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Accueil du site > Actualités > Médias > Le docteur Romano et les hélicoptères

Le docteur Romano et les hélicoptères

Une narration de malades.

Et voilà que maintenant, on commence à me parler de la variole du singe. Avant ça, c’était l’Ukraine, qui avait la dure tâche de succéder au Covid. L’imagination des médias pour raconter des histoires éloignées du quotidien des gens est sans limite. Et dire que cet après-midi, je suis sorti acheter des tomates !

Le stade de la question de la confiance dans les médias est dépassé depuis longtemps. Celle qui se pose maintenant, c’est celle de leur compétence. Mais qu’est-ce qu’ils racontent ? Ce ne sont plus des nouvelles quotidiennes, c’est une scénarisation planifiée du pire chaque jour qui se déploie. Ils seraient bien meilleurs pour une série ou un film que pour transmettre des informations.

Le rapport avec le docteur Romano du titre ? Évident !

D’abord, un petit rappel. Le docteur Romano, c’était ce médecin cynique, sorte de House avant l’heure, mais unidimensionnel et juste méchant, qui pourrissait la vie de ses collègues à l’hôpital de Cook County dans la série « Urgences », série qui connut un grand succès et dura de 1994 à 2009 à la télévision. Sur les 331 épisodes de la série, le docteur Romano apparaît dans 107. Interprété par Paul McCrane, qui jouait déjà un voyou dans le « Robocop » d’origine, voyou achevant son périple trempé d’acide et fondant littéralement sur le pavé, le docteur Romano a connu d’énormes mésaventures avec les hélicoptères.

Dans le premier épisode de la saison neuf, les docteurs Romano, Kovac et Lewis évacuent l'hôpital en raison d'une épidémie de variole du singe. Alors qu'ils sont sur le toit pour charger un patient sur un hélicoptère en attente, le vent fait tomber la carte du brancard ; lorsque Romano se déplace pour la récupérer, le rotor de l'hélicoptère lui coupe le bras. Dans le huitième épisode de la saison dix, alors que c’est, encore et toujours, l’agitation à l’hôpital, un hélicoptère fait une mauvaise manœuvre sur le toit et va s’écraser directement au sol… sur le docteur Romano, qui trouve ainsi la mort dans cet horrible quoique grotesque accident. Moralité de tout ça, les hélicoptères sont plus dangereux que la variole du singe.

Entre ces deux épisodes, il est peu de dire que le docteur Romano n’a rien appris malgré la perte de son bras. Il a continué à semer la discorde, et à licencier les infirmières les plus anciennes du service des urgences.

À ce point-là du texte, je ne pense pas qu’il soit nécessaire de surligner l’évidence. Je vais le faire quand même, parce que ça m’amuse de filer des métaphores.

Le docteur Romano, c’est l’État qui assèche les hôpitaux de leurs personnels malgré qu’il se soit déjà coupé le bras. L’histoire du docteur Romano, elle aurait pu être écrite par nos médias d’aujourd’hui, désireux de faire des exemples sur le bien et le mal, de dire « Buitoni pas bien » d’un côté et « bravo Pfizer » de l’autre. Comme le dit souvent Superman, l’avion est le moyen de transport le plus sûr du monde, mais il suffit de monter un accident en épingle pour déclencher une paranoïa collective. Pendant que le docteur Romano périt à cause d’un évènement hautement imprévisible et excessivement rare, les petites mains agissent en coulisses pour combattre les causes les plus fréquentes de décès – la pauvreté, le désespoir, le cancer.

C’est comme si chaque jour qui passait, il nous tombait des hélicoptères sur la tête. Ce qui était marrant, absurde et exceptionnel dans une série télévisée commence à devenir le procédé habituel lorsqu’on regarde une chaîne d’information en continu ou qu’on lit la presse. L’accumulation depuis deux ans est tellement éloignée du quotidien dans toute son inertie et sa beauté qu’il faut prendre également le parti d’en rire.

Se moquer continuellement des annonces toujours plus extravagantes est le seul moyen de lutter contre cette maladie terrifiante qui s’est emparée des organes de relais de l’information et plus globalement du corps d’État qui impose les lignes directrices de la communication, dignes d’une série Z à la Roger Corman. Elle est terrifiante car elle est hautement contagieuse et qu’elle s’installe durablement chez les gens qui l’attrapent. À cause d’elle, certains se font vacciner quatre fois par an contre le rhume et portent un masque à la plage en plein été. Et ces gens-là, en vrai, ils n’aiment pas qu’on se moque d’eux. Ils ont voté dernièrement pour nous le faire comprendre. Ils se sentent à l’évidence concernés par toutes ces histoires à dormir debout.

Profitons donc tant que le prix du pop-corn n’augmente pas trop, nous allons au-devant d’une parade extraordinaire. Le spectacle est gratuit, pour l’instant. La méchanceté se paiera. Pour satisfaire au sacrifice, dans la vraie vie, on commence toujours par les innocents. Ils s’en moquaient, ils ne savaient pas… Ils regardaient tomber la monnaie-hélicoptère...


