Elle est poubelle la vie ?!
L’organisation de notre société et la crise actuelle pousse à tous les extrêmes, y compris d’aller chercher dans les poubelles des grandes surfaces des produits encore consommables, et gratuits…mais la police veille.
Le gaspillage organisé…pourrait être le symbole, voire le fer de lance, de notre société de consommation.
On sait aujourd’hui que pour tout ce qui concerne la production industrielle, l’obsolescence programmée est l’arme fatale utilisée par les entreprises pour obliger le consommateur à mettre au rebut une machine, alors qu’elle pourrait encore fonctionner de nombreuses années, grâce parfois à une puce implantée dans celle-ci, et qui la met en panne. vidéo
C’est entre autres le cas des imprimantes qui nous laissent tomber lorsque le nombre de copies atteint un certain seuil. lien
Quelques consommateurs astucieux parviennent à enlever la puce fautive, et l’imprimante repart « comme en 40 »… mais pour tous les autres appareils, machines à laver, frigos, ordinateurs, etc., la parade est plus complexe à trouver.
Heureusement, il arrive que nos élus prennent des décisions courageuses, et citoyennes, puisque l’obsolescence programmée est désormais un délit qui pourra être sanctionnée par une peine de 2 ans de prison, assortie de 300 000 euros d’amende. lien
Mais le gaspillage ne touche pas que l’industrie, il concerne aussi d’autres secteurs de la consommation, et notamment les fruits et les légumes, pour lesquels on peut être logiquement scandalisé par le gaspillage dont ils sont l’objet.
D’abord à la production : les cultivateurs sélectionnent une partie de leurs fruits et légumes, sachant que ceux dont l’aspect ne convient pas à leurs acheteurs, ils évitent de proposer à la vente des fruits et des légumes mal calibrés…résultat : le tiers de la production part directement à la poubelle.
Ça représente par an jusqu’à 6 millions de tonnes de nourriture, et jusqu’à 100 kilos d’aliments par personne. lien
De plus, cette tendance au gaspillage est à la hausse, et d’après un rapport publié le 26 février 2015 par le WRAP pour la commission Calderon, il pourrait s’accroitre de 50% d’ici 2030 en raison de la consommation croissante des classes moyennes dans les pays en développement.
De plus, ce gaspillage à des conséquences sur le changement climatique, puisque, selon un rapport de la FAO de 2013, ce tiers de la production mondiale qui part directement à la poubelle correspond à 7% des émissions annuelles de gaz à effet de serre.
Au-delà de ces conséquences, il y en a aussi pour notre porte-monnaie : le rapport du WRAP estime ce gaspillage à plus de 350 milliards. lien
Heureusement, la situation est en train d’évoluer en France, et quelques grandes surfaces ont décidé de lancer une opération « fruits et légumes moches », vendus moins chers que les autres, (entre 20 et 30% moins cher) et tout aussi consommables. lien
L’opération a démarré au printemps 2014, elle a du succès, ce qui a poussé les producteurs à lancer une autre initiative : voici venir les fruits et légumes « gueules cassées », qui consiste à proposer aux consommateurs des fruits et des légumes ayant des formes bizarres. lien
Pourtant un autre gaspillage perdure pour les grandes surfaces : pour être attractif, les rayons doivent être bien remplis, et fatalement, il y a des pertes, puisqu’une partie non négligeable se retrouve dans les poubelles de ces supermarchés.
Comme chacun sait, les produits ont une DLUO (date limite d’utilisation optimale), et passée la date, les produits doivent être jetés, ce qui représente tout de même 200 tonnes de déchets alimentaires.
Dans cette courte vidéo, on découvre un homme payé pour détruire 100 kg de fruits et légume par jour.
Ajoutons pour la bonne bouche tous ces arbres fruitiers qui couvrent nos campagnes, et dont une bonne partie des fruits de ceux-ci sont délaissés.
Il y en a beaucoup plus que l’on ne puisse imaginer, à tel point que des internautes astucieux ont décidé de les signaler sur cette carte
Pourtant la loi ne prévoit pas qu’ils puissent être ramassés, car si un verger, même ouvert, est manifestement abandonné, il n’est pas légal de ramasser des fruits, même ceux qui sont tombés au pied de l’arbre. lien
Mais revenons aux grandes surfaces…
La situation semble émouvoir nos députés, puisque 63 d’entre eux ont déposé une proposition de loi pour obliger les supermarchés à donner leurs invendus.
