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Solution à deux États  : Discours de Lapid et position palestinienne

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Le discours du Premier ministre israélien Yair Lapid devant l’Assemblée générale des Nations unies et son appel à une solution à deux États ont suscité une profonde controverse politique. Il s’agit d’une position qui mérite une réflexion analytique et profonde, en dehors du conflit électoral israélien qui joue un rôle évident dans le débat interne sur cette question et d’autres.

Une question centrale se pose ici. Le discours de Lapid signifie-t-il une percée dans la position israélienne sur le conflit avec les Palestiniens ou non  ? En fait, oui, qu’il ait atteint ou non l’objectif politique de présenter sa vision à l’ONU.

Laissons également de côté l’examen des intentions et la recherche de métaphysique, de conditions préalables, de dimensions, de finalités, etc. Ramener l’idée d’une solution à deux États est un mérite du Premier ministre israélien Lapid. Elle ne va pas à l’encontre de ses calculs pour la recherche de la stabilité que recherchent les peuples israélien et palestinien.

Que l’ancien Premier ministre Netanyahou en ait parlé avec plus d’insistance à la tribune de l’ONU en 2016, Lapid a peut-être choisi le bon moment pour faire avancer sa vision, même si beaucoup disent qu’il a choisi le mauvais timing. Il est largement connu que la solution à deux États est une option politique qui ne figure dans aucun accord ou document officiel sur le conflit.

Mais elle reste une solution idéale ingénieuse, même si elle est insaisissable en raison de la complexité des détails et des mécanismes possibles d’obstacles techniques, juridiques, exécutifs et politiques que de nombreux observateurs considèrent comme difficiles à surmonter pour un compromis. La solution à deux États n’est pas seulement un mot à la mode éphémère.

Elle est tellement présente dans la littérature politique liée au conflit, tant internationale qu’arabe, qu’elle jouit d’une énorme légitimité, quelle que soit la position des parties au conflit. Elle reste un rêve partagé par la communauté internationale pour sortir de ce conflit chronique. Le terme n’a rien à voir avec une résolution de l’ONU sur la question palestinienne.

Il n’est pas non plus mentionné dans les initiatives internationales ni même dans les accords d’Oslo. Ce sont toutes des formules qui font référence à un règlement négocié et acceptable pour les deux parties, israélienne et palestinienne. Quant à la réaction palestinienne au discours de Lapid à l’ONU, elle a été du côté négatif.

Certains l’ont considéré comme une sorte de «  tromperie  » et une manœuvre politique, bien que personne n’ait exigé des tours et des tromperies de la part de cet homme, et s’il n’avait fait que répéter des platitudes, personne ne l’aurait blâmé et son discours n’aurait pas attiré l’attention.

Par conséquent, nous pensons que la simple renaissance d’une idée que tout le monde prétend avoir été rendue obsolète par les événements apporte un nouvel espoir aux Palestiniens. Il ne s’agit pas tant de manœuvres politiques, mais de faire face à de telles situations et d’essayer d’en tirer le meilleur parti sur le plan stratégique, même si cela apparaît comme un vœu pieux pour certains.

Prendre ses désirs pour la réalité peut être une bonne chose, et les grandes victoires commencent toujours par un petit rêve.

Je sais très bien que l’idée d’une solution à deux États est très ambiguë, comme je l’ai dit plus tôt, avec la vision de chaque partie, surtout quand il s’agit du diable dans les détails, comme le statut de Jérusalem, les réfugiés, les colonies, l’eau, la sécurité mutuelle, le tracé de la frontière, la notion de la forme de l’État palestinien des deux côtés, et d’autres questions qui impliquent beaucoup de complexité.

Mais l’analyse doit commencer par une note positive. Lapid est le premier Premier ministre israélien à s’adresser à l’ONU au sujet d’une solution à deux États depuis 2016, et son discours était très soigneusement formulé. Il s’adressait vraiment au public, et non aux politiciens.

Lors des prochaines élections en Israël, il veut que le vote tourne autour de ce pari à somme nulle  : soit la vision de Lapid gagne, soit elle échoue. Ce que Lapid dit à propos d’un futur État palestinien «  pacifique  » est évident et ne doit pas être surinterprété.

Il ne s’agit pas d’une décision formelle, mais d’une déclaration d’intention dont on pourra s’inspirer lorsque l’électorat israélien se prononcera lors du prochain scrutin.

Le discours de Lapid à New York me rappelle un discours du défunt président égyptien Anouar el-Sadate, auquel Lapid a fait indirectement référence en parlant de «  paix aux puissants  » et en affirmant dans son discours à l’Assemblée générale de l’ONU qu’Israël est capable de se défendre grâce à sa puissance économique et militaire.

