personne privée par un titre d'occupation du domaine public (Autorisation d’occupation temporaire), selon lequel l’utilisation du domaine public doit se faire conformément à l’affectation d’utilité publique que ce domaine a reçue, sont détournés de leur usage afin d'enrichir leurs exploitants. En 2014, au prix de recherches laborieuses parmi les offres du site, 20 propriétaires détenteurs de 56 meublés illégaux ont été condamnés à 567 000 euros d’amende. Non seulement leur attitude est condamnable, mais ils menacent l'équilibre d'un écosystème de locations entre particuliers qui présente pourtant de nombreux avantages.


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14 réactions à cet article    


  • ben_voyons_ ! ben_voyons_ ! 14 octobre 2015 18:08

    Encore des revenus non déclarés, en masse !

    Encore plus de chômage, de masse !

    Merci à toux ceux qui laissent prospérer tous ces systèmes de « particulier » (sic) à « particulier » (re-sic) (traduire de « fonctionnaires et assimilés » à « fonctionnaires et assimilés »).

     


    • colere48 colere48 14 octobre 2015 18:51

      @ben_voyons_ !

      ben vi.... faut du temps pour chercher sur internet...  smiley


    • Deneb Deneb 14 octobre 2015 22:06

      Le vieux monde qui s’écroule. Il n’y a plus d’arnaque tranquille, tout fout le camp, ma bonne dame. Après les taxis trollés par Uber et par blablacar , les hoteliers et les agences doublés par airbnb. Que du bonheur !


      • Robert GIL Robert GIL 15 octobre 2015 10:59

        Économie du partage, économie collaborative, économie du peer-to-peer, économie solidaire, économie post-capitaliste, nouvelle approche de l’économie etc., sont des appellations derrière lesquelles se cachent les rapports d’exploitation et de domination du capitalisme. L’économie du partage n’a pour but ni la satisfaction des besoins des individus ni le partage des richesses, mais la maximisation des profits. Le partage n’est qu’un prétexte, un moyen au service de cet objectif. Le véritable partage se fait entre les actionnaires d’Uber, d’Airbnb, de Blablacar, de Drivy, du Bon Coin etc. Après le microcrédit, le commerce équitable et autre développement durable, c’est au tour de l’économie du partage d’être un instrument au service du capital.
        L’économie du partage n’est qu’un avatar du capitalisme qui répond à la nécessité de celui-ci de conquérir de nouveaux marchés, de créer de nouveaux besoins pour surmonter ses crises. Dans ce sens elle n’est qu’un instrument au service du capital dont elle perpétue l’asservissement et la domination. Dire que l’économie du partage est une économie post-capitaliste est non seulement une chimère, mais aussi une absurdité.
        .
        voir : L’ÉCONOMIE DU PARTAGE AU SERVICE DU CAPITAL


        • bakerstreet bakerstreet 15 octobre 2015 13:17

          @Robert GIL
          Le capitalisme récupère tout ce n’est pas nouveau, laissant les ambulances derrière lui faire la voiture balai. 

          Tiens, au fait un nouveau marché...Free-ambulance ?...

        • jacques 16 octobre 2015 19:22

          @bakerstreet
          je ne sais pour les ambulances, mais je viens d’entendre en publicité qu’arrivent les « sur-mutuelles »....


        • Sarah 15 octobre 2015 12:08

          Raisonnement faux.


          Il n’y a qu’une seule grande loi régissant le commerce, et cela depuis la nuit des temps : la Loi de l’Offre et de la Demande.


          Si Airbnb a du succès parce qu’il correspond à un besoin. Interdisez la location temporaire, saisonnière, où logez-vous les touristes, les gens de passage, les étudiants venus passer un examen ?

          Vous ne ferez que déplacer le problème ou en ajouter de nouveaux.


          Ce que vous écrivez est typique du raisonnement de l’Etat Français : répartir la pénurie. Beaucoup raisonnent comme si le nombre de logements étaient fixe, alors qu’il est changeant, dynamique.


          • Sarah 15 octobre 2015 12:10

            Pourquoi y a-t-il pénurie en France ? Parce qu’il n’y a pas assez d’offres tout simplement ! Et cela parce qu’il n’y a pas assez de gens construisant ou restaurant des habitations.


            Pourquoi les gens qui auraient de l’argent pour construire ou restaurer ne le font pas ? Uniquement à cause de lois et règlements qui transforment la construction en parcours du combattant et une fois construit ou restauré ou rénové, expose celui qui aurait des velléités de devenir bailleur à des risques tels qu’il préfère ne pas s’y exposer.


          • Sarah 15 octobre 2015 12:12

            Avant cet arsenal de lois, règlements et normes, il n’y avait pas de pénurie en France (faites une recherche historique). Supprimez-les et la pénurie sera finie.


