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Les primaires ou la machine à perdre

La primaire de la droite et du centre a connu une forte participation et bénéficié d’une bonne organisation.

Pourtant, son « succès » n’a été apprécié que sur un plan quantitatif : une forte mobilisation d’une frange de l'électorat de droite et seize millions d’euros récoltés.

Au final, elle assure à François FILLON une légitimité catégorielle, celle d’une fraction de la droite, qualifiée de conservatrice. Le nombre de suffrages obtenus au second tour par le vainqueur de la primaire représente en effet 8,3% des suffrages exprimés au second tour de la Présidentielle 2012.

Les primaires constituent en réalité un contresens constitutionnel et idéologique qui en fait une machine à perdre.

Un contresens constitutionnel puisqu’elles renforcent le rôle des partis politiques dans la désignation des candidats à l’élection présidentielle alors même que la réforme constitutionnelle d’octobre 1962 avait voulu en faire un moment de rencontre entre un homme et un peuple.

Le dictat du programme fait oublier l’homme d’Etat qui aspire à la plus haute fonction ; le catalogue de promesses prime sur la compétence ; les intérêts catégoriels sur l’avenir de la Nation.

A droite, il s’agit de reprendre le parti « Les Républicains » par revanche sur le sarkozysme et ses lieutenants. A gauche, il faut sauver le parti socialiste de la débâcle, coincé qu’il est entre un Mélenchon et un Macron ; la France peut attendre, il faut nettoyer les écuries d’Augias.

Certes, beaucoup de politiques justifient l’organisation de primaires par peur d’une division au 1er tour de l’élection présidentielle face à un Front National fort.

La peur incite à contourner la Constitution en passant par le prisme déformant de la primaire ; les médecins n’ont pas le courage de voir le malade en face alors ils changent de lunettes.

La primaire de la droite et du centre a mis en évidence deux stratégies de campagne :

Celle de François FILLON qui a fait campagne pour un segment dur de la droite, au risque de devoir édulcorer son discours au moment de sa rencontre avec le peuple de France ; sauf à penser que la gauche a déjà perdu et qu’il sera élu, au moins par défaut.

Celle d’Alain JUPPE qui a préféré tenir, dès la primaire, un discours présidentiel. Analysant sa défaite, certains commentateurs on écrit « qu’on rallie son camp avant d’aller draguer chez son concurrent et pas l’inverse » (Alexis VINTRAY – Contrepoints.org).

C’est oublier que le Président de la Vème République ne doit pas être l’homme d’un « camp ». L’un a parlé à une partie de la droite pour contrôler le parti, l’autre a parlé à la Nation pour conquérir la France ; le plus gaulliste des deux n’est peut-être pas celui qu’on pense…

Ainsi la primaire de la droite et du centre a-t-elle été également un contresens idéologique. Au second tour de cette « précampagne » on a vu réapparaître le vieux conflit des Anciens et des Modernes avec, cette fois, la victoire des Anciens.

D’un côté une partie d’électeurs nostalgiques d’un passé du « merveilleux chrétien », en réaction peut être, mais pas seulement, à la montée de l’Islamisme ; de l’autre un électorat plus large pour un candidat mettant en avant « l’identité heureuse ». Formule très vite jugée futile car « De la foi d’un chrétien les mystères terribles d’ornements égayés ne sont point susceptibles « (Boileau – Art Politique Chant III). 

Comble du paradoxe, le candidat le plus âgé a été celui qui a su rassembler le plus grand nombre de jeunes.

La primaire de la droite et du centre a réveillé un conflit générationnel majeur.

D’une part, des « Jeunes avec Juppé » scrutant les horizons lointains, d’autre part des personnes « établies » ayant la vision purement comptable que leur confère leur situation.

Un conflit des Anciens et des Modernes, un conflit des générations mais aussi la résurgence de la Religion dans le débat politique. La loi sur le mariage pour tout a été le prétexte à cette réapparition ; le « choquant » et le « contre nature », avec un rappel permanent des origines chrétiennes de la France, sont venus polluer le débat politique d’une République laïque.

Au journal télévisé de France 2, le 3 janvier 2017, François FILLON s’est ainsi défendu de remettre en cause le modèle social français en rappelant qu’il était « gaulliste et chrétien ».

Le spirituel vient au secours du temporel.

Le candidat choisi est déjà contesté.

La primaire de la gauche est tout autant une machine à perdre. Les « pré » candidats s’acharnent à déclarer qu’ils veulent sauver le parti socialiste alors qu’il s’agit de sauver la Nation.

Ils déclarent tout faire « contre » la droite et l’extrême droite alors qu’il s’agit de proposer « pour » l’avenir de la France.

Les primaires obligent les candidats qui s’y prêtent, à se tromper de discours et de programme en passant par le sas déformant des comités « Théodule », celui qui vous oblige à vous alléger de vos ambitions nationales de rassemblement avant d’embarquer pour la Présidentielle.

Les primaires constituent ainsi un prisme clanique, un exercice de réduction catégorielle. Elles catalysent les rancœurs et obèrent l’avenir d’une Nation qu’il faut, plus que jamais, rassembler et même retrouver.

Elles sont une machine à perdre pour les candidats mais, beaucoup plus préoccupant, pour une jeunesse sacrifiée.

 

  Thierry LHERMITE


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2 réactions à cet article    


  • Alren Alren 21 janvier 2017 16:39

    J’espère bien que les crypto-droites de la rue de Solférino, usurpateurs scandaleux du joli mot de « socialiste », vont prendre une déculottée historique !


    • Le421... Refuznik !! Le421 22 janvier 2017 11:50

      @Alren
      Ce qui serait bien, mais je rêve, c’est que la leçon soit tirée et que les postulants respectent leur parole donnée.
      En cela, il y a fort à parier que Fillon tiendra ses promesses de stopper l’ISF et de mener les français « à la trique », ce qui, si il est élu, ne sera que ce qu’ils méritent.
      Quand aux autres...
      Quelle serait la légitimité d’un Mélenchon faisant le contraire de ce qu’il a dit, porte parole qu’il est d’un mouvement de population tout à fait conséquent.
      Macron, pas de risque, il a un discours générique qui n’engage qu’à peu de chose.
      Le Front National, c’est un peu pareil, la navigation à vue et en fonction du vent est de rigueur.

      Au hasard Balthazar, devise du français de base !!

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