• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > Mylène Demongeot, naturellement chat !

Mylène Demongeot, naturellement chat !

« En douce, [je] vais [au cinéma] autant que je peux, parfois en resquillant quand je n’ai pas d’argent et pour en avoir, je vole dans le porte-monnaie de maman ou bien je supplie mon père qui se laisse faire. Parfois j’arrive à voir deux films le mercredi, deux le samedi et encore le dimanche après-midi… et puis, à cette époque, on peut entrer quand on veut, même si le film est déjà commencé et rester à plusieurs séances. » (Mylène Demongeot, 2007).

L'actrice Mylène Demongeot est morte le jeudi 1er décembre 2022 à Paris, des suites d'une saleté de maladie à l'âge de 87 ans (à moitié ukrainienne et un quart italienne, elle est née Marie-Hélène le 29 septembre 1935 à Nice). Son plus grand malheur aurait été de « mourir sans personne pour me tenir la main », j'espère qu'elle n'a pas connu cela à l'hôpital.

Elle a fait partie de ces comédiennes qui furent, jeunes, des égéries du cinéma et qui, acceptant la progression des années, au lieu de se protéger des projecteurs comme Brigitte Bardot, ont accepté de prendre des rôles de femmes mûres voire de grand-mères, à l'instar de Simone Signoret mais aussi de plein d'autres, Jeanne Moreau, Danielle Darrieux, Line Renaud, etc. et des actrices comme Catherine Deneuve font de même, avec une belle élégance.

Brièvement top model, Mylène Demongeot a suivi le cours Simon sur recommandation de ses amies, où elle a croisé entre autres Guy Bedos, Jean Amadou et Nadine de Rothschild.

À partir de 1953, Mylène Demongeot a multiplié les petits rôles au cinéma et les poses photographiques pour des publicités (son premier mari fut un photographe), et l'une des photographies a convaincu le réalisateur Raymond Rouleau de l'enrôler pour "Les Sorcières de Salem" (sorti le 26 avril 1957), aux côtés du couple mythique Simone Signoret et Yves Montand. Il s'agissait de faire une critique du maccarthysme en évoquant les procès en sorcellerie du XVIIe siècle, une adaptation du roman d'Arthur Miller scénarisé par Jean-Paul Sartre.

Mylène Demongeot a raconté le dernier quart d'heure de tournage avec Raymond Rouleau, en évoquant son personnage Abigaïl Williams, une servante qui, par vengeance, a accusé beaucoup de personnes de sorcellerie : « Sa vie est finie, son échec est total. Elle a fait mourir des tas de gens pour rien (…). "Tu fais ce que tu veux, me dit-il d’un ton rogue. Je ne la tournerai qu'une fois". Piquée au vif, je mets tout mon "art" dans cette prise. Tiens ! Je vais lui montrer ! Je deviens folle de douleur ! Et c'est mon meilleur plan du film, sans aucun doute. En tout cas, mon préféré. Rouleau est tout surpris. Il me semble me souvenir qu'il va même jusqu'à me féliciter… Voilà. Le film est fini. Tout le monde est sur les rotules, surtout Rouleau, mais lui, maintenant, doit s'attaquer au montage. ».

Ce fut un bon succès en salles et chez les critiques, et le film a véritablement lancé la carrière cinématographique de Mylène Domongeot à l'âge de 21 ans, au point de rivaliser avec Brigitte Bardot (qui était par ailleurs son amie). Bien plus tard, dans une émission de radio le 19 août 2009 sur Europe 1, elle confia qu'Arthur Miller avait bloqué ce film (car il détenait les droits d'auteur), ce qui expliquait pourquoi ce film était difficilement trouvable pendant très longtemps, car il voulait se venger d'Yves Montand, scandalisé par sa liaison avec Marilyn Monroe, son épouse.

À la différence de Brigitte Bardot, Mylène Demongeot a tenté de diversifier ses rôles, mais les plus appréciés étaient toutefois ceux de la jeune femme blonde sensuelle. Elle a joué notamment dans "Bonjour tristesse" d'Otto Preminger (sorti le 15 janvier 1958), l'adaptation du premier roman de Françoise Sagan, avec Deborah Kerr, Jean Seberg et David Niven ; "Sois belle et tais-toi" de Marc Allégret (sorti le 7 mai 1958) avec Béatrice Altariba, Henri Vidal, Roger Hanin, Darry Cowl, Robert Dalban et deux débutants, Jean-Paul Belmondo et Alain Delon (Roger Vadim en a fait le scénario pour Brigitte Bardot et comme elle ne pouvait ou voulait pas le tourner, ce fut Mylène Demongeot qui l'a remplacée : « Film gentil. Film charmant. Comédie bébête qui marchera bien commercialement et m’apporte encore de nouveaux admirateurs, mais film que je n’aurais jamais dû faire. ») ; "Les Garçons" de Mauro Bolognini (sorti le 12 novembre 1959) avec Laurent Terzieff, aussi Jean-Claude Brialy ; "La Bataille de Marathon", un péplum de Jacques Tourneur, Mario Brava et Bruno Vailati (sorti le 3 décembre 1959) avec Steve Reeves.

Mylène Demongeot est devenue une star populaire très appréciée après la sortie de deux séries de films très célèbres, celle des "Trois Mousquetaires" de Bernard Borderie, avec, entre autres, Gérard Barray, Georges Descrières et Jean Carmet (sortie en octobre 1961), elle jouait Milady de Winter, et celle des "Fantomas" d'André Hunebelle, avec Louis de Funès et Jean Marais (sortie entre 1964 et 1967). Ces deux séries sont les plus mémorables souvenirs populaires pour Mylène Demongeot. Sur le tournage de "Fantomas", l'actrice a témoigné : « Avec [Louis de Funès], on travaille dur sur le rythme, mais c’est payant. Il est exigeant et il a raison. J’aime ça. Hunebelle est un vieux monsieur délicieusement courtois et bien élevé. Tournage très agréable. ».

Ses partenaires au cinéma étaient nombreux, comme (en plus de ceux cités, avant ou après) Roger Moore, Curd Jürgend, Sami Frey, Claude Rich, Bernard Blier, Claude Piéplu, Charles Vanel, Michèle Laroque, Hélène de Fougerolles, Michel Duchaussy, Valérie Kaprisky, Zinedine Soualem, etc. Elle appréciait aussi beaucoup Henri Salvador (témoin de son second mariage), Pierre Richard et Francis Blanche. De 1966 jusqu'à la mort en 1999, elle est mariée en secondes noces avec Marc Simenon, le fils aîné du grand romancier et également réalisateur, et Mylène Demongeot a préféré l'aider dans la production de ses films en ralentissant sa propre activité d'actrice, tout en jouant dans ses quelques films.

Notamment le dernier, "Signé Furax" (sorti le 1er avril 1981), d'après un scénario de Pierre Dac et Francis Blanche, avec un grand nombre d'acteurs, comme Bernard Haller, Pierre Tchernia, Maurice Risch, Claude Villers, Pierre Tornade, Dany Saval, Pierre Desproges, Coluche, Jean-Pierre Darras, Michel Galabru, Jean-Marc Thibault, Roger Carel, Paul Préboist, Michel Constantin, Jean Le Poulain, Pierre Mondy, Daniel Gélin, Xavier Gélin (également coscénariste), Fanny Cottençon, Gérard Hernandez, Jean Richard, Jacques Rouland, Philippe Castelli, Henri Virlojeux, Mario David, etc. Malgré le casting exceptionnel et la renommée du titre, le film a été un échec commercial, peut-être à cause de sa sortie en pleine campagne présidentielle.

Des années 1970 jusqu'aux années 2020, Mylène Demongeot n'a jamais disparu des écrans, tant du cinéma que de la télévision, voire de la scène du théâtre. Ses partenaires au théâtre étaient entre autres Michel Serrault, Didier Long, Jean Babilée, Daniel Auteuil, Bernard Giraudeau, etc. (« Jouer avec Giraudeau, c’est vraiment bien. Certains soirs nous atteignons une espèce de folie violente. J’aime ça. »). Elle a eu certes un énorme passage à vide après la mort de son mari en octobre 1999, le théâtre pour surnager, puis le retour au cinéma avec "36 Quai des Orfèvres" (voir plus loin).

