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Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > « The Fabelmans », film pas si fabuleux…

« The Fabelmans », film pas si fabuleux…

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Portrait de David Lynch à l’UGC Odéon, Paris

Sacré Lynch, toujours dans les bons coups, je descendais l’autre jour l’escalier conduisant à la salle 1 de l’UGC Odéon (Paris, ©photos V. De.) pour voir le dernier Spielberg (76 ans), son 33ème long métrage, The Fabelmans, et sur qui est-ce que je tombe ? Via un beau portrait noir et blanc signé Patrick Swirk, je vous le donne en mille : non pas l’auteur du film en question, mais David Lynch himself  ! Enfin, son image... Belle gueule vintage, aux cheveux broussailleux « artiste ». Or, qui interprète John Ford, connu tant pour ses films dont certains devenus des classiques telle La Prisonnière du désert (1956) que pour son caractère de chien, dans ce film autobiographique, si bien d’ailleurs qu’il en est méconnaissable ? Mister Lynch, bandeau noir sur l’œil tel un contrebandier et cigare aux volutes épaisses aux lèvres, en personne ! Alors, façon hasard ou coïncidence à la Lelouch, et sans pour autant jouer au mage, je me suis dit que l’esprit surréaliste par association d’idées, nettes ou brumeuses, voire fumeuses !, était bien ce qui habitait cet imagier insolite, oscillant définitivement entre rêve et réalité, à la fois cinéaste et peintre, puis désormais acteur - qu’il est bon en John Ford, vieux loup de mer des grandes majors hollywoodiennes (MGM, Paramount, Warner, Fox, RKO) d’origine irlandaise, héraut flamboyant de l’âge d’or du cinéma américain, bien connu certes pour ses westerns légendaires, de La Chevauchée fantastique aux Cheyennes en passant par La Charge héroïque, sans oublier l'une de ses figures de proue, un certain John Wayne, simple accessoiriste au départ dont il fera par la suite une immense vedette mondiale, mais également pour d’autres genres majeurs du cinéma américain, avec des acteurs phares (Ava Gardner, Grace Kelly, Maureen O’Hara, James Stewart, Fredric March, Henry Fonda, Clark Gable, Spencer Tracy), tels que la comédie, le film d’aventure, le récit historique, le mélodrame ou encore le film de guerre.

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David Lynch est John Ford, « The Fabelmans »

D’ailleurs, Steven Spielberg, et ça transparaît dans ce film (… testament ? Que nenni, on lui souhaite de vivre encore longtemps !), est un grand nostalgique de ce cinéma des studios hollywoodiens d’antan. Dans un Télérama récent (#3813, février 2023, p. 8), lorsqu’on lui demande ce qui lui manque à l'heure actuelle en tant que cinéaste, il répond aussitôt : « Je n’ai jamais eu la chance de réaliser un film avec Spencer Tracy, James Stewart, Clark Gable, Lana Turner, Katharine Hepburn, Gloria Swanson… Ma génération a commencé à travailler à Hollywood après plusieurs grandes générations d’acteurs et de scénaristes, et je suis très nostalgique de n’avoir pas pris part à cet âge d’or. » Puis, avant Lynch, il avait déjà fait appel à certains de ses pairs dans de précédentes réalisations, tels feu les cinéastes François Truffaut et Richard Attenborough pour respectivement Rencontre du troisième type (1977) et Jurassic Park (1993).

Entre nous, la leçon, certes brute de décoffrage, que le vétéran Ford via Lynch, pirate à l'œil de lynx, donne dans les studios CBS au p'tit jeune qui veut percer à Hollywood (un certain Steven issu de l’Ohio, né à Cincinnati en 1946 et passé par les routes de l’Arizona, obnubilé par la télévision et le cinéma, avec Duel, 1971, en ligne de mire), en se penchant sur la question de savoir où placer la ligne d'horizon pour rendre son cadre attractif, qu'il soit pictural ou cinématographique, est excellente ! Le tout dernier plan du film montre d’ailleurs son petit héros, homme-fable (Sammy/Steven) chétif, espiègle et réservé (on pense au Michael J. Fox de Retour vers le futur (1985-1990), saga rétro-futuriste produite par le tycoon Steven), poursuivant son chemin dans un cadre où l’horizon est placé très bas ; Spielberg a écouté Ford : la ligne d'horizon, placée en haut ou en bas, mais jamais au milieu ! « Quand l'horizon est en bas, c'est intéressant. Quand l'horizon est en haut, c'est intéressant. Quand l'horizon est au milieu, c'est chiant comme la pluie. » La séquence est forte, la meilleure du film selon moi, ça tombe bien car c’est la dernière et on part de la salle avec cette leçon bien en tête - merci John, David et Steven, donc.

