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Sport : le Canyoning

Mardi 20 août 2024, une quinquagénaire se blesse à la cheville vers 21 heures dans le canyon d'Olhadubie (Pyrénées). « La difficulté d’accès au canyon, dépourvu de chemin d’accès pour véhicule terrestre, ainsi que les conditions météorologiques dégradées rendent l’intervention complexe. (...) Quatre secouristes sapeurs-pompiers sont donc partis rejoindre la victime pour réaliser un point chaud qui consiste à réchauffer la victime, à l’aide d’une tente de fortune et des boissons chaudes, afin qu’elle puisse passer la nuit ». Mercredi matin l’hélitreuillage ne peut avoir lieu « Il n'y a aucune visibilité à cause du brouillard. C’est une zone constituée de bas rocheux conséquents, déjà difficile d’accès par temps clair. Ce serait beaucoup trop dangereux ». L'opération mobilise une cinquantaine d'intervenants : sapeurs-pompiers en milieu périlleux, urgentistes et gendarmes. Une évacuation terrestre est mise sur pied pour remonter le canyon afin d'en extraire la victime à l’aide d’une tyrolienne. Vers 13 heures les conditions météorologiques s'améliorent et l'hélicoptère Dragon 64 peut procéder au brancardage par moyen aérien. 

L'abondance de cours d'eau en zones de montagne permet à la France de disposer de plusieurs centaines de sites en pleine nature permettant la pratique de ce sport. Le canyoning consiste à descendre des gorges étroites au profil accidenté en utilisant des techniques alpines (rappels, désescalade, main courante), aquatiques (nages, glissades, sauts), spéléologiques (cordes statiques et dynamiques, poignées, tyrolienne ou rappel guidé), travaux acrobatiques et pédestre (marche). Il existe des parcours pour débutants et confirmés, comptez une cinquantaine d'euros la sortie ; période conseillée avril à octobre. La randonnée aquatique plus facile d’accès, consiste à se déplacer entre l’eau et la roche en alternant la nage et la marche.

« Un canyon (de l'espagnol Cañon) est une vallée encaissée à flancs raides, forme fréquente dans les régions karstiques qui représentent un écoulement subaérien. Les géographes ont étendu le nom karstique à toute région à grands plateaux nus, peu ou point coupés de vallées, mais présentant des dépressions fermées de formes et de dimensions variables. La dureté et la perméabilité des versants expliquent que l'essentiel de l'érosion se fasse sur le fond du lit, tandis que les flancs évoluent lentement , se présentant comme une succession de parois abruptes, de surplombs, de corniches, de talus en pente moins raide disposée selon l'alternance des bancs calcaires  » (précis de géomorphologie Masson).

La pente d'un canyon diminue généralement de l'amont vers l'aval et présente des irrégularités : ruptures de pentes, rapides, cascades, contre-pentes formant des retenues d'eau donnant lieu à la marche dans les vasques (mare peu profonde), saut dans les marmites (cavités circulaires creusées dans le lit rocheux), glissades sur toboggans de roche polie, nage dans les biefs (section comprise entre deux chutes ou deux rapides successifs), rappels sous les cascades. Des arrêtés préfectoraux en réglementent la pratique et limitent le nombre de participants, car la progression pédestre peut modifier le fragile équilibre de la nature et détériorer la faune aquatique (pontes, alevins, larves), et certains endroits sont exposés à la pollution : concentration d’effluents, véhicules et encombrants précipités du haut des falaises, débit variable, eaux stagnantes.

La classification proposée par la Fédération Française de Montagne et d’Escalade prend en compte : l'aspect vertical (lettre V suivie de 1 à 7), le caractère aquatique (lettre A suivie de 1 à 7) et l’engagement / l’envergure (chiffre romain de I à VI). Si les parcours décrits dans les guides sont équipés d'ancrages (broches en acier inoxydable) scellés à la résine faisant l'objet de contrôles, toujours choisir le canyon adapté au niveau des participants et à leur âge. On distingue 7 niveaux de difficultés :

Très facile (niveau 1) : parcours qui s'apparente à la randonnée aquatique (absence de saut, toboggan et parois verticales.

Facile (niveau 2) : quelques rappels de moins de 10 mètres, passage d’escalade facile, sauts sans difficultés, tronçon de nage limité à 10 mètres et en eau calme.

Peu difficile (niveau 3) : progression sur des appuis, rappel inférieur à 30 mètres, nage inférieure à 30 m, eau calme, sauts de 3 à 5 m.

Assez difficile (niveau 4) : rappels supérieurs à 30 mètres, escalade, courant moyen, saut au-dessus de 5 mètres et « long toboggan ».

Difficile (niveau 5) : supports glissants, progression en rappel sur parois, sauts entre 8 et 10 mètres, présence de siphons.

Très difficile (niveau 6) : franchissement et progression très techniques, support instable, courants forts, siphons.

Extrêmement difficile (niveau 7) : débit très fort, profil accidenté, siphons, nombreux obstacles et visibilité limitée.

