Manifestations du 19 janvier ? Même pas peur !
Ils avaient bien préparé le terrain, les macronistes , en multipliant sur des antennes ouvertes 7 jours sur 7 les esprits conformément à leurs petits désirs recuits. Qu’ils soient ministres, députés ou éditorialistes, que nous ont-ils asséné comme des mantras que bien qu’opposés en surface à leur belle réforme, nos chers gaulois, las d’avoir à subir tant de crises depuis tant d’années, étaient d’humeur résignée. Et donc prêts à courber l’échine devant les appels de ces syndicats congelés auxquels on avait pourtant ouvert grand les portes de Matignon pour, comme le pouvoir aime à le dire, dialoguer.
Adeptes de la démocratie participative en trompe l’œil, où, tel lors du grand débat de leur suprême leader début 2019 l’on convie à demeure tout ce que le royaume compte d’intermédiaires pour les autoriser à amender en bas de page un texte aussi ficelé sur lui-même que la Sainte Bible, nos régressifs réformateurs des héritages de 1946 nous avaient en outre sympathiquement prévenus que si manifester faisait partie des règles de leur jeu des sept familles, ils n’autoriseraient aucun débordement. Attention aux petits chenapans !
Patatras : au lendemain du 19 janvier, nos sourdingues de métier ont dû feindre de remiser par devers eux leurs foireuses hypothèses auto réalisatrices, et tourner sept fois la langue dans leur bouche avant de nous répéter avec d’autres mots strictement la même chose que l’avant veille. Pas de résignation, guère de casse et pas encore de blocages du pays avec leurs cortèges d’usagers en galère, soit. Mais au contraire un voire deux millions selon le thermomètre choisi de gaulois en colère battant les pavés, depuis une Place de la République noire de monde jusqu’à nos petites villes où de mémoire d’observateurs on n’avait pas vu autant de manifestants brandissant des pancartes depuis des lustres. Et en lieu et place des grognards habituels entassés sur les quais des rames, des télétravailleurs invisibles peu susceptibles de chouiner face caméra.
Depuis Barcelone où il s’était malicieusement enfui avec 11 de ses voleurs de poules, Ali Manu avait le jour même où ses administrés réfractaires battaient le pavé donné le la, méprisant et condescendant comme à sa bonne habitude, de la petite sonate matinale du lendemain des réjouissances.
« Je pense qu’il est légitime que toutes les opinions puissent s’exprimer, c’est le principe même d’une démocratie, et je fais confiance aux organisateurs de ces manifestations pour que cette expression légitime de désaccords puisse se faire sans trop de désagréments pour nos compatriotes et sans débordement, ni violence, ni dégradation. Dans une démocratie, il y a des règles et un bon fonctionnement. Il faut que les choses soient dites au moment où les choix démocratiques sont faits. Et à la présidentielle qui s’est tenue somme toute il y a quelques mois, et aux élections législatives, les choses ont été dites clairement ».
Autrement dit : la messe est dite ! Marchez comme bon vous semble, aussi nombreux que vous voulez, puis circulez, vous autres qui en avril dernier m’avez réélu en vous bouchant le nez. J’avais annoncé la couleur, vous avez perdu, rendez-vous en 2027 à toutes celles et tous ceux que ma réformé défrise, c’est le jeu, je suis droit dans mes bottes. Et j’ai quoi que vous en pensiez l’assurance qu’avec l’apport des voix des LR « les choix démocratiques », en d’autres termes les miens, « sont faits ». Et qui plus est « les choses ont été dites clairement ». Et toc !
Quand on tient la banque du Casino, le « faîtes vos jeux rien ne va plus » avant le lancer de dés n’est rien d’autre qu’une comédie de dupes ne reposant guère que sur la croyance populaire que chacun peut isolément gagner une mise et renverser la table. Ce que Tête de Mule Premier sait mieux que quiconque. Je vous concède la bataille, tandis que la main dans le coffre-fort je consolide mes gains. A vous de jouer !
