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Banqueroute verte

Il y a eu beaucoup de mauvaises nouvelles pour les partis verts européens ces derniers temps et il faut dire que ces difficultés ne sont pas vraiment imméritée. En Allemagne, le Parti Vert local avait demandé à Franz Walter et Stephan Klecha, de l'Institut de Göttingen pour la démocratie de fouiller les archives du parti pour contrer des rumeurs selon lesquelles il avait défendu la pédophilie pendant les années quatre-vingt. Malheureusement - pour les Verts - ils ont prouvé ces accusations « étaient très fondées et que la position des Verts sur la question était alors une approximation très convaincante de celle de la North-American Man-Boy Love Associaion.

Cela peut avoir eu un impact sur le résultat, désastreux pour les Verts, des élections qui ont suivi.

En France, les Verts font partie du gouvernement. Il y a quelques semaines, leur (pas si ) chef (que cela) Pascal Durand, a « découvert » que ledit gouvernement n'avait pas l'intention de faire quoi que ce soit en vue de la transition énergétique et menacé d'une démission collective si des mesures n'étaient prises. Les ministres Verts ont jeté un coup d'œil sur leur fihe de paie, ont décidé qu'ils en voulaient une autre, et que si quelqu’un devait partir c’était Pascal Durand.

Inutile de dire que cela a un peu terni leur réputation déjà plus que douteuse.

Bien sûr, les Verts ne sont pas les seuls à avoir défendu des causes douteuses à l'époque. En 1977, un certain nombre d' intellectuels français, dont Jean-Paul Sartre, Bernard Kouchner et Jack Lang, avaient signé une pétition en faveur de trois pédophiles, ce qui n'a pas empêché deux d'entre eux de devenir ministres dans des gouvernements fort peu verts. Quant à utiliser son statut d’allié mineur du parti dominant pour obtenir des postes auxquels on refusera ensuite de renoncer même si cela implique de renier ses convictions... c'est un sport national en France.

Pourtant, les Verts, du moins en France, incarnent ces défauts bien mieux que les autres partis et sont souvent fustigé pour cela, même dans le très cynique microcosme politique.

Ceci est partiellement dû au fait qu’une grande partie de leurs partisans viennent des classes moyennes-supérieures urbaines, qui n'ont aucun intérêt à changer un ordre social dont ils bénéficient grandement, mais veut néanmoins de la bonne conscience que procure le fait d’être du côté de progrés. Il n’y a pas que cela, cependant .

Comme le dit Franz Walter :La protection de la nature et le développement durable ne constituent pas un terreau propice à la pédophilie et à l'abus d'enfants. Mais les Verts ont un deuxième créneau qui est curieusement peu compatible avec le premier : une sorte de libéralisme fondamental associé à un fort hédonisme individualiste. Dans cet environnement, ont émergé dans les années 1970, avant la fondation des Verts, des revendications pour la dépénalisation des délits sexuels et pour une tolérance à l'égard de la sexualité entre adultes et enfants. Au début des années 1980, une partie de ce libéralisme radical s'est retrouvée chez les Verts".  
La protection de la nature n'était pas, au début, une cause progressiste. Le projet des Lumières était d'utiliser la raison, et seulement la raison, de pour faire face aux problèmes du monde. Cela signifiait se débarrasser de l'influence des églises, mais aussi établir la domination de l'homme sur la nature de manière à créer, dans ce monde, le paradis que les religions promettaient pour le prochain. 
 
Notez que n’impliquait pas nécessairement la démocratie. La liberté d'expression et de la raison peuvent, s'épanouir dans un contexte non démocratique, comme la Prusse de Frédéric II ou l'Autriche de Joseph II et la plupart des philosophes éclairés de l'époque niaient toute légitimité à l' opinion populaire, opposant , comme d'Alembert, "le public vraiment éclairé"l à "la multitude aveugle et bruyante" 
 
La protection de la nature ne vient pas non plus des premiers adversaires de la philosophie des Lumières : les contre-révolutionnaires tels que Joseph de Maistre. Ceux-ci rejetaient le règne de la raison parce qu'il menaçait l'ordre social (traditionnel) et sappait la domination de l'Église. L'autre branche de contre-Lumières, le romantisme, était totalement différent. Il était souvent très critique vis-à-vis de l'ancien ordre social et de la religion établie. Des romantiques ont dirigé les révolutions et les révoltes nationales du dix-neuvième siècle, opposant à la légitimité dynastique non pas la raison, mais les peuples. Le romantisme ne s'oppose pas la raison elle-même , mais à ses prétentions à la suprématie. Les romantiques valorisaient l'émotionnel et l’atavique et ils ne pouvaient certainement pas les trouver dans l'atmosphère raréfiée des salons de l' élite éclairée. De là vient leur amour pour la nature, ainsi que pour les traditions folkloriques et les contes médiévaux.
 
 
 
Cela a donné le nationalisme ethnique - qui, au début n’était était l'idée selon laquelle les gens du commun, et non une pas une élite éclairée, devait diriger - , mais également un profond respect pour la nature. On peut trouver cette idéologie parmi les Wandervögel , une organisation de jeunesse allemande prônant le retour à la terre mettant l'accent sur la liberté, la responsabilité individuelle et l'esprit d'aventure, ou dans le conservatisme agraire de Tolkien, dont les héros, rappelez-vous, ne sont pas des princes, mais des paysans fumeurs de pipe.

