• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de

sur Israël tout-puissant !


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

(---.---.216.142) 30 juin 2006 17:19

Comme toujours, un tel article déchaine les passions et tourne rapidement à l’invective et à la polémique intolérante entre les pro-palestiniens et pro-isrëliens et tout y passe : l’amalgame entre critique d’Israêl et anti-sémitisme, soutien à la Palestine et islamisme etc...

Essayons de réfléchir posément , sans jugement de valeur et de voir en quels termes le problème se pose et quelles sont les perspectives de long terme. La réalité est contrariante vis à vis de nombreuses thèses officielles.

Tout d’abord, la réponse de la « communauté internationale » d’alors, vis à vis de la « question juive » , comme on disait et du mouvement sioniste, prônant un retour des Israëlites de la diaspora vers la Terre Promise a été formalisée par la Déclaration Balfour de 1917 qui prévoyait l’attribution aux Juifs qui le désiraient d’un foyer ( home) en Palestine.

Rappelons qu’à l’époque, la Palestine dépendait de l’Empire Ottoman, que des accords plus ou moins secrets entre France et Grande Bretagne prévoyaient de la mettre sous mandat britannique.Une partie de la diaspora juive a commencé à y émigrer, par religion, idéologie ou par peur de la poursuite des pogroms en Europe centrale et de l’Est.

L’arrivée au pouvoir d’Hitler en Allemagne et sa politique d’extermination qui s’en est suivie a précipité le phénomène. Tous les réfugiés juifs qui ont pu y échapper, n’ont toutefois pas pris la direction de la Palestine ( USA, Angleterre, Amérique du Sud etc...)

Les colons juifs de Palestine, pour des raisons qui sont les leurs, en sont venus à vouloir se débarasser du carcan anglais en Palestine et se sont organisés à effet de mener une guerre - dont le terrorisme n’était pas absent -, guerre qui a abouti à la proclamation d’un état indépendant en 1948, auquel a été donné le nom d’ « Etat d’Israël ».

Comme souvent en pareil cas, le droit a entériné le fait. Ce point est extrêmement important car il a inscrit dans le paradigme israëlien la force et le fait accompli. Depuis 1948, Israël s’est développé par la force (plusieurs conflits successifs contre les voisins arabes ), par l’immigration (développement du mouvement sioniste), et le soutien du monde occidental. L’URSS, d’abord favorable car elle voyait dans le collectivisme des kibboutzim une réplication de l’organisation communiste, a pris rapidement par la suite le parti du monde arabe.

L’objectif avoué des Israëliens était la constitution d’un Grand Israël et s’est organisé et armé pour constituer une puissance invincible, face à un monde arabe largement désorganisé et pauvre.

Mais que s’est-il passé et en quoi cette vision a t-elle trouvé ses limites ?

Les facteurs sont nombreux.Pour l’essentiel :

d’abord le démographie :l’émigration s’est ralentie a un point tel que le flux migratoire est devenu négatif. Si l’on y ajoute que la fertilité est nettement plus importante dans le monde arabe,Israël est sur la voie du déclin.

le monde arabe a gagné en puissance financière, grâce notamment au pétrole, alors qu’Israël n’équilibre que grâce à des soutiens extérieurs, étatiques ou privés. Par ailleurs, il s’est organisé des états, artificiels au départ, mais où des sentiments nationaux sont nés ( en témoigne l’Irak, la Syrie...)

l’oubli naturel. Si Israël disposait au départ d’un capital de sympathie, notamment lié au malheur des Juifs en Europe occupée, ces événements sont à présent vieux de 60 ans.

Le discrédit. La Palestine y est pour beaucoup. La politique israëlienne vis à vis des Palestiniens ( c’est encore le cas ces jours-ci ) a aliéné à l’Etat Hébreu de nombreuses sympathies. Transformer la bande de Gaza en camp de concentration porte un coup terrible au souvenir du martyre juif. Peut-on rappeler l’esclavage chez Pharaon quand on traite les Palestiniens de même manière ?

le banditisme. Israël a trop facilement donné refuge a de nombreux criminels et escrocs dès lors qu’ils étaient Juifs et apportaient des fortunes ( Flatto Sharon qui s’est même fait élire à la Knesset, mafias russes ) sans compter les circuits d’argent sale (affaire du Sentier ) ou les gorilles des barons de la cocaine en Colombie etc....

enfin, phénomène récent mais en fort développement, l’islamisme.