Si en France la pratique du canyoning, considérée sport à risque par les assurances (souscrire un additif) reste libre, il est recommandé de se rapprocher d'une association affiliée à la fédération française de spéléologie ou de la Montagne et de l'Escalade. Il appartient à l'encadrant : bénévole titulaire d'un diplôme fédéral, professionnel titulaire d'un brevet d’État de : spéléologie, aspirant-guide, guide haute-montagne, moniteur d'escalade, accompagnateur en moyenne montagne, canoë-kayak délivré par le Ministère de la jeunesse et des sports de juger du niveau des participants et de sélectionner un parcours adapté à leur expérience et à la dotation en matériel (environ 300€ la demi-journée pour un guide affilié à un syndicat national).

Une sortie se prépare : accès routier et pédestre aller-retour et échappatoires (carte IGN au 1:25 000e), période autorisée et période conseillée, équipement individuel et collectif requis, nature de la roche, débit d'étiage, température de l'eau, surface du bassin versant, dénivelée en descente, longueur du canyon et des passages, difficultés : cascades, risque de crue, difficultés, passages aquatiques, bulletin météo. Un parcours facile peut en période de fortes pluies, orage ou un lâché d'eau devenir impraticable, et le moindre incident tourner à la catastrophe, impossibilité à rejoindre une échappatoire, blessures nécessitant un hélitreuillage.

L'équipement : combinaison ajustée et d'épaisseur adaptée à la température de l'eau, cagoule, casque, chausson néoprène, chaussures polyvalentes, baudrier, longes, mousquetons, descendeur, sifflet, couteau, cordes, sac à dos drainant l'eau résiduelle, encas énergétique, vêtements, trousse de premiers secours, etc. Prévention : ne jamais partir seul, choisir le parcours adapté au niveau du plus faible (pénalisant pour les autres), avertir une personne de l'itinéraire et du timing prévus, s'assurer des acquis des participants, de la connaissance des signaux gestuels et sonores, contrôler l'état du matériel et celui des amarrages, sonder les zones inondées et apprécier la vitesse du courant avant de sauter ou de s'immerger.

Si les sauts, les glissades, les descentes en rappel et le franchissement de passage noyés font du canyoning une activité très ludique, ceux-ci recèlent des risques. Les sauts représentent 45 % des accidents. Un saut de 4 à 10 m de hauteur requiert une profondeur d'eau de 4 mètres. Les mouvements d'eau peuvent receler d'autres dangers invisibles de la surface : drossage, contre-courant, siphon, aspiration (renard). La vérification du plan d'eau, de sa profondeur et de l'absence d'obstacle s'impose avant tout saut ou glissade car les conditions peuvent varier rapidement.

Les blessures lors de sauts sont : ecchymoses, luxation, fractures, commotions cérébrales, lésion du rachis. S'assurer de l'adhérence des chaussures, fixer le point de chute, pousser vivement sur la jambe d'appui, se rééquilibrer et ramener les jambes et les bras le long du corps ou bras croisés, pieds en extension vers le bas (saut droit ou frite), suspendre la respiration, contracter le corps, le corps freiné, on amorce la remontée et dégage la zone pour rejoindre le point d’émersion. Jusqu’à environ 5-6 mètres de hauteur, il n’y a généralement pas de dégâts, mais au-delà le saut se doit être effectué correctement. La vitesse de chute augmente de 9,81 mètres par seconde, dit autrement, le corps atteint la vitesse de 35 km/h après une seconde de chute et 71 km/h pour 2 secondes. Une étude montre qu'une inclinaison du corps de 10 degrés, d'une hauteur de 10 m, multiplie par deux la contrainte sur les articulations. Le port d'une cagoule protège les tympans en cas d'un port de tête incliné... Ne jamais forcer une personne à sauter mais lui proposer de contourner l'obstacle.

Lors de la descente d'un toboggan, celui-ci doit avoir une pente lisse minimum recouverte d'un film d'eau pour assurer une glisse suffisante et ainsi éviter de se retrouver immobilisé. Le port d'une « culotte » protège la combinaison et améliorer la glissade. Position recommandée : menton touchant le cou, bras croisés devant le torse et pieds serrés, et attendre entre chaque descente pour éviter tout télescopage. Des canyonistes prennent des positions dignes d'un contorsionniste afin de réduire les frottements et prendre de la vitesse et se révéler dangereux.

Lors de ma dernière sortie, la discussions alentours portaient sur les descentes en rappel (descente contrôlée à l’aide d’une corde) et les techniques mises en place : simple ou double brin - sec ou mouillé - rappel guidé - contre-assurage ou auto-assurage - freinage - nœud avant ou après le descendeur - rappel débrayable (permet la descente d'un canyoniste coincé sur sa corde), corde dynamique ou statique, réglage de la hauteur de corde, etc. Si cela semble pinailler, des risques existent : un homme est mort étranglé par la corde lors d'une descente en rappel (noeud avant le descendeur ?) et un autre est mort noyé plaqué sous la cascade.

