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Découverte d’un mammifère carnivore de type inconnu à Bornéo

On a coutume de croire qu’en matière de découvertes de nouvelles espèces vivantes, seuls les océans ont à nous réserver quelques surprises extraordinaires, que ce soit par la taille ou par l’originalité.

Bien sûr, en milieu terrestre, on sait qu’il se découvre pratiquement tous les jours de nouvelles espèces peu spectaculaires d’insectes, araignées ou invertébrés de toutes sortes, ou encore de petites grenouilles arboricoles appartenant à des genres pléthoriques -ce qui ne les empêche pas d’être très intéressants, et dont on sait que de nombreux membres auront souvent disparu avant même leur reconnaissance officielle par la science -ce qui n’est pas une raison pour ne pas faire le maximum pour les préserver.

Ce que l’on sait moins, c’est qu’au cours des dernières années, avec la mise en coupe réglée des dernières étendues de forêt vierge de la planète, quelques mammifères inédits, de taille moyenne à grande, ont régulièrement été découverts, ce qui laisse hélas entrevoir que nombre d’entre eux disparaissent sans doute également sans même qu’on en soupçonne l’existence. Le plus souvent, les espèces nouvellement reconnues par la science appartiennent à des genres décrits depuis longtemps. Souvent même, la nouvelle espèce est une population déjà répertoriée d’une autre espèce, mais son caractère spécifique ne se révèle qu’après étude. Il en est ainsi de nombreuses espèces de primates, récemment dévoilées par l’étude de leur population, ou parfois par simple examen génomique, qui met en évidence des différences que ne reflétaient qu’imparfaitement un examen externe. Les primates sont le groupe animal (singes, lémuriens) auquel appartient l’homme, ce qui explique l’intérêt qu’il suscite dans ces cas-là. Parmi les récentes découvertes spectaculaires d’espèces de primates, citons le Mangabey de montagne, scientifiquement décrit en 2005, et déjà inscrit sur la liste des espèces menacées.

Cette fois-ci, nous pourrions bien nous trouver en face d’un genre totalement inédit. Un carnivore d’un type inconnu, y compris des autochtones, semble bel et bien avoir été découvert dans les forêts centrales de Bornéo (menacées par de gros projets de saccage pour exploitation intensive, comme de juste). Cet animal n’a jusqu’ici été piégé que par l’objectif automatique d’un appareil photo. La prochaine étape consiste à essayer d’en capturer un spécimen, vivant de préférence, pour déterminer ses liens de parenté. Car force est de reconnaître qu’il n’appartient à aucun genre connu dans la région, sauf à être un animal échappé de captivité, ce que les dépêches omettent de mentionner (sans doute en raison de la faible probabilité de cette éventualité).

Ces mêmes dépêches font état d’une vraisemblable appartenance à la famille des civettes (viverridés), auxquelles appartiennent les genettes de nos régions. Il existe de nombreux viverridés dans toute l’Asie, mais aucun n’arbore cet aspect de gros chat roux à longue queue révélé par les photographies de l’animal. Structurellement, l’animal qui me paraît lui être le plus ressemblant est le foussa (ou fossa) endémique de Madagascar, un autre membre de la famille des civettes, et occupant la niche écologique des félins dans cette île où ils sont absents. Mais Madagascar est trop éloignée géographiquement de Bornéo pour une parenté directe entre les deux animaux, qui pourraient avoir développé le même aspect indépendamment (on parle de parallélisme). En revanche, la région abrite un autre viverridé, bien connu celui-ci, le binturong. Très différent des autres civettes, le binturong évoque davantage un petit panda, auquel il n’est pas apparenté directement (ce dernier est plus proche des ours et des ratons-laveurs). Mais la grosse tête du binturong et son régime essentiellement végétarien (à l’instar des deux espèces de pandas) semblent l’écarter de la parentèle immédiate du nouveau carnivore roux.

On le voit, la quête d’espèces nouvelles (ou plutôt, d’espèces ignorées, comme les désignait le regretté Bernard Heuvelmans, le père de la cryptozoologie, disparu il y a quelques années) peut encore nous réserver quelques bonnes surprises, mais l’urgence des recherches est plus pressante que jamais, pour éviter que ne disparaissent de notre patrimoine biologique et culturel (même méconnu) des espèces au moins aussi essentielles pour nous que la mise au jour de vestiges archéologiques rares. Comme ces derniers, ces espèces animales sont des curiosités n’ayant aucune utilité économique ni valeur pécuniaire intrinsèque, mais leur disparition serait une perte culturelle incommensurable.


A propos du nouveau carnivore roux :

- Le Monde

- Panda.org

Quelques primates récemment découverts :
Mangabey de montagne (famille des macaques et cercopithèques)
http://www.wcs.org/353624/mangabeypressrelease
Deux callicèbes (famille des sapajous et capucins)
http://news.nationalgeographic.com/news/2002/06/0624_020624_TVprimate.html
Nouveau microcèbe ou lémur-souris (famille des makis et autres lémurs)
http://news.nationalgeographic.com/news/2005/08/0809_050809_lemur_photo.html


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2 réactions à cet article    


  • Luc Luc 8 décembre 2005 19:42

    L’animal inconnu serait en fait un Diplogale hosei, dont on pensait que c’était une espèce éteint depuis 1955.

    pour en savoir plus :
    1. New Animal Discovered in Borneo
    2. More on Borneo’s New Animal


    • Thucydide Thucydide 9 décembre 2005 10:47

      En effet, je n’avais jamais eu connaissance de cette espèce particulière de civette palmiste, et c’est l’hypothèse la plus vraisemblable. A noter que Bornéo abrite d’autres civettes palmistes, en particulier le musang, mais toutes ont en principe une robe ou la face striée. Le site ci-dessous donne plus d’informations sur la civette palmiste de Hose : http://www.lioncrusher.com//animal.asp?animal=100

      Il s’agit d’un animal connu par seulement une quinzaine de spécimens naturalisés, et supposé éteint depuis 1955. Petite déception, mais pas tant que ça, d’autant que cet animal est apparemment le seul du genre Diplogale. Cette redécouverte est à comparer avec celle du pic à bec d’ivoire nord-américain, supposé disparu lui aussi depuis les années 50, au grand désespoir des naturalistes américains (il est l’un des plus beaux et plus grands pics du monde). Il a été redécouvert récemment (2004) dans quelques régions reculées de son habitat. http://www.sciencemag.org/cgi/content/abstract/1114103

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