À la télévision, elle a tourné la petite série "Marion" réalisée par Jean Pignol, diffusée sur TF1 du 28 mai 1982 au 9 juillet 1982, où elle est le personnage principal, détective d'une agence d'assurance (avec Florent Pagny, Henri Virlojeux, Xavier Deluc, Yves Barsacq, etc.). Pour la télévision, elle a aussi accepté de participer à quelques émissions, comme l'incontournable "Vivement Dimanche" de Michel Drucker le 8 mars 2015, mais aussi d'autres émissions moins connues, comme celle qui l'a montrée en compagnie de ses neuf chats chez elle, près de Château-Gontier, dans la Mayenne, le 10 novembre 2019 sur TF1, "La vie secrète des chats", intitulée spécialement pour l'actrice "Naturellement chat !".

_yartiDemongeotMylene02

Au cinéma, on retiendra évidemment son grand retour dans le cinéma populaire avec la série "Camping" de Fabien Onteniente (sortie de 2006 à 2016), où elle est Laurette Pic, la femme de Jacky, joué par Claude Brasseur, un couple de campeurs, vieux habitués du même camping (elle ne connaissait pas du tout ce milieu), aux côtés de Franck Dubosc, Mathilde Seigner, Gérard Lanvin, Frédérique Bel, Antoine Duléry, Richard Anconina, etc.

Mais encore récemment, Mylène Demongeot a joué dans des films différents, comme "Victoire" de Stéphanie Murat (sorti le 22 décembre 2004), avec Sylvie Testud, dont elle est la mère, Pierre Arditi, le père de la fille, et le regretté Philippe Khorsand, son amant ; "Elle s'en va" de la réalisatrice et actrice Emmanuelle Bercot (sorti le 18 septembre 2013), le rôle d'une ancienne miss locale aux côtés de Catherine Deneuve et Claude Gensac ; "Sage Femme" de Martin Provost (sorti le 22 mars 2017), avec Catherine Frot et Catherine Deneuve (Mylène Demongeot est la copine de Catherine Deneuve qui, elle, était la maîtresse du père de Catherine Frot qui s'est suicidé quand elle l'a quitté trente ans auparavant).

D'autres films ont marqué également comme "Les Toits de Paris" d'Hiner Saleem (sorti le 21 novembre 2007). Il traite de la vieillesse et de la solitude autour du couple Michel Piccoli et Mylène Demongeot. Le réalisateur a évoqué le thème général du film le 21 novembre 2007 pour Senioractu.com : « Quand on a dépassé l'âge où l'on est productif et indépendant, on entre dans la salle d'attente… Les humains sont étiquetés comme des denrées périmées, et parqués avant le passage des poubelles. Comment, en Occident, le bien-être de certains peut-il cohabiter avec autant de souffrance ? ». Hiner Saleem a aussi expliqué pourquoi le choix de Mylène Demongeot : « Elle ressemble à une quantité de femmes qui travaillent dans les cafés parisiens. Des femmes qui ont été très belles, et dont on se demande quelle vie elles ont pu avoir pour se retrouver là, à leur âge, à servir dans un bar. J'ai retrouvé chez Mylène Demongeot cette opacité et cette beauté. ». Pour l'actrice, un film essentiel : « Le plus beau film que j’ai fait à mon humble avis. Un partenaire magique, Michel Piccoli. Dès le début du tournage, j’ai senti que je faisais un travail qui pour moi serait inoubliable. J’ai compris ce que voulait faire Hiner, où il voulait aller et je lui ai donné tout ce qu’une actrice peut donner avec une confiance totale. (…) Je sais qu’après ce film, je peux m’arrêter si je le désire. J’ai toujours dit que je n’avais pas encore rencontré "le" film dont je serais totalement fière. Eh bien, ça y est ! ».

Son dernier film est "Maison de retraite" de Thomas Gilou (sorti le 16 février 2022), avec Kev Adams (coscénariste), homme à tout faire dans une maison de retraite dirigée par un directeur véreux et autoritaire joué par Antoine Duléry, Mylène Demongeot fait partie des pensionnaires aux côtés de Gérard Depardieu, Jean-Luc Bideau, Firmine Richard, Marthe Villalonga, Daniel Prévost, etc.