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L’horizon très bas, fin de « Fabelmans »

« Presque tous mes films sont basés sur quelque chose qui est arrivé dans mon enfance », dixit Spielberg. Et celui-là, en racontant l’enfance du réalisateur, amoureux de films bigger than life sur fond de famille dysfonctionnelle, l'est plus que jamais : dans cette famille des Fabelmans, qui couve un secret, le petit Sammy, alias Steven, de l'enfance à l'adolescence, passe son temps avec une petite caméra 8 mm à tourner des saynètes avec ses sœurs se prêtant volontiers au jeu, pour le fun. Mais si sa mère Mitzi, dotée d'un tempérament artistique, l'encourage dans cette voie, c’est même elle d’ailleurs qui, amatrice de tornades, comprend vite que son enfant, s’intéresse, désir scopique à l’œuvre (« J’ai besoin de voir un accident », dit-il), moins au petit train percuté par la voiture qu’au fait de pouvoir regarder sans fin, en la figeant dans un film, cette spectaculaire scène de l’accident, en tant que sensation forte, comme il l’a vue enfant au cinoche avec un train qui déraille dans Sous le plus grand chapiteau du monde (1952) de Cecil B. DeMille, son père Burt, plus carré (scientifique accompli, génie de l’informatique aux découvertes annonçant l’avènement des ordinateurs), lui, voit davantage cette passion comme un passe-temps. Mais, plus les années passent, plus Sam se montre épris de sa caméra, au point de devenir le documentariste officiel de l'histoire familiale ! Malgré, lorsqu'il est ado, une mise en garde de son décalé oncle Boris, Judd Hirsch jouant de manière un peu forcé le foufou (« L’art fait mal, comme un lion qui t’arrache la tête. L’art te vaudra des couronnes au paradis et des lauriers sur Terre, mais il t'arrachera le cœur et te laissera seul  »), s'inscrivant dans la lignée d'ailleurs de ce que lui déclarera plus tard, fort bougon, Ford (« Il paraît que tu veux faire des films ? Ce business va te bousiller »), Sam s'entête enchaînant les courts métrages de plus en plus sophistiqués, avec frangines et amis. Mais lorsque ses parents décident, pour raison professionnelle (une grosse opportunité pour le père, la mère, ex pianiste de concert, est femme au foyer), de déménager dans l'Ouest du pays (le film se déroulant sur trois sites : New Jersey, Arizona, Californie), c'est alors que Sammy va découvrir, au sein de la maisonnée supposée protectrice, une réalité bouleversante sur sa mère le conduisant à la voir différemment et à bousculer sérieusement ses repères quant au monde plein de faux-semblants des adultes.

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« The Fabelmans », la salle de cinéma comme refuge et révélateur

Comme bon nombre de ses confrères cinéastes ces derniers temps (Tarantino, James Gray, Paul Thomas Anderson, Damien Chazelle, Sam Mendes), Steven Spielberg, nostalgique, se replonge dans ses souvenirs d'enfance pour remonter aux origines de son amour, de jeunesse et pour toute la vie, à l’égard du cinéma (argentique), ce tropisme actuel manifeste venant certainement d’ailleurs de leur crainte légitime de voir le cinoche en salle disparaître au profit des films vus à domicile via les plateformes SOVD ou sur les téléphones et autres écrans domestiques. On suit ici, sur plusieurs années, de 1952 à la fin des années 1960, le fil de son inspiration, qui n'est pas sans accrocs malgré un cadre de vie aisé, l’axe narratif fonctionnant tel un récit d’apprentissage s’enroulant autour de trois temps forts : la découverte du cinéma, la séparation des parents, agissant tel un trauma (on retrouve ce choc entraînant catastrophe affective et chaos dans The Son de Florian Zeller en salle aussi actuellement), et la judéité.

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Affiche promotionnelle pour « Fabelmans »

Nous voilà plongés dans la matrice spielbergienne pendant plus de deux heures 30, ce qui n'est pas déplaisant, mais sans plus. Concernant ce long métrage de Spielberg, boudé aux States par le public (un four monumental !) mais adoubé, excessivement selon moi, par la critique, exagérément extatique, et la profession (deux Golden Globes 2023, dont celui du meilleur film dramatique et du meilleur réalisateur + en lice dans sept catégories aux Oscars 2023, qui se tiendront le 12 mars prochain), tant en Amérique qu’en France (sur l’affiche promotionnelle, « Splendide », nous dit Cinemateaser, « Un très grand film » ajoute France Inter, puis « Magnifique lettre d’amour de Spielberg au cinéma  », surenchérit Le Figaro - n’en jetez plus !), je suis tout de même partagé.

