Compassion sélective ?
Au regard des émeutes de Clichy-sous-Bois et de la mort de deux jeunes adolescents, le traitement médiatique de l’agression mortelle d’un quinquagénaire à Epinay-sur-Seine fait pâle figure.
Il serait macabre d’opposer des victimes entre elles, et ces deux tragédies restent incommensurables, au-delà de la même absurdité et de l’incompréhension qu’elles témoignent.
Certes, l’agression mortelle de Jean-Claude X n’a pas donné lieu à une marche silencieuse, ni une audience de sa femme et sa fille par le ministre de l’Intérieur. La victime n’avait pas eu le bon goût de survivre à ses blessures et de pouvoir, ainsi, être exposée sur les écrans de télévision, auquel cas, soyons assurés que Nicolas Sarkozy se serait emparé de l’affaire, comme la droite le fit lors de l’élection présidentielle de 2002, avec le fameux « papy Voise. »
Ce qui a marqué les esprits, à Clichy-sous-Bois, c’est le lien de causalité apparent entre les propos ségrégationnistes inacceptables du ministre d’État, la tragédie qui s’en suivit, et les émeutes qui la prolongèrent jusqu’au tir d’une grenade lacrymogène dans une mosquée, au moment de la prière, dont il est établi, aujourd’hui, qu’il provenait bien des forces de l’ordre. A cet égard, il faut rappeler que les bavures policières ont augmenté de plus de 18 % en 2004. Il serait vain de n’y voir qu’une simple conséquence du hasard.
L’exploitation politique, qui en a été le prolongement, par des affrontements entre le Premier ministre et le numéro deux du gouvernement, ce dernier et Azouz Begag, ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances, en fait une affaire d’État révélatrice du malaise sociétal dans lequel nous sommes englués.
Sur le drame d’Epinay-sur-Seine, nous connaissons peu de choses. Crime gratuit, tentative du vol d’un appareil numérique qui a mal tourné ? L’enquête devra l’établir. La justice compte, pour identifier les auteurs, sur la vidéosurveillance installée sur les lieux, dont il faut remarquer qu’elle s’est montrée impuissante à prévenir la tragédie ou à susciter une intervention immédiate de la police.
Je me méfie de la compassion qui sert trop de refuge à un refus de s’engager. L’important ne réside pas dans l’affliction que nous procure ces tragédies, mais dans les actes que nous sommes capables d’accomplir afin qu’elles ne se reproduisent plus.
Il devient urgent de changer le paradigme de nos sociétés contemporaines.
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