            Mais vous êtes dirigés par des gens qui y trouvent avantage (la pénurie profite à certains politiciens et leurs copains, à certaines associations subventionnées qui en font leur raison d’être) ou des pondeurs de lois qui n’accepteront jamais d’avouer s’être trompés.


          • tashrin 15 octobre 2015 14:13

            @sarah

            Raisonnement tout aussi faux
            Ok pour la loi de l’offre et de la demande. Personne n’a dit qu’il n’y avait pas un besoin de locations temporaires. ce qui est reproché aux Uber et autres Airb&b, c’est tout simplement qu’ils ont profité d’un flou juriodique qui leur a permis d’imaginer un modele economique qui les affranchit d’une bonne part de leurs obligations societales
            Le plebiscite actuel n’est lié qu’à une chose ; le prix. Demandez à n’importe qui s’il prefere payer plus ou moins cher pour le meme service, la reponse sera sans surprise
            Mais si uber et compagnie etaient soumis aux mêmes obligations que les autres, la difference de prix se nivellerait nécessairement, ce qui leur permet de creuser l’écart ce sont les economies indues réalisées aux depens de leurs sous-traitants

            rien à voir avec un stock de logements changeant ou pas, une quelconque penurie ou autre. Ce qui leur est reproché relève du travail dissimulé (absence de cotisations sociales) et de la concurrence déloyale (vous savez la concurrence libre et non faussée si chere à ceux pour qui l’offre et la demande tient lieu d’horizon indépassable)

            Faire semblant de pas comprendre le probleme et ramener ca à un bete clivage gaucho/droito n’a pas de sens


            • De Bredevan marc (L'INFOTOX) De Bredevan marc (INFOTOX) 15 octobre 2015 14:50

              La mondialisation modifie le statut d’économie parallèle, artisanale en économie dite de partage « ubérisée ».
              Hormis l’originalité très tendance de ce nouveau label, quels sont réellement les progrès et dangers de ces bouleversements ?.
              Comme l’article, dont lien ci-dessus, le souligne, ce n’est pas tant la soi-disante nouveauté de cette économie « virtuelle » qui pose problème mais bien plutôt que celle-ci peut se développer, faute de règlements de saine concurrence, au détriment de l’économie « réelle » que l’on voudrait ringardiser afin de pouvoir mieux s’imposer.
              Article sur AgoraVox : Economie de partage, Uberisation de la pauvreté ?.

              http://www.agoravox.fr/actualites/economie/article/economie-de-partage-uberisation-de-172997


              • Sarah 15 octobre 2015 15:24

                @tashrin


                Il ne s’agit pas d’un débat « gaucho/droito ». Le problème vient de la pénurie (il s’agit bien du sujet de l’article : Crise de l’immobilier en France, non ?) et de cette frénésie de l’administration à contrôler, taxer, normer dès que quelqu’un se lance dans la moindre petite activité.


                Au Canada, non seulement il n’y a pas de pénurie de logement mais l’administration ne s’embête pas à taxer les petites activités.


                Dans le cas du loueur par Airbnb, c’est du gagne-petit dont l’administration ne devrait pas s’occuper. Mais en France, laisser faire quelque chose sans surveiller, contrôler, taxer, réglementer, leur donnerait de l’urticaire.


                • Sarah 15 octobre 2015 15:28

                  En dessous de 50 000 CAN $ (cas typique : chambres d’hôtes), les gens non seulement ne sont ni taxés, ni imposés, et n’ont même pas à déclarer l’existence de leur activité.

                  Et ça marche, fait tourner l’économie du pays, incite les gens à se lancer (ce qui compte là-bas est que les gens fasse quelque chose).

                  Si leur activité se met à bien marcher, c’est-à-dire à rapporter plus de 50 000 CAN $ par an, alors seulement l’administration exige déclaration, taxes et impôts.


                  En France, vous avez un régime qui tue toute initiative dans l’oeuf, s’acharne à casser toute personne cherchant à travailler (sauf copinage avec le politicien bien placé). 


                • tashrin 15 octobre 2015 17:35

                  @Sarah
                  J’ai parfaitement compris
                  Je ne suis pas d’accord, c’est different
                  Un tel regime existe de la meme maniere en France : l’Autoentrepreneur et auparavant la Micro
                   => formalités archi simplifiée, declaration minimum, regime forfaitaire, pas de tva, pas de compta
                  Il ne s’agit pas que d’un empilage de regles : c’est le fondement de tout le contrat social qui est en cause, le financement des mecanismes de protection dont la population beneficie
                  Et me sortez pas que c’est la faute de l’etat providence francais, d’une part c’est pas le sujet, et d’autre part si c’etait vrai, les activités d’Uber et consorts ne poseraient des problemes que chez nous. Or c’est pas le cas
                  Et vous ne repondez pas sur le volet concurrence deloyale / travail dissimulé

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OlivierG


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