Inutile de dire que cette idéologie était profondément antilibérale et pas très friande de la mythologie du progrès. Le romantisme allemand, cependant, a pris un mauvais tournant au cours du XIXe siècle, quand le rêve de retour à la nature et autosuffisance s'est mélangé à l'ésotérisme autrichien et au mysticisme racial. Le résultat final a été le cancer idéologique nazi et une guerre apocalyptique qui a enseveli les préoccupations écologiques sous les décombres et assuré que quand ils referaient, ce serait à gauche. Le problème, c'est que cela s'est passé à la fin des années soixante, juste au moment où la gauche, jusque là dominée par le socialisme, se reconfigurait. Tandis que les classes moyennes adoptaient le radicalisme de gauche, l’accent passa des préoccupations de la classe ouvrière à l'hédonisme et l'individualisme. Ce n'est pas par hasard que, en France, les événements de mai 1968 ont commencé par un conflit sur le droit pour les garçons de visiter le dortoir des filles.

Ces idées sont venues, non pas de socialisme, qui était très ambivalent vis-à-vis de l'individualisme, mais du libéralisme classique, c'est à dire de la philosophie des Lumières, dont elles continuent les ambitions et illusions messianiques.

La révolte des années soixantes contre l'ordre rigide d'après-guerre a été salutaire à bien des égards. De nombreuses injustices devaient être réparées, notamment en faveur des femmes, des homosexuels et des minorités raciales. Les considérer comme des êtres humains a certainement été un grand progrès sur la voie d’une société décente. Le manque de lien organique avec le mouvement ouvrier et la prévalence des valeurs individualistes de la classe moyenne parmi les militants a cependant assuré à ce que les organisations politiques nés de la Nouvelle Gauche seraient libérales. 
 
Les Verts en font partie et c'est là que réside le problème. Comme l'a dit Franz Walter leurs deux moteurs idéologiques ne sont pas compatibles. Vous ne pouvez pas à la fois défendre l'individualisme et de la communauté, l'hédonisme et la sobriété, le progrès et le développement durable. Tôt ou tard , comme avec les partis social -démocrates, l'un des deux programmes seront mis à l'arrière - plan ou remplacés par de bruyants symboles creux. Comme limiter les effets du pic énergétique implique de prendre des mesures très impopulaires, nous pouvons parier que les questions sociétales, sur lequel un accord peut facilement être trouvé avec les partis sociaux-démocrates, viendront sur le devant de la scène, ainsi que ceux que Paul Kingsnorth appel les néo- environnementalistes. C'est déjà le cas dans une certaine mesure. Les Verts français ont été beaucoup plus bruyants sur l'affaire Leonarda que sur la prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires du pays.

Pour les partis liés à la classe moyenne-supérieure " bobo " c'est le chemin de la moindre résistance, et c'est pourquoi il devient de plus en plus dominant, reléguant la vision romantique et la notion de limites à la marge - et parfois, il faut être dit, les forçant à fréquenter des gens fort peu recommandables.

Cela signifie que les partis verts deviendront de moins en moins pertinents et de moins en moins susceptibles d'apporter une réponse constructive à la crise écologique. En fait, ils vont probablement retarder l'apparition, au niveau politique, d'une vraie réponse politique pic énergétique, libre de la mythologie du progrès, de l'illusion libérale, mais aussi à partir des restes cancéreux de la perversion völkish.

Pourtant, c'est
à cela que nous devons travailler sur si nous voulons faire face au déclin programmé de notre civilisation, sans tomber dans les mêmes pièges cancéreux que le romantisme allemand.
 
 
 
 
 
 
 

http://vudesruines.blogspot.fr/2013/11/banqueroute-verte.html

 


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4 réactions à cet article    


  • Nicolas_M bibou1324 7 novembre 2013 15:08

    Ainsi, vous faites parti des gens qui jugent les politiques sur leur vie privée, plutôt que sur leurs actions en tant que politique. Eh bien en quelques mots, vous êtes un crétin.



    Sans compter que, parce qu’UN vert a eu des déviances sur sa vie privée (qui ne regarde en rien ses décisions politiques), vous en déduisez que l’ensemble du mouvement politique est pourri ? Le mot « stigmatisation » vous dit-il quelque chose ?

    Quand à Franz Walter, un rapide recherche sur google montre qu’il n’existe nulle part, sauf sur l’article de Slates que vous avez repris. Un politologue qui n’a que 3 résultats sur le net (dont AV), n’a aucune chance de me convaincre. C’est soit un témoignage inventé, soit un pseudonyme, soit un pauvre étudiant qui a voulu se faire mousser. En tout cas personne de reconnu publiquement.

    • Damien Perrotin Damien Perrotin 7 novembre 2013 15:27

      Vous savez, les allemands parlent allemand (si, si), d’où la nécéssité de chercher des références dans cette langue (https://de.wikipedia.org/wiki/Franz_Walter_%28Politikwissenschaftler%29).

      Par ailleurs, Walter ne parle pas des déviances de tel ou tel mais du soutien politique à la légalisation d’une pratique, et surtout des raisons idéologiques de ce soutien, ce qui est un tantinet différent. Ces raisons sont les mêmes que celles qui les ont poussés à soutenir Leonarda : un libéralisme foncier, d’ailleurs peu compatible avec la protection de la nature. Je vous renvoie pour les détails à Michéa, Lasch, etc...


    • LE CHAT LE CHAT 7 novembre 2013 15:15

      que les verts allemands se cassent le portrait aussi bien que les notres n’a rien d’étonnant !
      est ce Cohn Bendit qui porte la poisse ???
      les allemand de toutes façons doivent aussi s’être aperçu que ces pastèques sont des libéraux libertaires qui s’occupent de tout sauf d’écologie et de leur coller un max de fiscalité ...


      • bert bert 7 novembre 2013 22:46

        le fond vert c’est très bon pour poser le décor

        très bon article pour écouter du RAMmstein smiley

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