Déjà, le 17 février, les sénateurs avaient adopté un amendement visant à supprimer cette DLUO, celle-ci étant souvent source de confusion pour le consommateur qui la confond avec la DLC (date limite de consommation).
Dernier gaspillage et non des moindres, celui du consommateur, qui a souvent les yeux plus gros que le ventre, et dont une partie de ce qu’il a acheté est finalement jeté : ça représente près de 30 kg par an, soit l’équivalent de 400 euros pour une famille de 4 personnes. lien
Si on fait le bilan entre les fruits et légumes que les producteurs rejettent, ceux qui sont détruits pour cause de DLUO, et ceux que les consommateurs jettent eux même, on découvre l’effarante quantité de ce gaspillage qui se chiffre en centaines de tonnes.
Et puis, il y a la restauration rapide, ou l’on sait que le 1/3 est gaspillé, et on peut découvrir quelques témoignages sur ce lien.
On trouve aussi les mêmes pratiques dans les cantines, et autres restaurants scolaires.
Une autre initiative a été prise suite à un accord entre le gouvernement et les restaurateurs, consistant à proposer des sacs aux clients afin qu’ils puissent emmener leurs restes…initiative restée un peu inaperçue.
Pas étonnant des lors que des citoyens dont les bourses sont de plus en plus vides, tentent de remplir leurs estomacs, s’organisent afin de récupérer dans les poubelles des grandes surfaces les produits qui y sont jetés.
Un élu, J.P. Martin, maire de Nogent-sur-Marne avait même pris un arrêté, dénommé « anti-glanage », interdisant de fouiller dans les poubelles, ce qui a ému la LDH (Ligue des Droits de l’Homme).
L’action menée en justice par la LDH permis heureusement l’annulation de cet arrêté municipal. lien
Concernant les grandes surfaces, certains patrons de supermarchés, sans état d’âme, les aspergent de détergents afin d’empêcher la récupération…et lorsque l’on leur demande si ça ne représente pas un danger, le président de la FECD (fédération des entreprises du commerce et de la distribution) répond « les denrées sorties du circuit n’entraînent pas la responsabilité du magasin »…lien
Ça n’empêche pas pour autant quelques citoyens peu argentés d’aller tenter de récupérer ce qui a été jeté par les supermarchés.
C’est ce que font par exemples les membres du collectif « freegans » de Montpellier qui sont aujourd’hui poursuivis pour être allé faire les poubelles d’une grande surface.
Le freedganisme est un mode de vie alternatif qui consiste à se nourrir gratuitement en récupérant les produits jetés, le mot freegan étant une contraction de « free » (gratuit) et vegan (végétalien)…et faire les poubelles devient un acte militant. lien
Leur site est sur ce lien.
Ils risquent en théorie jusqu’à 7 ans d’emprisonnement, assortis d’une amende de 150 000 euros, leur action étant considérée par la justice comme un vol. lien
Étonnant quand l’on sait que contrairement à une rumeur répandue sur les réseaux sociaux, il n’existe pas de lois qui empêchent de fouiller les poubelles. lien
En effet, les déchets sont considérés dans le droit civil français comme « des choses abandonnées par leur propriétaire » et donc libres d’accès, comme on peut le découvrir sur ce lien, suite à une question posée à l’assemblée nationale.
La décision de la justice se base sur le fait que les freegans en question fouillaient des poubelles qui se trouvaient encore dans la cour intérieure du supermarché…
Du coup une pétition lancée par un élu de Courbevoie, Arash Derambars, soutenu par le réalisateur Mathieu Kassovitz, vise à récolter 200 000 signatures, ce qu’elle est sur le point d’atteindre, pétition intitulée « dites stop au gâchis alimentaire » qui veut obliger les supermarchés à donner chaque soir leurs invendus à des associations d’aide aux démunis, pétition qui sera présentée à l’assemblée nationale. lien
Elle concerne toute les grandes surfaces de plus de 1000 m² et on peut la signer sur ce lien
Alors bien sur, le gouvernement à lancé plusieurs campagnes : l’anti gaspi en 2014, et quelques autres auparavant, mais les effets semblent se faire attendre. lien
Pourtant les communicants élyséens ne manquent pas d’imagination, comme on peut le découvrir sur les slogans proposés : « my poubelle is rich »…ou « ce soir je serais la poubelle pour aller danser »…faut-il en rire ? En pleurer ?...
Comme dit mon vieil ami africain : « avec une seule fève, on ne peut pas préparer la soupe ».
L’image illustrant l’article vient de nabolo.com
Merci aux internautes de leur aide précieuse
Olivier Cabanel
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