Mais elle permet aussi autre chose  : rechercher la paix avec l’ensemble du monde arabe et avec ses voisins les plus proches, les Palestiniens, a-t-il poursuivi, soutenant que la paix est la décision la plus courageuse que l’on puisse prendre. Cela confirme que nous aurons six semaines de débat politique animé avant les élections du 1er novembre.

Cela signifie également que les élections seront davantage un référendum sur la solution à deux États, entre les partisans et les adversaires de cette dynamique, qui est maintenant à la croisée des chemins. Soit elle reviendra sur le devant de la scène, soit elle sera enterrée dans l’oubli comme avant.

Je pense personnellement que la relance de la discussion sur la solution à deux États est un moment positif pour une solution politique au conflit israélo-palestinien. Nous ne devons pas oublier que la négligence de la solution à deux États par les États-Unis et Israël au cours des dernières années a été une source de grande inquiétude pour la direction palestinienne, qui a dû s’en tenir à la proposition israélienne au lieu de remettre en question son sérieux.

Ce qui compte maintenant, c’est le baiser de la vie qui a ramené l’idée sur la table, et non la dispute sur les intentions qui la sous-tendent ou la demande faite à Lapid ou à d’autres de reconnaître un État palestinien dans les frontières de 1967. Tout le monde sait qu’il s’agit d’un état de fait. Il faudra de longues négociations pour trouver une solution qui satisfasse les deux parties.

Demander à Lapid ou à d’autres de prendre des décisions immédiates n’a également aucun sens étant donné la complexité du conflit et la propre position de Lapid dans le gouvernement intérimaire israélien, dont la composition politique et les positions des membres sont connues de tous.

Il suffit de dire que le Premier ministre israélien Naftali Bennett s’est empressé de déclarer qu’il est inutile de relancer l’idée d’un État palestinien. Il ne faut pas oublier que le discours de Lapid à l’ONU contredit les déclarations antérieures qu’il a faites en janvier 2022 avant de prendre ses fonctions, dans lesquelles il a déclaré qu’il ne négocierait pas avec les Palestiniens même après être devenu Premier ministre.

Il a également exclu une rencontre avec Abou Mazen, affirmant qu’il n’y avait aucune raison politique à cela. Cependant, il a appelé Abbas en juillet dernier, le premier appel de ce type par un PM israélien depuis 2017. Nous examinons des positions remarquables qui ne doivent pas être réduites au rejet et au mépris.

Le discours de Lapid à l’ONU n’était pas tant du marketing politique que l’expression d’une vision stratégique ambitieuse qui doit encore être testée. Mais elle est, de l’avis général, significative. Le discours de Lapid sur la solution à deux États est important quel que soit le résultat des prochaines élections en Israël.

J’ai aussi aimé le commentaire d’un professeur israélien sur ce discours. «  On peut éteindre la désespérance par l’espoir », a-t-il noté. Si Lapid ne démissionne pas de son poste dans les prochains mois en prévision du coût politique élevé, tous n’auront d’autre choix que d’attendre le verdict du vote, qui pourrait fermer le rideau sur la proposition ou annoncer une volte-face.

Quoi qu’il en soit, ce que ce développement confirme est que la direction palestinienne ne comprend pas mieux l’environnement du conflit et ne mène pas sa cause dans l’intérêt du peuple palestinien.


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7 réactions à cet article    


  • DLaF mieux que RN ou Z / Ukraine Vert une Planète pouBelle :) 21 octobre 2022 12:09

    Demander à Lapid ou à d’autres de prendre des décisions immédiates n’a également aucun sens étant donné la complexité du conflit

    Ben voyons, il faudra 10 à 20,000 ans au moins pour trouver une solution à ce problème si complexe, le PLUS complexe de l’Histoire de l’Humanité

    qui peut en douter ?

    Faudra peut-être même attendre l’arbitrage de Messiah

     smiley

    et ces français qui se plaignent de faire 4 heures de queue pour un peu d’essence.. Tsk-tsk


    • sylvain sylvain 21 octobre 2022 14:57

      bullshit . L’extension sans fin des colonies israeliennes un peu partout dans ce qui aurait pu constituer le territoire palestinien exclut la solution a deux états, a moins que l’état israelien ne contraigne les colons a abandonner leurs maisons, ce qui n’arrivera jamais . Les sionistes extrêmistes les ont construites précisémment pour ça, ces colonies, et tous les gouvernements israeliens les ont soutenus .

      Tout ça ne vise qu’à gagner du temps, a noyer le poisson .


      • DLaF mieux que RN ou Z / Ukraine Vert une Planète pouBelle :) 21 octobre 2022 16:25

        @sylvain
        exclut la solution a deux états,


        Meu c’est évident. !
        On est prié de faire semblant d’y croire sinon gare à :
        la bête imm....monde,
        nauséabond,
        la peste brune

        et coé terra, et coé terra...