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20 réactions à cet article    


  • Gégène Gégène 24 mai 2022 09:39

    sinon, des nouvelles de julienne à singe ?


    • Francis, agnotologue Francis, agnotologue 24 mai 2022 09:49

      ’’Mais qu’est-ce qu’ils racontent ? Ce ne sont plus des nouvelles quotidiennes, c’est une scénarisation planifiée du pire chaque jour qui se déploie. Ils seraient bien meilleurs pour une série ou un film que pour transmettre des informations.... C’est comme si chaque jour qui passait, il nous tombait des hélicoptères sur la tête.’’

      > Oui, c’est exactement ça.

       

      « Ce n’est plus un gouvernement : c’est une fanfare à fake-news » Frédéric Lordon

      https://blog.mondediplo.net/2018-01-08-Macron-decodeur-en-chef

       

       

      ps. C’est toujours un plaisir de vous lire.


      • Nicolas Cavaliere Nicolas Cavaliere 24 mai 2022 17:56

        @Francis, agnotologue

        Merci.

        L’article est intéressant. On parle souvent de décodage comme si le réel était codé. Et il l’est, assurément, puisqu’un mec qui meurt d’un hélicoptère qui lui tombe dessus peut voir son décès être étiqueté « Covid » si jamais il était testé positif post-mortem. Je renonce au décryptage. Et je choisis mon imagination.


      • Nicolas Cavaliere Nicolas Cavaliere 24 mai 2022 18:52

        Ah, et parce que c’est essentiel à l’article, un petit moment de détente :

        https://www.youtube.com/watch?v=xE0V-TmqTP8


      • charclot charclot 25 mai 2022 13:12

        @Nicolas Cavaliere
        en capillotractant un peu les aventures du romano fafard


      • chantecler chantecler 24 mai 2022 09:49

        Tout ça pour quelques pustules bien innocentes que nos sociétés savent si bien produire  !

        Faut encourager Big Pharma cher monsieur et soigner ses actionnaires !

        Lesquels arroseront nos politiciens .

        C’est la base de la théorie du ruissellement ....


        • Clark Kent Séraphin Lampion 24 mai 2022 10:10

          Excellent, merci.

          La différence entre une série télévisée et la vraie vie,, c’est que dans le premier cas (comme quand on lit une dystopie du genre 1984 ou Le Meilleur des Mondes), on se dit qu’on est bien content que la réalité ne soit pas comme ça, et les plus lucides espère que ce ne sera jamais les cas. Mais ça n’empêche pas de continuer à vaquer à ses occupations habituelles, allers au bistrot et au resto, au cinéma, et à courir le guilledou non masqué.

          Dans le deuxième cas, quand les horreurs de la fiction sont dépassées par la réalité, non seulement c’est pénible à supporter, mais en plus ça annihile les perspectives d’avenir et les convictions par rapport à l’idée de progrès de l’humanité quand on avait ces illusions utopiques. Et là, c’est déprimant.

          Ça rappelle le plan NExT chez France-Telecom (devenu Orange) entre 2006 et 2011, plan de « redressement » de l’entreprise qui visait au départ en trois ans de 22 000 des 120 000 salariés dans un contexte d’ouverture à la concurrence. On dirait que ce plan d’entreprise sert de modèle aux méthodes gouvernementales actuelles, en France et ailleurs.

          Il s’agissait d’un management violent consistant à dégrader les conditions de travail, afin de pousser psychologiquement une partie des employés au départ volontaire et réduire de cette façon les indemnités à payer.

          Les « managers » avaient pour objectif d’inciter des salariés à démissionner, d’en muter dans d’autres secteurs de la fonction publique ou de signer des congés de fin de carrière. Des stages apprenaient à ces managers des schémas sur les courbes du deuil qui définissaient six étapes par lesquelles passait tout salarié qui se voyait annoncer la suppression de son poste :

          • l’annonce de la mutation,
          • le refus de comprendre,
          • la résistance,
          • la décompression pouvant aller jusqu’à la dépression,
          • la résignation
          • l’intégration du salarié

          Ce harcèlement s’est très mal terminé par des suicides, et ces méthodes identifiées sont supposées interdites aujourd’hui. Il semble pourtant qu’elles aient fait des émules chez les technocrates de la « société civile ».


