Guinée : nouvel échec
Les syndicats guinéens n’acceptent pas la nomination de monsieur Eugène Camara au poste de Premier ministre et affirment que, dans ces conditions, ils ne pourront pas accéder à la demande des autorités concernant la levée du mot d’ordre de grève générale, car ce dernier est jugé trop proche du président Lansana Conté. La rencontre tenue ce mercredi 21 février 2007 s’est terminée comme toutes les précédentes en échec après deux heures de discussions au Palais du Peuple. En s’adressant aux religieux et députés qui étaient présents, les dirigeants syndicaux ont souligné que le peuple ne veut pas accepter cette nomination : « Si vous ne nous croyez pas, essayez donc de convaincre le peuple ». Il est étonnant de voir comment ce monsieur Eugène Camara s’accroche à ce siège qui met le pays en émoi. Il pourrait démissionner, mais ce serait trop lui demander.
Les mouvements syndicaux guinéens n’acceptent pas la nomination de monsieur Eugène Camara au poste de Premier ministre. Ils estiment que l’entrée en fonction du nouveau chef du gouvernement, nommé le 9 février dernier, contrarie l’accord conclu le 27 janvier 2007 avec les autorités, prévoyant la nomination d’un Premier ministre de consensus ainsi que la libération des personnes détenues lors des manifestations. Les entretiens dits de concertation avaient rassemblé les dirigeants syndicaux, les présidents de l’Assemblée nationale, du Conseil économique et social et la Cour suprême, sous la médiation de chefs religieux et de membres du patronat.
La prolongation de l’état de siège pourrait être envisagée
Monsieur Lansana Conté, le président guinéen avait décrété l’Etat de siège le 12 février 2007. Cette situation doit se prolonger, au moins, jusqu’au vendredi 23 févrierdans l’espoir d’une amélioration de la situation. Le président Lansana Conté avait justifié ces mesures d’exception, dont le respect du couvre feu et le renforcement des pouvoirs des forces armées, comme moyens indispensables pour éviter une guerre civile. Etant donné le statut quo entre les parties, il n’est pas exclu que l’état de siège soit prolongé. Les députés guinéens ont été convoqués pour une session plénière le vendredi 23 février à 10 heures locales à l’Assemblée nationale, et ce « conformément aux dispositions de l’article 74 de la loi fondamentale ». Cet article établit que l’état de siège cesse d’être en vigueur douze jours après avoir été proclamé, à moins que l’Assemblé nationale « n’en autorise la prorogation pour un délai qu’elle fixe ».
En clair, le pays reste paralysé, à la fois par cet état de siège et par la grève générale qui bloque l’activité économique depuis le 10 janvier. La Guinée est sous contrôle militaire depuis bientôt dix jours. La capitale guinéenne vit au ralenti. La majorité des entreprises sont fermées. Les commerces, les administrations et les écoles le sont également. Afin d’ éviter une paralysie totale du pays, les dockers du port de Conakry ont instauré un service minimum.
Des inquiétudes régionales se font sentir
La crise en Guinée inquiète la communauté internationale et tout particulièrement les dirigeants des pays voisins. La présidente du Liberia, madame Ellen Johnson Sirleaf, et le président de la Sierra Léone, monsieur Ahmad Tejan Kabbah ont été reçus, mercredi à Conakry, par le président Lansana Conté. « Nous avons dit au président de Guinée qu’il doit écouter les syndicats pour que la situation ne s’aggrave pas », a souligné la présidente libérienne à Monrovia. Il faut noter que le Liberia et la Sierra Leone ont été ravagés par des guerres civiles meurtrières, durant les années 90. Madame Ellen Johnson Sirleaf avait aussi estimé que « la situation en Guinée est très inquiétante », notamment au regard de la délicate question de mercenaires libériens qui auraient été recrutés en territoire guinéen, selon plusieurs sources.
L’avis du président de la CEDEAO
L’avis du président de la Cedeao est attendu. Le président en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), Blaise Campaoré, devrait s’exprimer prochainement sur la situation en Guinée. Ses « recommandations » sont attendues avec beaucoup d’intérêt dans toute la région, suite à la visite « exploratoire » effectuée à Conakry par les émissaires de cette organisation : l’ancien président nigérian Ibrahima Babangida et le président de la Commission de la Cedeao, Mohammed Ibn Kambas.
Le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine (UA) a décidé vendredi dernier d’appuyer une enquête nationale guinéenne sur les violences politiques dans ce pays d’Afrique de l’Ouest. Le Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l’UA « a condamné fermement l’usage disproportionné de la force et la répression contre les manifestants qui ont occasionné de nombreuses pertes en vies humaines ». Le gouvernement de Conakry s’est déclaré favorable à un règlement pacifique de la crise, tout en excluant le départ du président Conté, âgé de 73 ans, qui est au pouvoir depuis 1984.
Les Nations unies et plusieurs organisations humanitaires ont déploré l’intervention de forces armées guinéennes, après la proclamation de l’état de siège. Les responsables de Reporters sans frontières à Paris se sont insurgés, notamment, contre la censure qui a été imposée de facto à la presse de Conakry.
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