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Accueil du site > Culture & Loisirs > Étonnant > Le déplacement d’un concept

Le déplacement d’un concept

 

La mobilité

 

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Une époque résolument moderne change de concept comme de devise. Les mots se promènent au gré des fantaisies des faiseurs de miracle. Ils vont et viennent, changent d'acceptation ou bien de désignation pourvu qu'ils soient passés entre les mains des gens d'influence. Il suffit de peu du reste pour qu'un terme chasse l'autre, que cet autre tombe en rade et qu'un nouveau surgisse dans des bouches qui se complaisent à répéter les mêmes fadaises.

Le langage est devenu un vaste jeu de construction dans lequel s'empilent les truismes, les contre-sens, les inepties pour cesser d'appeler un chat un chat afin de le désigner autrement. Le mouvement seul est garant de modernité au risque de prendre des termes boiteux pour désigner ce qui jusqu'alors se concevait merveilleusement bien.

Des officines travaillent d'arrache langue pour prendre à contre-pied les expressions anciennes, les formules d'autrefois qu'il convient de rouler dans la farine avant que de les envoyer au royaume des mots obsolètes, désuets, ringards, archaïques au cas improbable qu'il y ait encore des locuteurs pour user de ce vocable.

Le déplacement a fait son temps. Après être passé de la lenteur du pas de l'humain à la célérité de la lumière, le voilà condamné à l'immobilisme, refusant de s'adapter aux exigences de son temps. Il manque de souffle et d'énergie, demeure trop soucieux de se mouvoir dans un cadre fonctionnel. Dépourvu de fantaisie, il a dû s'incliner, laisser la route libre à plus astucieux que lui.

Le transport a été jugé trop commun d'autant que son port avait de quoi offenser certains. Il ne pouvait plus couler des jours heureux, cessant d'être sur de bons rails. Il supposait trop de rigidité dans son expression tout en se gonflant d'une emphase qui supposait du fret. Il eut son heure de gloire avec un ministère qui depuis belle lurette, a mis la flèche sur le côté.

Non décidément, rien ne vaut la mobilité. Elle fleure bon les parfums des champs, se pare d'un air de liberté, se distingue par les mille et une manières de se mouvoir à son bon vouloir. La mobilité qui se respecte sera douce sans que nul ne vienne nous préciser que ce serait une mobilité dure, rêche ou bien rude. Les meilleurs concepts doivent rester flous pour avoir une chance de prendre le bon wagon.

La mobilité qui se respecte sera alternative sur courant continu, histoire de recharger ses batteries le nez au vent. Les faiseurs de miracle en connaissent un rayon, il suffit de pondre une pensée pour qu'elle devienne une évidence, en dépit des contraintes, des absurdités et des obstacles qui se trouvent sur sa route.

Soyons donc tous doucereusement mobiles et si possible avec un mobile fiché sur l'oreille afin que les pouvoirs publics contrôlent en permanence nos déplacements. Curieusement demeurent les frais de déplacement alors que leurs homologues de mobilité n'ont pas encore vu le jour. Question de patience sans doute à moins que pour cette notion dépassée, l'usager soit bientôt de la revue.

Le mobile du futur crime environnemental est tout trouvé. Il a son double sens, son alter et go sans se soucier des conséquences pour les terres rares et les esclaves qui eux, sont enchaînés à leurs mines infernales. Ne déplaçons pas le problème je vous en prie, les effets collatéraux ne sont en rien de la responsabilité des créateurs d'illusion. Tant que la mobilité a le vent en poupe, les marchands de tout et surtout de n'importe quoi remplissent leurs comptes courants.

La mobilité sans mobile apparent devient le plus bel exemple des déplacements de sens. Pourquoi ne pas redonner place au transport amoureux, le seul qui ne requiert pas la moindre énergie fossile ? Quoiqu'à bien y songer, tout est désormais possible.

À contre-sens


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8 réactions à cet article    


  • juluch juluch 6 juin 2023 14:06

    a quant les voitures volantes ??


    • C'est Nabum C’est Nabum 6 juin 2023 15:02

      @juluch

      Bientôt
      Ainsi le ciel pourra nous tomber sur la tête


    • OJBA 6 juin 2023 20:29

      « Les meilleurs concepts doivent rester flous ». Ben oui, comme ça, on peut leur faire dire ce qu’on veut, en taxant son interlocuteur d’ignare parce qu’il n’a pas compris. D’une pierre 2 coups, 1) on se valorise en utilisant un pseudo néologisme, 2 ) on démolit l’autre. Aujourd’hui, la précision est un défaut. Pas étonnant que du point de vue technique et industriel, on ait un peu de mal.


      • C'est Nabum C’est Nabum 6 juin 2023 21:43

        @OJBA

        Bien vu
        Je me targue de précision et ainsi je m’exclus de cette société du vague


      • Aita Pea Pea Aita Pea Pea 6 juin 2023 22:59

        Faut relire les pages où Zola décrivait la « bête humaine » . La machine. On en sort moins con.


        • C'est Nabum C’est Nabum 7 juin 2023 07:56

          @Aita Pea Pea

          Insinuez vous que je le suis ?
          Vous me feriez hommage


        • Ruut Ruut 7 juin 2023 11:18

          Le verbe forge la pensée.

          Mal définir les mots c’est mal définir les problèmes.

          Or un problème mal définit est un problème mal posé.
          Albert Einstein : "Un problème sans solution est un problème mal posé.

          Détruire le sens des mots est le meilleur moyen de détruire la pensée et par conséquence de détruire un futur agréable et plaisant pour de plus en plus de citoyens.

          Tous les intellectuels qui détruisent le sens des mots, détruisent au final le futur de nos enfants et notre capacité a résoudre nos problèmes...

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