La saison des Palmes et des trophées
Loin de nos prix d'antan.
L'année civile n'a pas la côte dès qu'il s'agit de mettre sur un piédestal les bons élèves du monde médiatique, ceux-là même qui n'ont pas forcément brillé sur les bancs de l'école. C'est à l'approche des grandes vacances, qui demeurent le véritable calendrier qui scandent nos vies que l'actualité avant de prendre ses quartiers d'été, déroule son ennui en distribuant des récompenses.
Ce serait une forme de session de rattrapage que confirmeront sans nul doute les prochains podiums estivaux. Il convient de mettre en avant ceux qui ont brillé dans des domaines qui sont exposés au feu des projecteurs. Palmes et trophées se multiplient pour honorer le gratin de cette coterie des individus à l'abri du besoin lors de cérémonies durant lesquelles seules les paillettes brillent de mille feux.
C'est l'occasion de l'exposition de tenues saillantes, extravagantes, mirobolantes mises en valeur par un tapis forcément rouge puisqu'il convient dans ce petit monde des élites diverses et avariées de fouler au pied cette couleur. Désormais, au-delà même du palmarès qui peut intéresser quelques spécialistes du domaine ou de fervents supporters, la belle cérémonie donne lieu à une diffusion tandis que même l'arrivée des nominées mobilise les caméras et les micros.
La poudre de perlimpinpin élevée au rang de moment incontournable des microcosmes auto-célébrés. Le fictif se dispute au factice, le vide sidérant des commentaires aux réponses des potiches mises à l'honneur. Nous avons la possibilité d'assister à l'effondrement des valeurs du mérite, du travail et de l'intelligence au profit d'un monde gouverné par le fric.
Tout ceci ne serait qu'une aimable plaisanterie s'il existait encore un contre-point à cette exposition de pingouins endimanchés. Mais il y a bien longtemps que l'on ne remet plus les prix dans les écoles, qu'on n'honore plus la réussite scolaire, le travail, les efforts, le mérite. Pour avoir droit à une breloque, il faut seulement disposer d'un corps souvent dépourvu de tête. L'occiput détrôné par l’uppercut, le bon en thème par le roi du coup de boule, la bosse des maths doit s'incliner devant le tacle glissé, le petit génie est lui-même mis au banc pour faire place au roi des chandelles.
Le monde a changé et l'école se place définitivement au dernier rang des préoccupations d'une société vouée aux spectacles affligeants qui proposent les tenants de la distraction permanentes. Tout doit faire spectacle y compris la politique. Tout est objet de représentation : de la tenue à la manière de briser les codes sociaux, d'insulter les bonnes manières, de se vautrer dans la vulgarité et la grossièreté.
Le chemin de croix de la flamme olympique étant à cet égard le parfait exemple de la recherche désormais de la marginalité, de la provocation, du refus du cadre et des principes moraux. Alors les remises de palmes et trophées vont dans ce sens tandis qu’il n’est nullement question d'offrir des livres aux gamins à la fin de leur année scolaire. Il est préférable de mettre 50 000 euros pour être sur le parcours olympique que pour enrichir l'esprit des enfants du pays.
Ce constat ne sert à rien du reste puisque tout est joué et que dans tous les domaines on privilégie l'apparence au message, la forme au fond, le bruit au propos, l'emballage à la pensée. Le domaine culturel est le premier touché puisque les spectacles prisés et récompensés sont ceux qui n'apportent rien à la condition humaine si ce n'est d'impressionner par des prouesses et du clinquant.
La décadence est en action, les pitres sont honorés, les bons élèves oubliés. Il vaut mieux taper dans un ballon que de bien travailler à l'école. Mbappé est le nouveau penseur de l'époque. Quant à la culture, elle a compris que le modèle dominant est celui du sport. Seules les performances sont mises en avant qu'importe si nulle pensée ne vient enrichir un humanisme en décrépitude. Le paraître plutôt que l'être tandis que l'avoir supplante le vouloir changer le monde !
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