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« The Fabelmans », Sam en plein montage

D'un côté, il peut se faire très fin, allant dans des zones de flottement étonnantes et intimistes, pas loin du diariste poétique Jonas Mekas (si si, cf. la séquence émotion quand il filme en amateur son père et sa mère, heureux, comme nimbés dans une lumière irisée ainsi que le cocon familial, véritable parenthèse enchantée, bulle de bonheur fugace, avant le choc de la rupture des parents). Il y a aussi ce passage très fort quand le jeune Sam comprend que sa mère trompe son père alors qu’il s’apprêtait à faire le montage d’un simple film de famille, à la demande justement de son paternel et ce pour réconforter sa femme perturbée. Au détour d’un plan, et façon Blow-Up (1966, d’Antonioni, dans lequel le héros, jeune photographe, découvrait qu’il a été le témoin d’un meurtre en développant des photos prises dans un parc de Londres ; déjà, en 1981, Brian de Palma, pote de Spielberg, reprenait ce principe mais par le biais du son (enregistrement sonore) via son citationnel Blow Out, avec John Travolta), le jeune « enquêteur » malgré lui Sam, tel un espion se refusant à voir l'évidence d'un secret de famille, débusque directement dans l’image, façon caméra-vérité (voir la réalité en face par le filtre de l’œil de la caméra, enregistreur brut du réel se donnant à voir sans filtre), l’attirance manifeste de sa mère - elle en est très éprise - pour le meilleur ami de la famille, et collègue de bureau de son père, le blagueur Bennie. C’est très fort de le voir découvrir, alors qu'il est en train d'examiner les photogrammes d'une pellicule en super-8, le secret de sa mère en devant monter ces (maudites) bobines - il n'était pas pressé à l'idée de les revoir - des vacances familiales au camping. C'est une scène-clé, agissant tel un déclic pour le cinéaste en herbe, et infiniment subtile : pas impossible que sa vocation soit née à ce moment-là, dans ce va-et-vient, temps suspendu, entre vérités (le cinéma du réel, appelle-t-on le documentaire) et mensonges (la fiction comme refuge pour fuir une réalité trop lourde à assumer).

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Filmer l’interdit : l’adultère (« Fabelmans »)

Et d’un autre côté, Spielberg avance par moments avec ses gros sabots de « Bon Gros Géant » du système hollywoodien n'évitant pas toujours les ficelles scénaristiques trop visibles ainsi que le tire-larmes chromo au bord du mélo, par trop calibré et cliché, un peu facile, à la Cinema Paradiso, je dirais. Eh oui. Sinon, comme cela a été dit et écrit un peu partout, cet opus autoréflexif et introspectif sur sa passion Cinéma chevillée au corps, celui-ci en est même meurtri (baston avec des abrutis d’antisémites l’accusant de la mort du Christ en Californie, pas si terre d’accueil que ça), agit bel et bien comme un Maxi Best Of de sa dense et éclectique filmographie, et ce pour le plus grand plaisir, j'imagine, de ses fans et des cinéphiles en général, via maintes allusions, dont des trucages faits maison des plus astucieux (tel du PQ pour faire de ses frangines recrutées pour des tournages de fortune des momies ambulantes !), agissant comme autant de clins d'œil à nombre de ses films passés pour la plupart à succès qui, comme invités en creux ici, défilent sous nos yeux, le temps de la projection et après : de E.T. (le placard comme boîte de Pandore) à la saga Indiana Jones en passant par la paire du monstre qui fait peur Les Dents de la mer/Jurassic Park puis La Liste de Schindler, West Side Story (la même période, les fifties, que Fabelmans), Il faut sauver le soldat Ryan, Le Pont des espions et Minority Report (l’investigation), Ready Player One (son film gigogne sur sa culture pop de capitaine d'industrie) ou encore A. I. Intelligence artificielle. Sans oublier bien sûr la trame, et figure, du train électrique – le jouet, le circuit ferroviaire - renvoyant forcément aux origines du cinéma : ce biopic-fleuve (un peu long, les scènes répétitives du mal-être de la mère fantasque), véritable mise en abyme du cinéma - les salles obscures et la réaction des spectateurs fascinés sont souvent filmées -, est une ode au septième art par l’un de ses plus brillants serviteurs et conteurs d’histoires, avec en tête l’iconique Arrivée d'un train en gare de La Ciotat (1896) des frères Lumière, les premiers trucages au cinéma, faits de bric et de broc, du magicien Méliès ou encore la fameuse phrase du cinéaste de la Nouvelle Vague François Truffaut (1932-1984), qui fut d’ailleurs accessoirement acteur pour le metteur en scène US dans Rencontre du troisième type : « Les films avancent comme des trains dans la nuit. »

