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Accueil du site > Actualités > Europe > BCE : Vos salaires vont diminuer !

BCE : Vos salaires vont diminuer !

Cet article, traduit par Les Clés de l’Europe, est un encadré dans le bulletin économique de la BCE (décembre 2015, volume 8, pp 38-43).

L'auteur étudie la rigidité à la baisse des salaires et ses causes dans la zone euro. Il part du constat (non démontré) que cette rigidité est un frein à l'économie.

Il conclut que différentes difficultés doivent être levées pour améliorer la situation économique en brisant cette rigidité ; il faut pouvoir baisser les salaires en temps de crise.

Ces mesures sont autant d'atteintes à la protection minimale du salarié : minimiser les coûts des embauches et des licenciements, désindexer les salaires, casser les négociations collectives et aller vers des négociations individuelles, interdire les actions concertées des syndicats, renforcer la flexibilité des horaires et la mobilité au sein de la zone euro ...

Soyons certains que ces conseils sont tombés dans des oreilles attentives qui n'attendent qu'un feu vert "d'en haut" pour satisfaire l'oligarchie financière.

Traduction d’un encadré du bulletin économique de la BCE
Numéro 8 de décembre 2015, pp 38-43

Traduit par Yannick HERVE et Domenico ARMENTANO
Le 23/12/2015

www.facebook.com/lesclesdeleurope

 

La rigidité des salaires à la baisse
et le rôle des réformes structurelles dans la zone euro

 

Cet article examine le rôle des réformes structurelles et des institutions du marché du travail dans l'ajustement des salaires dans la zone euro, avec un accent sur la rigidité des salaires à la baisse. En plus du fait que la productivité des travailleurs puisse souffrir du fait de salaires inférieurs, comme le soutient la théorie du salaire efficient, la rigidité à la baisse des salaires a d'autres conséquences macroéconomiques importantes. Des preuves empiriques semblent soutenir le point de vue que l'ajustement du travail est plus lent lorsque les salaires sont rigides et que les réformes structurelles peuvent faciliter le processus d'ajustement.

La réaction des salaires au taux de chômage dans la zone euro semble varier considérablement à travers différentes périodes de temps. Le graphique A montre que, dans la période de forte croissance du PIB avant la crise, les salaires ont réagi relativement fortement aux variations du taux de chômage. Cependant, dans la première phase de la crise, nommée la « Grande Récession », cette relation s’est affaiblie sensiblement, montrant éventuellement la rigidité des salaires à la baisse. La réaction des salaires au chômage s’est renforcée de nouveau au cours de la seconde phase de la crise (caractérisée par la récession qui a commencé vers la fin de 2011), mais était encore sensiblement plus faible que dans la période de pré-crise.

Les différentes réactions des salaires au chômage à différentes étapes du cycle économique semblent être expliquées en partie par les rigidités des salaires à la baisse qui caractérisent différents pays de la zone euro. Les preuves de la rigidité des salaires au niveau micro sont relativement bien établies et appuient la constatation que la réduction des salaires est difficile. Ceci est également confirmé par les récents résultats de la troisième phase de l'enquête au niveau de l'entreprise réalisée par « Wage Dynamics Network ». Au niveau macro, Heinz et Rusinova (2011) montrent que les salaires semblent être moins sensibles au chômage en présence d’un chômage plus élevé. Ceci est confirmé par une étude récente d’Anderton et Bonthuis (2015), qui montre aussi une réactivité inférieure à la baisse des salaires à un chômage plus élevé en période de ralentissement économique. Le tableau B montre l’évolution dans le temps du paramètre de rigidité des salaires estimée dans Anderton et Bonthuis (2015), qui semble aussi conforme aux données du tableau A, les deux suggérant une preuve que la rigidité des salaires à la baisse s’est affaiblie quand la crise s’est prolongée.

Les institutions du marché du travail semblent jouer un rôle important dans l'ajustement des salaires. Le tableau suivant offre un aperçu des caractéristiques de négociation salariale des marchés du travail de la zone euro et confirme une substantielle hétérogénéité des institutions du marché du travail dans les pays de la zone euro. Certains d'entre eux, tel que les Etats baltes, sont généralement définis comme « souples/flexibles », compte tenu de leur processus de négociation décentralisé des salaires et de la relative faible syndicalisation. Cependant, plusieurs autres pays de la zone sont caractérisés par une forte présence syndicale (par exemple la Belgique, Malte et la Finlande), un degré élevé de coordination des processus de négociation salariale (par exemple la Belgique, l’Allemagne, les Pays-Bas, l'Autriche et la Finlande) et la fixation d’un salaire minimum (par exemple la Grèce, l’Espagne, la France, la Lettonie, le Portugal et la Slovaquie). Ces points, en conjonction avec des schémas forts d'indexation des salaires sur l'économie et une stricte législation de protection de l'emploi (cf. graphique C), peuvent entraîner des rigidités des salaires à la baisse.

Les pays de la zone euro, en particulier ceux qui ont été les plus touchés par la crise, ont mis en œuvre un programme complet de réformes structurelles. Ceci est confirmé par les changements dans la législation sur la protection de l'emploi (cf. graphique C), où les réformes du marché du travail ont été principalement mises en œuvre par les pays en situation de stress économique. Ces réformes ont inclus la décentralisation de la négociation collective des salaires avec plus de négociation au niveau de l'entreprise, une diminution des régimes d'indexation automatique des salaires, moins d’accords collectifs, une plus grande flexibilité du temps de travail et une réduction des coûts d'embauche et de licenciement.