      • JPCiron JPCiron 21 octobre 2022 16:56

        @sylvain

        et tous les gouvernements israéliens les ont soutenus .>

        Et tous nos gouvernements ont soutenu (par leur bienveillant silence) la colonisation et les gouvernements israéliens qui l’ont mise en oeuvre.

        D’un côté il y a nos Principes et nos Valeurs éternelles, que l’on brandit fièrement, et de l’autre côté, il y a ces mêmes Valeurs et Principes que l’on piétine discrètement.

        Le double langage, le deux-poids-deux-mesures et la prostitution intellectuelle sont nos marques de fabrique. Aussi au niveau Europe. On pousse les électeurs vers les extrêmes. C’est désolant.


      • sylvain sylvain 21 octobre 2022 19:15

        @JPCiron
        l’hypocrisie séculaire de la « patrie des droits de l’homme » . Bon, on peut au moins dire que les autres ne sont guère mieux, mais il n’y a pas de quoi pavoiser effectivement


      • sylvain sylvain 21 octobre 2022 19:18

        @Vert une Planète pouBelle :)
        et ces éléments de com servent bien les dirigeants des pétromonarchies qui ont « normalisées » leur relation avec israel et qui ont un peu de mal a faire accepter cette évidente trahison a leur population . D’ou cet article


      • Emmanuel Aguéra Emmanuel Aguéra 22 octobre 2022 11:03

        Bonjour,
        Sujet intéressant ; pour ma part, j’ai toujours pensé que cette « solution à 2 états » était un leurre politiquement correct qui évite aux uns et aux autres de dévoiler trop abruptement leurs desseins réels et pourtant bien connus.
        Car, concrètement, aujourd’hui, nous y sommes, aux « 2 états ». La belle affaire... Il y a un état Palestinien, (sous)représenté à l’ONU, et évidemment un état d’Israël. C’est juste un fait quelles que soient les criantes disparités, rapports ou différences de traitements entre ces 2 entités.
        Oslo, 1993 : le principal, tant pour Arafat que Begin est de crédibiliser la possibilité d’un accord, impossible sur le papier tant le clivage, idéologique et sur le terrain, est évident. Cet accord doit pourtant être un consensus acceptable pour recevoir l’aval états-unien et celui de l’ONU. Alors, on couche sur le papier cette « solution à deux états », qui brille dans les salons diplomatiques mais qui, tous le savent, ne résout rien car à l’époque déjà, d’une part les 2 entités existent, et d’autre part l’antagonisme est patent dans la réalité, alors qu’Israël y mène la danse et fait ce qu’elle veut. Begin paraît hors-sol, héros des uns et traitre des autres, qui finiront par s’en débarrasser.

        Alors pourquoi cet accord inutile ? Oui, Clinton voulait rentrer dans l’Histoire, mais je pense qu’il s’agissait, autant pour Arafat que pour Begin, d’utiliser cette opportunité pour marquer un consensus avant d’aller plus avant dans une reconnaissance multilatérale d’une Palestine souveraine. Oslo, en un mot, devait n’être qu’une étape.
        La droite israélienne l’a bien compris, et déjà débarrassée de Begin, elle se débarrassa d’Arafat, laissant Oslo orphelin et un embryon d’état palestinien contraint à sa botte.

        Et depuis, dans ce contexte instable de « provisoire qui dure », le nettoyage ethnique se poursuit, la colonisation explose, l’apartheid règne, bref, un état bien établi en dévore un autre qui peine à se maintenir et encore plus à se reconstruire.

        Alors voilà ce que je pense de cette « solution » à 2 états qui en effet n’en est pas une,et qui pour moi n’a jamais eu vocation à l’être, et ne le sera jamais. C’est la carotte ressortie par ceux qui croient aux miracles et bien-sûr par ceux qui ont intérêt à ce qu’on croie aux miracles.

        Et je m’inquiète évidemment du futur. Sur le long terme, une Israël démocratique ne pourra assoir de légitimité durable sur un génocide, elle-même qu’un autre génocide a rendue possible. Si cette légitimité avait coulé de source, l’affaire serait réglée depuis longtemps. La négation par l’état hébreu de la préexistence

        de la Palestine historique, culturelle et ethnique pourra-t-elle perdurer ? J’en doute et je pense que fatalement un jour ou l’autre, à moins d’éliminer jusqu’au bout le peuple palestinien, sa culture et sa mémoire, il faudra bien lui reconnaître son existence, composer avec elle et partager enfin dignement cette terre qu’on s’accapare dans la violence et le silence complice des autres nations. C’est ma façon d’espérer.
        Car sinon, le sang continuera de couler, le malheur des uns uns et des autres perdurera, les positions se radicaliseront toujours plus et je crois malheureusement qu’on est loin d’avoir vu le pire.
        1 seul état, donc, mais intelligent et en bonne intelligence.

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