          • Francis, agnotologue Francis, agnotologue 24 mai 2022 11:06

            @Séraphin Lampion
             
             ’’Ça rappelle le plan NExT chez France-Telecom (devenu Orange) entre 2006 et 2011, plan de « redressement » de l’entreprise qui visait au départ en trois ans de 22 000 des 120 000 salariés dans un contexte d’ouverture à la concurrence. On dirait que ce plan d’entreprise sert de modèle aux méthodes gouvernementales actuelles, en France et ailleurs.’’
             >

            Thierry Breton, né le 15 janvier 1955

            « Vice-président de Bull (1996-1997), président-directeur général de Thomson (1997-2002) puis de France Télécom (2002-2005), ... En 2019, il est nommé commissaire européen, chargé du marché intérieur, de la politique industrielle, du tourisme, du numérique, de l’audiovisuel, de la défense et de l’espace »


          • Clark Kent Séraphin Lampion 24 mai 2022 11:57

            @Francis, agnoto logue

            les mêmes causes produisent les mêmes effets
            les mêmes agents produisent les mêmes résultats


          • Nicolas Cavaliere Nicolas Cavaliere 24 mai 2022 17:42

            @Séraphin Lampion

            Très intéressant, ce topo sur les managers. « Next », ça veut dire « suivant »...

            "Je jure sur la tête, de ma première vérole

            Que cette voix, depuis, je l’entends, tout le temps

            Au suivant, au suivant !"

            On est dirigés par des fous. La maladie mentale est aussi contagieuse que les autres. Va falloir pas mal de pluie pour nettoyer tout ça.


          • adeline 24 mai 2022 10:33

            J’ai cauchemardé ou quoi ? il a été dit plusieurs fois sur différents journaux que la transmission de cette variole se faisait par voix sexuelles ?


            • adeline 24 mai 2022 11:16

              @adeline
              par voie sexuelle pardon


            • Clark Kent Séraphin Lampion 24 mai 2022 12:01

              @adeline

              les lapsus sont toujours intéressants,
              vous pensiez sans doute aux voix des sirènes,
              comme Rachida Dati pensait à autre chose quand elle parlait de l’inflation


            • Guy Troisbord 24 mai 2022 16:28

              Merci à l’auteur, une nouvelle qui va l’amuser : les grecs ont confondu leur « premier cas de variole du singe » (la nouvelle maladie qui fait peur et qui va tuer tous les gens de la Terre et de l’univers) avec... la varicelle.

              « Tout n’est que songe et mensonge » en ce bas monde...


              • Nicolas Cavaliere Nicolas Cavaliere 24 mai 2022 17:51

                @GuyTroisbord

                @itzi bitsy

                Marrant, oui, tant qu’on n’y est pas confrontés.

                J’ai lu récemment un bouquin intitulé « L’Apocalypse joyeuse » de Jean-Baptiste Fressoz. Il y explique notamment comment les premiers tests pour les vaccins contre la variole ont été menés au 18ème siècle. Les mêmes problématiques d’extorsion du consentement étaient là. Sauf que le but à l’époque c’était de tester pour voir si ça marchait. Le bouquin explique comment les juridictions se sont enrichies de procédures diverses pour gérer les risques et les superstitions. Maintenant, on aurait la même histoire pour tester si des remèdes nouveaux marchent alors qu’on en a déjà des anciens qu’on refuse d’utiliser ? Que vont faire les gens de loi devant ça ?


              • Nicolas Cavaliere Nicolas Cavaliere 24 mai 2022 18:59

                @itzi bitsy

                Que faire face à ça, sinon diffuser le savoir et partager la mémoire ?


              • hello 24 mai 2022 19:34

                Bel article, bien écrit, et qui nous rappelle qu’un fond consistant s’accommode très bien d’un peu d’humour.

                J’aurais bien repris un paragraphe ou deux.


                • Nicolas Cavaliere Nicolas Cavaliere 24 mai 2022 20:17

                  @hello

                  Merci des compliments.

                  Si je devais rajouter une idée, ce serait que les procédés de narration qui visent à se débarrasser des personnages dans les fictions (genre Robert Downey Jr. dans « Ally McBeal » ou Sasha Mitchell dans « Notre Belle Famille ») sont représentatifs d’un changement dans la pensée intervenu il n’y a pas si longtemps. Autrefois, quand un acteur s’avérait dans l’incapacité de reprendre son rôle, il était remplacé par un autre comédien. Le spectacle continuait, et la narration aussi. Désormais, quand le comédien fait défaut, on supprime ce rôle, et généralement pour justifier de cette suppression on fait n’importe quoi (« Dallas » c’est un exemple incroyable !). Résultat, le spectacle continue et la narration en souffre. C’est comme si on refusait désormais de délier le fictionnel du réel. Les deux doivent communiquer coûte que coûte, jusqu’à former un multiverse... C’est flagrant dans le dernier « Spiderman » sorti au cinéma...


                • I.A. 24 mai 2022 19:41

                  Très bon et très drôle, merci !

                  Les journalistes se prennent pour des scénaristes, les politiques et les « Knock-triomphants » se prennent pour des producteurs tout-puissants, pendant que les plus cons se prennent au jeu...


                  • placide21 25 mai 2022 08:17

                    Les plus fragiles mentalement sont les plus atteints par cette maladie diffusée par nos maîtres via leurs médias ; j’ai pitié pour les pauvres bougres qui continuent de porter leur muselière dans la rue ou à vélo ect....même si je sais que la plupart n’hésiteront pas à m’enchaîner pour préserver leur pathologie.

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