Le premier dirigeant israëlien à avoir pris conscience de cette évolution défavorable est Ariel Sharon, parce que militaire, il possédait la lucidité du stratège - fût-elle cynique - face aux politiques. Par ailleurs, général prestigieux et ayant fait ses preuves, il était capable de « tenir » les militaires.

D’où son revirement final du faucon à une politique de repli maîtrisé qu’il imposait non sans mal à ses compatriotes. Mutatis mutandis, cette évolution rappelle celle de De Gaulle dans l’affaire algérienne.

Le parallèle n’est pas sans intérêt car l’affaire palestinienne n’est pas sans rappeler l’Algérie : situation asymétrique d’une puissance dominante qui impose un statut quasi colonial à un territoire, rebellion fondée sur un nationalisme à fort paramètre religieux, dégradation de l’environnement politique international d’où possibilté de victoires tactiques provisoires qui masquent mal l’impasse stratégique.

Rappelons qu’en Algérie, à force de « nettoyages », de bataille d’Alger, d’arrestations de responsables ( Ben Bella), d’isolement du territoire par des barrages, la France - ou certains Français - estimaient l’Algérie « pacifiée ». En réalité, la bataille politique a été perdue, avec le résultat que l’on sait.

La réalité heurte de front le paradigme israëlien. D’ailleurs, il a suffi de quelques mois, après l’évacuation de Gaza pour que la Palestine porte au pouvoir ce qui pouvait apparaïtre comme le plus anti-israëlien, à savoir le Hamas.

L’incursion en territoire israëlien, la destruction du fortin,de blindés, la capture d’un militaire est un électrochoc : vulnérabilité du territoire en dépit de mesures sur-sécuritaire, capacité des Palestiniens de mener des raids-commando contre des cibles « dures »...Jusqu’ici, seule l’armée israëlienne se croyait capable de telles opérations.

La résistance n’est donc plus « terroriste » qui s’attaque aux cibles « molles » mais militaire, capable d’action d’éclat à fort impact psychologique et à implication internationale.

Face à celà, le grand problème d’Olmert est que civil et politicien,il paraît moins capable que « Sharon-De Gaulle » d’imposer une solution politique à ses militaires. Rappelons qu’en Israël, la gloire militaire est un chemin privilégié vers le prestige et les hautes destinées.

Pourtant, s’enferrer dans la même politique serait une erreur. Ceux que la stratégie intéresse pourront constater qu’à l’époque moderne, les adeptes de Clausewitz ont toujours été perdants face aux adeptes de Sun Tzu (Indochine puis Viet-Nam, Algérie, Afghanistan, Irak.. la liste est longue )

Simple question de bon sens : la bombe atomique, si elle existe, ne peut rien contre le désir de vengeance, pour un bâtiment de l’université islamique de Gaza détruit, combien de nouvelles vocations islamistes chez les Palestiniens ?

Il est d’évidence plus que temps pour Israël de comprendre que, depuis 1948, le monde a beaucoup changé et qu’une véritable survie du pays à long terme passe par une coopération avec son environnement arabe. L’Etat Hébreu a t’il gagné ou perdu à coopérer avec l’Egypte ou la Jordanie ?

D’autant que le temps presse : la réserve prudente que vient afficher l’Amérique face aux événements, plutôt qu’un habituel soutien inconditionnel est un signal à ne pas négliser. Et rien n’indique que ce soutien américain sera éternel, Les présidentielles sont pour bientôt...

C’est donc la voie des négociations que la « communauté internationale » doit indiquer, voire imposer car l’alternative est claire : soit Israël poursuit sa chimère et, bombe atomique ou pas, se dissoudra dans la démographie, soit le parti de la raison l’emporte et l’Etat Hébreu a beaucoup à apporter dans les processus de développement des pays du Proche Orient.


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès