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Commentaire de mithys

sur La laïcité est un attribut de l'État


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mithys 9 décembre 2008 20:49

La religion étant une affaire privée, les symboles religieux, admissibles dans les lieux publics, n’ont pas leur place à l’école, dont la fonction est de faire de chaque enfant un citoyen autonome et responsable. A fortiori lorsqu’un symbole comme le voile islamique matérialise la domination machiste, incompatible avec notre idéal de liberté et d’émancipation. Le tolérer serait accepter que des prescrits religieux prévalent sur nos lois et nos règlements.

Il me semble que Monsieur Aurélien Péréol a une vision très "catholique" de la laïcité ... !
Si la France et la Turquie sont les seuls pays au monde à avoir inscrit la laïcité "politique" dans leur Constitution, c’est-à-dire la séparation de l’Eglise et de l’Etat, j’ai l’impression que la notion de laïcité "philosophique" belge semble méconnue, voire inconnue, des Français ... 
Qu’il me soit donc permis, après l’avoir résumée, de suggérer, sous forme de questions, quelques pistes de réflexion, assez inhabituelles, j’en conviens : 

La laïcité philosophique, bien qu’elle refuse toute référence divine, n’est pas pour autant antireligieuse et n’impose rien. Elle vise seulement, par une information minimale, objective et non prosélyte, à faire découvir à côté du "fait religieux" souvent déjà connu, le "fait laïque", à savoir l’humanisme laïque, ses principes, ses valeurs, ses fondements, ses options et ses objectifs (actuellement occultés) afin de permettre à chacun de choisir, aussi librement et tardivement que possible, de croire ou de ne pas croire.

Il propose une morale laïque, fondée, non pas sur la soumission, mais sur la responsabilité individuelle, le libre examen, l’esprit critique et sur une conscience morale autonome, ainsi qu’ une spiritualité laïque capable de donner un sens à l’existence autrement que par la spiritualité religieuse.

Dans cet esprit, n’est-il pas grand temps, à notre époque de pluralisme des cultures et des convictions, de repenser le rôle de l’Etat, mais aussi celui des parents et des enseignants croyants qui devraient se demander s’ils ont encore moralement le droit, fût-il constitutionnel, de transmettre la même éducation que celle qu’ils ont reçue ?

Certes, l’Etat a une obligation de neutralité, et la Constitution est sensée garantir la liberté de conscience et de religion. Mais avant de prétendre garantir la liberté d’exprimer sa religion, ne faudrait-il pas d’abord garantir la liberté d’en avoir une ou de ne pas en avoir ?

Or cette liberté de choix n’est-elle pas compromise par l’imprégnation de l’éducation religieuse familiale précoce, forcément affective puisque fondée sur l’exemple et la confiance envers les parents, et par celle d’un milieu culturel unilatéral excluant toute alternative humaniste non aliénante ?

Le psychologue jésuite Antoine VERGOTE notamment, professeur à l’Université catholique de Louvain en 1966, n’a-t-il pas montré qu’en l’absence d’éducation religieuse, la foi n’apparaît pas spontanément, et qu’elle influence la religiosité à l’âge adulte ?

 D’autre part, des neurophysiologistes n’ont-ils pas établi que les amygdales (pas celles de la gorge mais du cerveau émotionnel) sont déjà capables, dès l’âge de 2 ou 3 ans, de stocker des souvenirs inconscients, et donc celui du comportement religieux des parents, reproduits via les neurones-miroir ? 

 Ces chercheurs n’ont-ils pas aussi constaté, par l’IRM fonctionnelle, que le cerveau émotionnel et le cortex préfrontal (et donc l’esprit critique et le libre arbitre ultérieurs) s’en trouvent anesthésiés, à des degrés divers, indépendamment de l’intelligence et de l’intellect, du moins dès qu’il est question de religion ? 

N’est-il dès lors pas logique et légitime que certains athées, comme Richard DAWKINS, ou agnostiques comme feu Henri LABORIT, au risque de paraître intolérants, perçoivent l’éducation religieuse, bien qu’a priori sincère et de bonne foi, comme une malhonnêteté intellectuelle et morale ?

Sans se départir de sa neutralité, l’école ne devrait-elle donc pas compenser cette influence unilatérale et exclusive de la famille et celle du communautarisme religieux, ce qui réduirait les inégalités socio-culturelles ?

Ne faudrait-il pas dès lors, organiser un véritable débat national, tant en France qu’en Belgique, et oser repenser, dans l’intérêt supérieur de l’enfant, certaines notions fondamentales telles que la neutralité de l’Etat, la liberté constitutionnelle d’enseignement, la transmission des valeurs, les limites de la tolérance vis-à-vis des prétentions des religions à imposer leur vérité, en particulier celles du christianisme évangélique, et de l’islamisme, sans oublier celle des sectes ?

L’enseignement confessionnel catholique, survivance obsolète et élitiste du Moyen Age, ne devrait-il pas faire place à une "école pluraliste", au frigo en Belgique depuis 34 ans, et à la fusion des réseaux officiel et privé, ne fût-ce que pour des raisons économiques ?

 Mais, face aux tentatives de réinvestissement des consciences, de re-confessionnalisation de l’espace public et de néo-cléricalisme politique, prônés par Sarkozy, les associations laïques suffiront- elles à réagir efficacement ?

La laïcité, tant politique que philosophique, ne devrait-elle pas être plus combattante et plus fermement attachée à ses principes, plutôt que conciliante, frileuse, voire laxiste ?

Michel THYS, à Waterloo. [email protected]


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