Autres risques inhérents au canyoning : la montée soudaine du niveau d'eau (débit, orage, présence d'affluents, surface du bassin) - vingt-et-un canyonistes emportés par le torrent rendu tumultueux par un orage - un autre décède à la suite d'une chute d'une pierre - un jeune homme meurt noyé dans un siphon - les corps de quatre personnes emportées par une vague - un homme disparaît après avoir sauté dans un trou d'eau - un autre glisse et fait une chute mortelle. Chaque saison fait son lot de victimes. En cas d'accident dégager la victime, la placer à l'abri hors-crue et de chute de pierres, dispenser les premiers soins (RA, MCE, garrot, etc.), prévenir les secours : 112, 15, 17, 18, N° CODIS départemental, CRS ou PGHM, signaler l'emplacement de la victime et éviter de la laisser seule. Attention ! la couverture cellulaire est très inégale en moyenne et haute-vallée, dépêcher le plus expérimenté pour aller chercher les secours.

L'encadrant est tenu d‘une obligation d’information et de conseil (article 1353 du Code civil), et il lui appartient d'en apporter la preuve (arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation). Un moniteur breveté d'État a été condamné à un an de prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Nice. Un groupe de six hommes avait été surpris à mi-parcours par un violent orage provoquant une brusque montée des eaux (juillet 2006). Si quatre d'entre eux s'étaient amarrés à la paroi et secourus par hélicoptère, deux ont été emportés par les flots. Le moniteur mis en examen pour homicide involontaire et mise en danger d'autrui « était accusé d'avoir démarré la sortie trop tard, compte tenu des risques annoncés d'orage, et d'avoir négligé de prendre l'échappatoire située au milieu de la descente ». Le prévenu a affirmé lors de l'audience, qu'il n'avait détecté aucun signe avant-coureur d'intempéries, argument non retenu par le tribunal. S'il existe des postes récepteurs avertissant de l'arrivée d'un orage, ceux-ci ne font jamais partie de l'équipement individuel ou du matériel collectif. Une correction, une précision, une remarque ?

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6 réactions à cet article    


  • xana 30 août 13:59

    Vous avez raison : Il faudrait TOUT aménager... Ensuite il ne nous resterait plus qu’à trouver une planète vierge et propre pour y installer notre merde.


    • colibri 31 août 00:00

      Une remarque :

      « une quinquagénaire se blesse à la cheville ...

      L’opération mobilise une cinquantaine d’intervenants ...et l’hélicoptère Dragon 64 peut procéder au brancardage par moyen aérien »

      et combien coute tout ca et qui va payer ? L’Etat donc vous et moi , pas normal , 

      celui qui a une pratique à risque devrait être responsable et payer les secours ,avec ses deniers ou par le biais d’une assurance , mais cela ne devrait pas être une charge pour la collectivité .Je risque , je paye ..

      il y aurait ainsi , beaucoup moins d’adeptes du dimanche inconséquents à la recherche d’émotions fortes  : ah ben tiens je me ferais bien une cascade ce we etc 

       




      • mmbbb 31 août 10:58

        @colibri c est vrai , je fais aussi de la montagne et je me maintiens de facto en sante .

        Je ne suis que rarement malade .

        et j ai plus de risque de me faire renverser à velo en ville .

        Et je n ai pas été pas malade depuis des lustres et pourtant je paye indirectement pour les alcollos les fumeurs et les drogues ils ont une prise en charge a 100 %

        et pour les personnes qui bouffent comme des porcs .

        Et j oubliais l assistance médicale des personnes irreguliere en France

        Vaste débat ,

        J ai donne mon sang mes plaquettes , on me demanda de donner aussi ma moelle osseuse. et aussi mes organes .

        J ai tous arrête , si j ai un accident en montagne je paierai dans certaines communes le maire facture .

        puisqu il faut avoir une âme de comptable je l ai acquis !!


      • colibri 31 août 11:46

        @mmbbb, je fais aussi un peu de montagne , mon propos concerne les gens qui ont des pratiques hors normes du bon père de famille comme la marche , la promenade cool sans matériel spécial (je vais d’ailleurs y aller cette après midi en Auvergne pour une marche d’une heure ou deux)  ,
        mais mon propos concerne des sportifs ou des gens qui cherchent des émotions fortes en poussant leurs limites dans une pratique qui présente plus que de risque que de traverser la rue , ce n’est pas du tout le même chose :par ex le wingsuit , canyoning , alpinismes , escalade et autres pratiques qui sont des sports ou il faut s’équiper et non pas juste faire un peu d’exercice  :
        ils cherchent des émotions fortes et sortent des sentiers battus ou il y a forcément des risques très bien , qu’ils assument , mais ce n’est pas à la collectivité de payer .


      • mmbbb 31 août 12:20

        @colibri la collectivité paye pour n importe quoi ! 

        en premier lieu certaines associations ! 


      • raymond 2 septembre 17:30

        @colibri
        ce n’est pas à la collectivité de payer, certe mais c’est elle qui profite de ces « touristes » non ?

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