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Commentaire de shadrack

sur Après les élections européennes, petit voyage dans la laideur de la modernité


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shadrack shadrack 2 septembre 2019 16:02

@Christophe Hamelin

Comme promis, je vous réponds. J’ai relevé quelques mots-clés dans vos propos.

 néant du progrès
 décadence
 totalitarisme
 fascisme
 aliénation
 haine du peuple
 population abrutie

Ce qui me frappe est votre absence de discernement constitutif de votre idéal révolutionnaire exalté.

Le néant du progrès consiste de facto à nier e.g. toutes les avancées acquises en matière de santé publique : l’allongement de l’espérance de vie en constitue un exemple concret. De même, et toujours à titre d’exemple, le numérique qui nous permet d’échanger. Tout ce qui excessif est insignifiant, c’est ici un euphémisme.

Le totalitarisme que vous évoquez en France est pour ma part le fruit d’une profonde contradiction intellectuelle. Par définition, un totalitarisme récuse toute opposition (via un parti unique), ce qui n’est factuellement pas du tout le cas de la France qui est en ce sens, et ne vous en déplaise, une démocratie représentative. Si vous avez bien le droit de souhaiter une démocratie plus participative, il ne vous appartient pas de truquer le concept des systèmes politiques, a fortiori à l’aide d’une profonde incohérence pour ne pas dire un contresens.

Vous critiquez globalement l’école, sa fonction et sa destination. Mais vous faites là encore preuve d’une totale incohérence : comment qualifier la quête du savoir de fascisme et d’aliénation quand e.g. Hugo écrivait « la liberté commence où l’ignorance finit » ? Vous ne pouvez pas faire l’apologie du « tonus intellectuel sur les ronds-points » (sic) tout en niant la possibilité de ce même tonus intellectuel que seule autorise l’acquisition du savoir. L’élévation intellectuelle et culturelle ne se fait pas par enchantement et on ne peut pas avoir une chose et son contraire.

Vous citez Marx, que je considère pour ma part comme un grand penseur en philosophie politique. Mais qui peut nier que celui-ci s’est factuellement et totalement trompé en théorisant que le capitalisme portait en ses gènes les conditions de sa disparition au profit de l’avènement nécessaire et automatique du communisme ? Ce même communisme qui, a propos de totalitarisme, a montré toute l’étendue de son absolutisme à travers les deux plus grands criminels de l’histoire que furent Mao Zedong et Joseph Staline. Et ce même communisme qui a globalement disparu, rejeté par l’ensemble des sociétés humaines pour les raisons évoquées. A cet égard, des gens comme Claude Lefort ou Cornelius Castoriadis ont parfaitement montré que les germes du totalitarisme étaient bien présents dans la pensée de K. Marx, quelque soit par ailleurs sa pertinence en matière de lutte des classes, nécessaire pour réguler le capitalisme. Il en va de même pour l’absurdité qui consiste à qualifier le fonctionnement actuel de la France de fascisme puisque ce système politique s’oppose de facto à toute démocratie parlementaire. Encore une fois, soyons sérieux. 

Je vous rejoins sur un point : le capitalisme porte bien en lui une certaine destruction des traditions en étant voué à l’innovation permanente, comme l’ont montré e.g. K. Marx ou M. Heidegger. Paradoxalement, le capitalisme est plus destructeur des traditions que les mouvements pseudo-révolutionnaires comme Mai 68 qui ont in fine contribué à accroître la puissance de la société de consommation sur les individus. En ce sens, des slogans comme « jouir sans entraves », « sous les pavés la plage » ou « il est interdit d’interdire » sont d’obédience typiquement libérale. JP Sartre s’est bien moqué du monde.

Je suis pour ma part adepte de la mesure et du compromis. « Etre de gauche, être de droite, c’est être hémiplégique » dixit e.g. R. Aron. En ce qui me concerne, la pire aliénation se trouve dans les positions dogmatiques, intransigeantes, excessives... Dans son ouvrage phare, Tocqueville a parfaitement théorisé ceci : privilégier la liberté se fait toujours au détriment de l’égalité ; privilégier l’égalité se fait toujours au détriment de la liberté. La démocratie n’est pas exempte de défauts (cf. le célèbre mot de Churchill) mais elle est porte en elle les fruits du dialogue indispensable à l’équilibre entre les êtres humains. Et, que vous le vouliez ou non et si les mots ont un sens commun, la France est bien une démocratie.

Cordialement. 

 


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