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« The Fabelmans », jouer à en pleurer

La joie à faire des films (ses proches ou copains boy-scouts s’éclatent à participer au film amateur en tant qu’aventure collective, tournage et temps de la projection - se voir à l’écran en cowboy ou en soldat de la Seconde guerre mondiale - compris) est patente, et contagieuse. Puis, il s’agit aussi, pour le passionné qu’est Sam/Steven, de trouver sa voie et de se révéler, de s’affirmer, en tant qu’individu créatif par rapport aux autres - il est pas mal moqué au bahut - et directeur d’acteurs : cet ado-caméra magnifie à l'image des gestes, tels le beau gosse baraqué blond Logan, ou « homme-séquoia géant » de Californie (pourtant ennemi juré du filmeur qu'il est) se trouvant trop mis à l'honneur et à son avantage, voire déifié (« Tu m’as fait briller à l’écran », dans le film de plage Ditch day, au point d'en être profondément perturbé, ou encore ce jeune non-acteur jouant un militaire meurtri rescapé d'un champ de bataille soudain transcendé, suite aux directives du convaincant et habité Sam le boostant pour qu'il se surpasse et croit en la situation à jouer (des morts partout jonchant le sol), littéralement emporté par son émotion brute, et à fleur de peau, allant bien au-delà de la durée prévue du plan, lors du tournage du film amateur « à gros budget » Escape to Nowhere.

C'est d'ailleurs magnifique, dans ce gros film qu'est Fabelmans produit par le puissant studio Universal, de voir que le fabuliste Steven Spielberg donne autant de crédit et d'importance à ses films-essais d'amateur des débuts (The Last Gun, 1959, Fighter Squad, Escape to Nowhere, 1961, Firelight, 1964....), malgré leurs nombreuses imperfections ! (par honnêteté, un génie aussi doit faire ses armes, dans leur retranscription il ne les corrige pas, assumant le mauvais, le bricolage), qu'à ses productions professionnelles futures bien plus calibrées avec l'immense carton au box-office qu'on leur associe, Spielberg ayant inventé comme on le sait le blockbuster (buzz, marketing viral autour et produit filmique efficace) avec son toujours flippant et enthousiasmant Dents de la mer (Jaws, 1975).

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Sammy/Steven, filmeur-né (« The Fabelmans »)

En gros, j'aurais aimé chialer avec Spielberg, pleurer comme une madeleine la splendeur passée d'un paradis perdu, la fin de l'innocence ou, que sais-je encore, les sortilèges du cinéma comme machine à rêves nous extrayant par les puissances de l'imaginaire d'un quotidien pas toujours folichon, surtout par les temps de sinistrose qui courent, mais je n'y suis jamais arrivé, malgré le personnage fort intéressant à suivre de sa mère (Michelle Williams, lorsqu’elle est éclairée par le faisceau lumineux des phares d’une voiture, difficile de ne pas penser à la superstar Marylin éclairée tout simplement à la lumière des phares d’une automobile lorsqu’elle fut shootée par le photographe André De Dienes, l’anecdote est connue) en femme infidèle, et libre (toute la famille mange continûment dans des couverts, gobelets et assiettes jetables afin de ne pas faire la vaisselle et de ne pas abîmer ses longs ongles vernis !), ainsi qu'en artiste ratée, n'ayant pas donné suite à ses velléités pianistiques, et les yeux embués du père de l'artiste dans le film, joué, certes bien, par l'aguerri Paul Dano (ou J'aime-pas-ta-gueule diraient les Inconnus). Mais, pour ma part, je l'avoue, rien n'y fait, quoi qu'il fasse, chez Spielberg ou ailleurs (Paul Thomas Anderson), cet acteur, avec son air corseté de colin froid (visage banal, lisse, teint blafard), me laisse systématiquement de marbre, je ne le trouve pas passionnant à regarder, trop fade et comme constamment verrouillé de l'intérieur. Désolé, Steven. Pas fana intégralement de ton casting sur ce film-là, donc pas complètement rentré dedans. Je suis resté trop souvent à quai, comme on dit.