Les réformes du marché du travail ont le potentiel d'accroître la réactivité des salaires au ralentissement économique. Anderton et Bonthuis (2015), par exemple, trouvent qu'en présence d’une législation de protection de l'emploi stricte et une forte présence syndicale, les salaires peuvent être moins sensibles au chômage. Par conséquent, la réduction de ces indicateurs au cours de la crise peut aussi expliquer en partie la baisse de la rigidité des salaires dans les graphiques A et B. Par exemple, Font et al. (2015) expliquent que la réactivité des salaires réels au chômage en Espagne semble avoir augmenté après la mise en œuvre des réformes du marché du travail en 2012-13. Ils constatent également que le procyclicité des salaires est plus faible pour les travailleurs de longue date, ceux ayant des contrats permanents et les travailleurs âgés, qui sont plus protégés contre les rajustements salariaux dans les périodes de ralentissement économique. En outre, Martin et Scarpetta (2012) fournissent la preuve que la réglementation du marché du travail affecte un certain nombre d'autres canaux de propagation, tels que la réallocation du travail et même la productivité, ce qui peut indirectement affecter l'évolution des salaires.

L’obtention de preuves empiriques évidentes sur les effets de certains types de réformes est difficile, surtout quand on regarde l'évolution des données agrégées sur les salaires. Des difficultés surgissent, par exemple, pour démêler l'impact sur les salaires des réformes de l'impact des changements dans la composition des emplois et dans la consolidation fiscale. Par conséquent, une analyse plus approfondie est nécessaire pour bien comprendre les facteurs sous-jacents de l'ajustement des salaires dans la zone euro au cours de la période de crise.

Pour renforcer la résilience de l'économie aux chocs, les salaires doivent refléter de façon appropriée les conditions du marché du travail et l'évolution de la productivité, ce qui souligne l'importance des réformes qui doivent mener à une plus grande flexibilité des salaires et la différenciation entre les travailleurs, entre les entreprises et entre les secteurs. En plus des facteurs mentionnés ci-dessus, l'amélioration de l'efficacité des politiques actives du marché du travail, ainsi que la mobilité accrue de la main-d'œuvre au sein et entre les pays de la zone euro, aideront également à réduire l'inadéquation des compétences et le chômage structurel, augmentant ainsi la réactivité des salaires au chômage.

 

Texte original (pages 38-43) : https://www.ecb.europa.eu/pub/pdf/ecbu/eb201508.en.pdf

 

Traduit par Yannick HERVE et Domenico ARMENTANO
Le 23/12/2015

www.facebook.com/lesclesdeleurope


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5 réactions à cet article    


  • zygzornifle zygzornifle 31 décembre 2015 14:39

    pas pour tous :

    Claude Bartolone octroie une généreuse augmentation de salaire à ses proches collaborateurs ....

    http://www.bfmtv.com/politique/la-genereuse-augmentation-de-salaire-du-cabinet-de-claude-bartolone-938930.html


    • Vinciboulette 31 décembre 2015 14:50

      Excellente idée. En temps de crise, réduisons les salaires pour encourager la consommation. C’est bien connu : quand on a moins de sous, c’est là qu’on se met à dépenser pour soutenir la sacrosainte croissance. Comprenne qui pourra.


      • sls0 sls0 31 décembre 2015 16:33

        La période de croissance est fini, elle était liée a une énergie disponible est très efficace surtout le pétrole.
        Pendant la croissance il y avait de quoi alimenter le 1% le plus riche et les 99% restant.
        Comme la croissance diminue, on retourne à l’ancienne méthode qui a fait ses preuves pendant des millénaires, on appauvri les 99% CQFD.

        En se basant sur les travaux de Piketty, le 1% avait 20% des revenus avant l’arrivée du pétrole, en 2016 ils auront 50% de la planète, ils auront de quoi vivre sur leur rentes.

        @ Vinciboulette.
        Le fordisme a été notre modèle plus d’un siècle, l’ouvrier devait gagner assez pour acheter sa production, les ressources se cassent la gueule, la production va baisser, des salaires permettant l’achat de la production est-ce encore nécessaire (vision du 1%).


        • Captain Marlo Fifi Brind_acier 1er janvier 2016 11:38

          L’ UPR a publié en 2014, la longue liste des Grandes Orientations de Politique économique de la Commission européenne que chaque pays européen doit appliquer au plus vite.
          Tableau des « réformes structurelles » pour chaque pays européen.


          Réformes structurelles pour la France, que Macron suit point par point.

          La Commission européenne appelle cela pudiquement « des recommandations », en fait ce sont des ordres. Exemple. « La France est sommée de se réformer ».

          • Hervé Hum Hervé Hum 2 janvier 2016 10:12

            Dieu se rit de ceux qui vénèrent les causes dont ils déplorent les conséquences (Bossuet)

            Ou si vous préférez Einstein « on ne résous pas un problème avec les modes de pensées qui l’ont engendré »

            Comme il n’est pas question de toucher au principe du capitalisme, c’est à dire l’exploitation, il est bien clair que ce ne peut être que les salariés qui doivent êtres la variable d’ajustement structurel.

            Le problème, c’est que ce sont les salariés eux mêmes qui défendent cette politique, donc, qui poussent à leur propre paupérisation.

            Comment ? Par l’épargne d’un coté et par la défense de la propriété économique par le biais de leur croyance, très bien manipulé, qu’il s’agit de la même propriété que celle de leur maison. Alors qu’il n’y a de propriété que celle économique et non d’usage. Pour cette dernière, la propriété n’existe pas, car elle est vide, ne permettant pas de vivre sur le seul profit tiré de celle-ci.

            Evidemment, cela demande d’entrer a minima dans la pensée complexe et sortir des simplismes manipulatoires.

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