Mylène Demongeot a beaucoup écrit au cours de son existence (elle a commencé sur une promesse faite à sa mère avant de mourir du cancer), des essais autobiographiques mais aussi des ouvrages qui défendent l'une des causes pour lesquelles elle s'était engagée, la protection des animaux, qu'elle avait en commun avec Brigitte Bardot, son alter ego au cinéma : « Mariée avec Marc qui était encore plus fou que moi, nous avons donné libre cours à notre passion pour les animaux et avons fini par avoir une véritable ménagerie : chats, chiens, renard, couleuvre, boa, chouette, pics épeiches, une bondrée apivore [un rapace diurne proche de la buse] et pour couronner le tout, un lionceau pendant six mois dans notre appartement très bourgeois de Saint-Cloud. » (2005). Elle a aussi eu sept mangoustes, aussi bavardes que des pies. Et plein d'autres animaux sauvages : « Aujourd’hui, je suis devenue sage. Je sais, j’ai appris qu’apprivoiser un animal sauvage, c’est le dénaturer. Je ne le ferai plus. Pourtant quand vous établissez le contact, c’est tellement merveilleux. Vous avez la sensation d’être en osmose avec la Terre, de faire partie d’un grand tout. ».

Mylène Demongeot n'aura eu aucun César, seulement deux nominations tardives comme meilleure actrice dans un second rôle, en 2005 pour "36 Quai des Orfèvres" d'Olivier Marchal (sorti le 24 novembre 2004), avec Daniel Auteuil, André Dussollier, Gérard Depardieu et Roschdy Zem, et en 2007 pour "La Californie" de Jacques Fieschi (sorti le 25 octobre 2006), avec Nathalie Baye, Ludivine Sagnier (qu'elle appréciait beaucoup car elle lui faisait penser à elle-même jeune) et Roschdy Zem.

Parmi les nombreuses causes et engagements qu'on peut lire sur son site Internet, cette donatrice et bénévole régulière pour le Secours populaire et la Croix-Rouge, par ailleurs ancienne candidate aux élections régionales de 1992 en PACA sur les listes de Bernard Tapie, s'est particulièrement impliquée dans le combat contre la corrida : « Cette torture est pour l'instant scandaleusement autorisée en public, devant une foule déplorablement excitée par cette pulsion de mort qui habitent les humains encore si peu civilisés, vieux instincts barbares, partie honteuse et animale de l'Homme. ».



Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (03 décembre 2022)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Henri Salvador.
Gérard Philipe.
Mylène Demongeot.
Contagion.
Kirk Douglas.
Robert Clary.
Quai d'Orsay.
Thierry Lhermitte.
Dupont Lajoie.
Emmanuelle Bercot.
Jacques Tati.
Sandrine Bonnaire.
Shailene Woodley.
Gérard Jugnot.
Alain Delon.
Alfred Hitchcock.
Brigitte Bardot.
Charlie Chaplin.

_yartiDemongeotMylene03
 


Moyenne des avis sur cet article :  1.29/5   (14 votes)




Réagissez à l'article

6 réactions à cet article    


  • amiaplacidus amiaplacidus 7 décembre 2022 11:31

    Mort le 1er décembre, nécro le 7 décembre.

    Vous vous relâchez Rakoto, il faut vous ressaisir.


    • Lynwec 7 décembre 2022 11:45

      Information essentielle à retenir : elle était à moitié ukrainienne . Eut-elle été russe que l’article ne paraissait pas ...^^


      • the clone the clone 7 décembre 2022 14:23

        Son plus grand malheur aurait été de « mourir sans personne pour me tenir la main »

        Impossible, il y a la banque, le fisc et les héritiers .....


        • the clone the clone 7 décembre 2022 14:25

          Son plus grand malheur aurait été de « mourir sans personne pour me tenir la main »

          Comme Rocco Siffredi qui dit avoir peur de mourir sans personne pour lui tenir la bite .....


          • Moi ex-adhérent 7 décembre 2022 16:49

            Brigitte Bardot et Mylène Demongeot étaient dans le même registre des beautés similaires, débutantes. L’une était sulfureuse, l’autre mutine.

            Si BB faisait les couvertures des magasines, avec des jeunes filles la copiant, Demongeot la jouait discrète. Avec Faibles femmes, elle fut la partenaire d’Alain Delon, alors âgé de 24 ans, et incarnant une Milady de Winter, gracieuse mais vénéneuse, pour un ado que j’étais à l’époque.

            Mylène Demongeot aura vieilli en restant la même


            • Aita Pea Pea Aita Pea Pea 7 décembre 2022 23:22

              Très mimi, pétillante et intelligente. RIP la belle.

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON



Publicité



Les thématiques de l'article


Palmarès



Publicité