« Si vous voulez que le pacte entre les générations soit juste, il faut procéder à cette réforme. Et donc nous le ferons avec respect, esprit de dialogue mais détermination et esprit de responsabilité », put-il conclure sourire aux lèvres.
Cyniquement, le roitelet entend bien jouer sur les contradictions et les divisions de ses adversaires, et tout autant surfer comme sur un scooter des neiges sur l’état de fragilité économique des plus radicalisés des opposants à sa réforme. 70 % de la rue est contre moi ? 70 % de la rue pense tout autant que la réforme passera ! Syndicats et oppositions de droite comme de gauche s’unissent le temps d’immenses rassemblements ? Leur crédibilité est au moins aussi écornée que la mienne, et leurs détestations réciproques empêcheront tout front commun de se cimenter sur la durée. A s’entêter on risque de ressusciter les grèves de 1995 ? Trop à fleur de peau du fait des déflagrations dues à l’inflation, les troupes une à une se disperseront d’elles-mêmes et finiront par se retourner contre les derniers bastions. Et si cela ne suffit pas, la moutonnière tendance à réclamer le retour à l’ordre et à la sécurité nous remettra en selle comme ce fut le cas lors du premier semestre de l’année 2019. Avec l’effet ardoise magique propre à la logique de ce monde peuplé de Dory, où l’on s’engage comme on scrolle l’actualité sous le prisme de l’instantanéité.
L’on peut à loisir gloser et se satisfaire de l’indéniable succès de l’évènement d’hier en tant que tel, dont on se gardera bien d’attribuer le mérite à ces centrales syndicales dont les leaders avaient tous sans exception appelé à voter en faveur de celui qu’ils contestent aujourd’hui. Lequel bien malicieusement a beau jeu de leur remémorer qu’il ne les avait pas pris en traître. Un million, deux millions, peu lui importe la contestation puisque celle-ci s’inscrit dans les gènes d’un système dont il tient fermement et jusqu’au dernier jour de son second mandat les clefs. Peu lui chaud que seuls 20 petits pourcents des français le suivent. Et au diable tous les mensonges éhontés mis en pièces pour nous faire avaler de force son huile de foie de morue ! Il répètera encore et jusqu’à satiété les mêmes mots valise, « juste », « nécessaire », « responsable », « dialogue », « détermination » tel un automate sur pilote automatique. Pour lui, vos retraites, c’est un dossier et rien de plus pompé sur les GOPE. Et si son SAV est encore en piste, lui a déjà la tête ailleurs.
Au lendemain de la manifestation, comme si de rien était, les principaux porte-cartouches de la Macronie vinrent dès l’aube défiler aux micros ouverts de Radio France nous livrer les nouveaux éléments de langage communiqués pendant la nuit sur leur boucle Telegram cryptée habituelle.
En un mot ? « Pas surpris ». On s’y attendait, on avait anticipé, tout ça est normal, ça fait partie du jeu démocratique … Même pas mal !
« On demande aux Français de travailler plus longtemps, il est évident que ce n’est pas très populaire », a minaudé ce bon Bruno Le Maire, refusant de jouer la carte de l’étonnement. « Il faut continuer à expliquer, continuer à convaincre, continuer à défendre cette réforme. Toutes les ouvertures et discussions sont intéressantes, toutes les propositions sont utiles mais elles doivent s’inscrire dans un cadre financier qui garantit un retour à l’équilibre en 2030 : c’est un point absolument fondamental de cette réforme », a-t-il poursuivi, en répétant obstinément que celle-ci est juste.
Et de conclure tranquillement : « Maintenant, c’est le temps du Parlement ». Rentrez chez vous braves gens, et branchez-vous sur La Chaîne Parlementaire : on s’occupe de tout entre professionnels de la profession ! Et à la prochaine !
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