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Commentaire de Alren

sur Comment propager l'ignorance ?


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Alren Alren 27 octobre 2016 16:38

@Fergus

Tant que l’on continuera à admettre en 6e des élèves qui ne maîtrisent pas la lecture, l’écriture et le calcul,

Ces trois termes sont ambigus. Il faudrait préciser ce que l’on entend pour chacun d’eux.

Qu’est-ce que maîtriser la lecture ? déchiffrer une texte ou le comprendre ?

Si l’on parle de déchiffrer, ce qui doit être commencé au CP et achevé au CE1 par la capacité à lire n’importe quel mot inconnu et long (par exemple un nom de dinosaure ou de médicament) en analysant les syllabes qui le composent, c’est le passage en CE2 qui doit être différé et non attendre la sixième pour ça.

Le problème est alors le refus des parents du redoublement par refus de la réalité, à savoir que leur enfant n’est pas aussi intelligent qu’ils le croyaient, ce qui leur cause beaucoup de souffrance morale et qu’ils préfèrent nier en mettant en cause les enseignants et leurs méthodes.

Comme par ailleurs une certaine démagogie, ou plutôt une démagogie certaine, fait des parents des intervenants incontournables dans l’école, des partenaires obligés et comme le redoublement d’enfants qui sont d’un moindre intérêt pour les gouvernants vu qu’ils ne seront pas des travailleurs brillants, coûte cher, il n’y a plus de redoublement.

On peut d’ailleurs mettre en cause l’effet négatif sur le comportement d’un garçon, de son redoublement pur et simple qui consiste à la rentrée à le mettre, lui qui a quand même suivi une année de CE1 au même rang que les « petits » arrivant du CP.

Mais hormis dans les écoles à gros effectifs, il est matériellement impossible de créer une classe transitoire entre CE1 et CE2. Par ailleurs on sait que les classes à deux niveaux exigent beaucoup d’effort de l’enseignant(e) et que les résultats sont néanmoins inférieurs à des classes à un niveau si les effectifs sont les mêmes.

La solution seraient de détacher des enseignants en soutien spécifique de ces élèves, travaillant en très petits groupes. Ce qui nécessiterait des créations de poste et un budget approprié allant en sens contraire des souhaits d’austérité de l’UE pour les écoles publiques.

Si l’on parle de saisir les subtilités du texte lu, c’est tout autre chose !

Et c’est en cela que les différences d’origines sociales vont créer des différences qui ne pourront pas être comblées à l’école primaire que quittent des enfants de dix ans (il faut se souvenir de ce jeune âge que les gens confondent avec les quatorze et souvent quinze ans des élèves d’autrefois qui restaient en primaire jusqu’au certificat d’études).

Au mieux le handicap culturel des enfants des milieux défavorisés ne pourra être comblé qu’en fin de lycée après des années d’enseignement secondaire et à la condition expresse que ces élèves d’une bonne intelligence empathique dévorent les livres et soient intéressés par les études de texte.

Une tradition élitiste incite les professeurs de français à ne proposer à l’analyse de la classe que les textes des "grands écrivains" du passé, dont l’univers mental et les références culturelles sont sans rapport avec ceux des élèves ordinaires ou culturellement défavorisés.

Une grosse partie du travail du professeur est alors de donner le sens de mots inconnus, et ensuite d’analyser la « psychologie » des personnages ou de démasquer les non-dits de l’auteur qui sont souvent en référence avec une époque et un milieu social inconnu des jeunes d’aujourd’hui.

C’est une façon trop étroite d’étudier la langue française écrite. Il serait beaucoup plus intéressant de continuer au collège les « livres de lecture » du primaire en collectionnant des textes de diverses origines y compris des textes didactiques de sciences (science naturelles), d’histoire, de géographie mais aussi humoristiques, de science-fiction etc. L’objectif étant moins de lire rapidement que d’analyser le sens et les informations qu’ils contiennent.

Qu’entend-on par « savoir » écrire ?

Autrefois, on entendait par là maîtriser la calligraphie. Et bien entendu, ce n’est pas le sens que l’on donne aujourd’hui qui est de rédiger un texte cohérent dans un français correct.

Là non plus, comme pour le vocabulaire orthographique, la solution est de lire, lire, lire tout ce qui passe à portée comme Cavanna quand il était enfant et comme il le raconte dans son roman autobiographique : Les Ritals. Il faut aussi de la mémoire !

Mais pour devenir un bon rédacteur si cela est nécessaire, cela n’est pas suffisant. il faut aussi du talent qui ne s’apprend pas mais se révèle à ceux et celles qui écrivent beaucoup. Car tout entraînement est profitable.

Mais comme pour la compréhension profonde d’un texte, cela ne peut être acquis à dix ans. C’est au collège qu’incombe l’essentiel de cette tâche difficile et au lycée de peaufiner les acquis.

Au lycée, on devrait entraîner les étudiants à écrire en différents styles selon le sujet. Ce n’est pas fait.

Qu’entend-on par « savoir » compter ?

Évidemment pas de faire des opérations mécaniquement en appliquant un algorithme sans connaître sa raison d’être. Mais résoudre des problèmes d’après un énoncé, un texte sans illustration ni manipulation. Or cela est extrêmement difficile pour un jeune cerveau alors qu’à quinze-seize ans cela paraîtra évident. En fait le « calcul » à l’école primaire devrait toujours se faire à travers une manipulation concrète ou à tout le moins avec un support visuel. De ce point de vue, les ordinateurs et tablettes correctement programmées devraient être d’une grande aide.

En résumé, pour l’entrée en sixième, l’exigence en mathématique devrait être une attitude active de l’élève devant un problème soluble par une manipulation ou un support visuel. Et de cela je pense que pratiquement tous les élèves en sont capables si on les a habitués à ne pas rester passifs (« J’y comprends rien ! »).

Il est utopique que des enfants de dix ans sachent écrire un texte élégant et plein d’idées sur n’importe quel sujet sauf à être particulièrement doué et surtout être issu d’un milieu très cultivé et s’intéressant de près à sa réussite scolaire ( typiquement un couple d’enseignants comme parents !).

Il en est de même pour l’orthographe des mots qui ne peut être correcte que s’ils ont été « photographiés » par les élèves au cours de leurs lectures. Lesquelles chez un enfant de dix ans qui ne lit couramment que depuis trois ans ne peuvent être considérables, sans rapport avec ce que doit avoir lu un étudiant de dix-huit ans.

En revanche les règles de base de l’orthographe grammaticale doivent être connues (accord sujet verbe, nom-adjectif, verbes courants au temps et mode courants).

Mais il faut que les élèves lisent facilement tout texte, en arrivant en sixième, pour tirer plaisir de cette occupation qui est la clé de la réussite scolaire.


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