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Mitzi Fabelman (Michelle Williams) dans les phares d’une voiture

Bref, il y a plein de bons moments mais l’ensemble, leur addition tout bonnement, ne prend pas vraiment. On souhaiterait être complètement emporté, pris au vu du sujet (un artiste se mettant à nu pour revenir à la genèse de son art) dans des rafales d’émotions, voire bouleversé. Mais non, l’on est juste un peu ému, en se disant que peut-être, malgré la sincérité indiscutable de l’ami Spielberg, sa pudibonderie habituelle de boy-scout wasp à la Norman Rockwell, héritage du pesant puritanisme états-unien ?, le gardant malgré ses efforts de transparence dans sa zone de confort coutumière (cf. le mièvre et attendu « Les enfants, ne regardez pas ! » de Bennie lorsque Burt et Mitzi Fabelman s’embrassent), le « cadenasse » encore de trop pour tirer son film vers un horizon, alors peut-être pas subversif ou disruptif hein (on reste chez Spielby le gentil), mais tout du moins que l’on souhaiterait plus inattendu, et in fine inoubliable. Histoire de pouvoir indiscutablement crier au chef-d'œuvre marquant au fer rouge (du 3 sur 5 pour moi) ; même le score de John Williams, son compositeur attitré, n'a rien de renversant.

Pourtant, à ma connaissance, il arrive parfois au movie maker Spielberg de s'aventurer, quittant alors les autoroutes du « grand public » formaté, vers du miraculeux nostalgique d’une finesse exquise (cf. la maison maternelle comme stase de bonheur perdu dans A. I.) ou, a contrario, vers une noirceur des plus étonnantes, limite dérangeante, affirmant alors son côté obscur avec par exemple son deuxième Indiana Jones (le Temple maudit, 1984) ou sa sombre et crépusculaire Guerre des mondes, 2005. Peut-être pour une autre fois, alors... The Fabelmans, étant selon moi un peu trop lisse, classique et prévisible pour pleinement convaincre. Et, je le répète, le meilleur du film, voire le plus emballant, et ce contre toute attente, car il intervient ici un peu en flibustier, lui qui n'a pas signé de film pour le cinéma depuis fort longtemps (2006), c'est... David Lynch ! En attendant, Spielberg est déjà parti - trop vite ? Il est bon aussi de prendre son temps pour créer, à l’instar du maestro Leone avec son ultime chef-d’œuvre - sur un autre projet : adapter en série (sept épisodes prévus à diffuser sur la chaîne américaine HBO) un scénario de long métrage signé… Stanley Kubrick, qui lui avait déjà inspiré A. I. Intelligence artificielle.

The Fabelmans, 2022, 2h31, États-Unis. Couleur. De Steven Spielberg. Scénario : S. Spielberg et Tony Kushner. Avec Michelle Williams, Paul Dano, Seth Rogen, Gabriel LaBelle, Judd Hirsch, Julia Butters, Sam Rechner et David Lynch. En salle depuis le 22 février 2023.

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4 réactions à cet article    


  • Joséphine Joséphine 6 mars 2023 09:20

    Je ne donne plus un rond à Spielberg, ni à ses cousins de Hollywood depuis belle lurette. Ce qui est inquiétant c’est que Spielberg a déclaré : « je ne fais pas des films pour divertir mais pour informer et éduquer ». Si vous continuez à donner de l’argent à ceux qui vous hypnotisent, ne vous étonnez pas si vous vous transformez en zombie. 


    Les cavernes à hypnose que sont les cinémas furent très bien décrites par Platon !


    • Vincent Delaury Vincent Delaury 6 mars 2023 17:12

      @Joséphine Caverne de Platon, pourquoi pas (la salle obscure...), mais le cinéma, à son meilleur, c’est davantage, en paraphrasant Picasso à propos de l’art, « un mensonge qui dit, dévoile la vérité ». 


    • Coeur de la Beauce Jean de la Beauce 6 mars 2023 11:08

      Un film prétentieux et nombriliste, avec en plus des leçons sur l’antisémitisme présumé des californiens blonds. Caricatural et sans intérêt. Quatorze euros gaspillés dans une séance à l’UGC des Halles à Paris. Une fois pas deux...


      • Vincent Delaury Vincent Delaury 6 mars 2023 17:24

        @Jean de la Beauce « Quatorze euros » certes, mais c’est toujours moins cher que le théâtre et surtout l’opéra, puis il existe les cartes illimitées... smiley 

        « leçons » : perso, je ne trouve pas, il fait juste part de son ressenti, sur place, par le prisme de ses souvenirs. Bon, après, j’imagine que c’est retravaillé avec son scénariste, Tony Kushner, son collaborateur régulier. Puis, sans oublier que Spielberg est le réalisateur de la magistrale « Liste de Schindler » (1993, pour le coup, leçon de vie), accompagnée par la BO de génie de John Williams. 

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