L’Iran au fil des deux ans
L’année 2022 est passée et l’année 2023 a commencé, et l’Iran est témoin des plus longues protestations depuis la révolution de 1979. Bien que le rythme des protestations semble fluctuer de haut en bas, la colère du public reste inchangée, même si plus de trois mois se sont écoulés.
Cela s’explique par le fait que les causes profondes du mécontentement n’ont pas été abordées et que le régime poursuit ses mesures répressives dans l’espoir que cela finira par permettre de mieux contrôler la situation. Ce qui est certain, c’est que l’Iran ne reviendra pas à l’état qui existait avant l’assassinat de Mahsa Amini.
Lorsque le mur de la peur a été franchi, il y a eu des centaines de victimes, selon les rapports publiés, et de nombreuses personnalités influentes, notamment des athlètes, des artistes et des scientifiques, ont fui à l’étranger par crainte de la colère du régime qui s’ensuivrait. La stratégie du gouvernement iranien consistant à réprimer les manifestations par un usage excessif de la force a augmenté l’espace d’indignation.
Le dilemme actuel est que les dirigeants du régime, craignant de perdre le contrôle, ont eu recours à plus de violence que prévu. Tout cela a conduit à une spirale de colère sociale dont il est difficile de sortir et qui a amené le régime à une véritable crise existentielle.
Le régime a même commencé à se tourner vers des personnes qui s’étaient effacées ces dernières années, comme l’ancien président Mohammad Khatami et Fatemeh Rafsanjani, la fille de l’ancien président Hashemi Rafsanjani. Ces derniers ont commencé à appeler au changement « avant qu’il ne soit trop tard » pour donner l’impression que des réformes sont recherchées.
Cependant, toutes ces tentatives pour refroidir l’atmosphère et absorber la colère du public n’ont pas abouti. Néanmoins, le Guide suprême Ali Khamenei craint toujours de faire des concessions qui, selon lui, pourraient entraîner la chute du régime.
Les observateurs s’accordent à dire que les manifestations actuelles en Iran sont devenues un état de colère populaire chronique qui s’accumule plus vite que l’accumulation de combustible provenant des opérations d’enrichissement d’uranium du régime et qui pourrait à tout moment endommager définitivement les relations entre le régime en place et le peuple iranien.
Il est difficile de continuer à mener les affaires du pays dans cet état de colère et de déchaînement sans s’attaquer aux problèmes sous-jacents qui ont déclenché cette colère. Qu’il s’agisse des pratiques répressives internes ou de la détérioration de l’économie, elles jouent le rôle le plus important pour amener le peuple iranien dans un nouvel état de colère.
Aucun acteur ou athlète iranien connu vivant en Iran ou à l’étranger n’aurait qualifié le chef du régime, Ali Khamenei, de dictateur avant que les manifestations n’éclatent. Il existe également certains parallèles avec Mussolini, le général Franco, Staline ou d’autres figures autoritaires qui ont vécu dans différents pays de l’histoire.
Cependant, ces propos ont été repris sur les réseaux sociaux, contribuant à approfondir les clivages entre le peuple et le régime et encourageant les personnes en colère à rester sur leurs positions.
Il ne faut pas sous-estimer l’influence des icônes sociales sur l’attitude des Iraniens, en particulier des anciens joueurs de football comme Ali Karimi, qui est l’un des critiques les plus virulents du régime dans son pays et compte près de 15 millions de followers sur Instagram. La nouvelle génération d’Iraniens est également différente de ses prédécesseurs. Cependant, ce phénomène n’est pas propre à l’Iran.
En effet, les jeunes de tous les pays sont différents des générations qui les ont précédés, que ce soit au niveau de leurs ambitions ou de la façon dont ils réagissent et font face aux menaces liées à la sécurité.
Dans ce contexte, il convient de mentionner la joueuse d’échecs iranienne Sara Khadem, qui a participé à un tournoi sans hijab, posant un défi clair et remarquable aux autorités de son pays, qui l’ont rejetée et ont déclaré qu’elle ne représentait pas l’Iran.
Il est clair que les protestations en Iran à cette occasion sont une rébellion contre le régime, ses symboles et son modèle de gouvernement, et non contre des individus spécifiques. Ce rejet a existé par le passé, mais il était limité à l’élite et à une petite partie du peuple iranien.
C’est la plus grande perte pour le régime, qui a joué la carte du changement de visage au cours des dernières années et décennies sans changer ses politiques, tant chez les soi-disant réformateurs que chez les conservateurs, afin de continuer à survivre et de donner l’impression qu’il existe une sorte de démocratie et de liberté d’expression.
Certains signes indiquent que la situation politique intérieure en Iran ne se normalisera pas. Cela n’est pas du tout lié à la chute du régime, qui pourrait rester imprévisible malgré l’escalade des tensions internes.
C’est plutôt dû en grande partie aux conditions internationales qui affaiblissent la capacité des opposants occidentaux au régime à soutenir les mouvements internes, ainsi qu’à la force de l’appareil de sécurité, dont de nombreux observateurs s’attendent à ce qu’il s’affaiblisse et se relâche au fil du temps, voire s’effondre.
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