Cameroon Airlines, chronologie d’une descente aux enfers : les derniers jours d’une compagnie aérienne condamnée à mort
Les derniers mois d’agonie d’une compagnie sans avions mais avec plus de 1000 employés et des dettes à n’en plus finir : le miracle camerounais
La Cameroon Airlines naît en 1971, après la sortie du Cameroun de l’actionnariat de la défunte Air Afrique. La compagnie, vingt ans après sa création, va se surprendre avec une dette abysale, estimée en milliards de francs CFA. D’ailleurs, l’Etat va inscrire le 15 juillet 1994 la Camair dans la liste des entreprises privatisables.
Depuis lors, la compagnie va conforter sa réputation "d’Air peut-être" auprès de ses clients, du fait des ses retards devenus légendaires. Dans ce commencement de la fin, le retard des avions n’est qu’un des péchés mignons des avions camerounais. Sureffectif, utilisation abusive de la compagnie par l’Etat pour des voyages privés, l’entreprise fonctionne sans doute comme une grosse épicerie moderne. Pendant ce temps, la flotte d’avions de la compagnie, elle, n’aura jamais cessé de se rétrécir et, en juin 2003, la Camair n’a même plus d’avion. Et pour cause...
Le Dja, le seul avion de la compagnie qui était jusqu’alors affecté au trafic long courrier, n’était plus disponible. Le propriétaire sud-africain de ce Boeing 767-300 ER, la compagnie Ansett Worldwide, avait décidé, en ce mois de juin 2003, de mettre un terme à l’ensemble des trois contrats de location des avions la liant à la Camair. Ainsi, en plus du Dja, deux boeings 757 de Ansett Worldwide sortaient de la flotte de la compagnie aérienne camerounaise. Une crise qui a eu le mérite de mettre a nu l’état de quasi-cessation de paiement de l’entreprise alors dirigée par Thomas Dakayi Kamga.
On constatait au passage que la compagnie n’avait plus en réalité d’avion propre, mais continuait d’employer plus de 1000 personnes...Creusant davantage son déficit déjà évalué à plusieurs dizaines de milliards de francs CFA.
Voici quelques dates de l’histoire tourmentée et turbulente d’une compagnie qui est l’exemple typique de la gestion à la camerounaise, faite de passe-droits, de postes de travail pléthoriques et superfétatoires, d’opacité dans les comptes. Une compagnie qui aura usé cinq administrateurs pour empêcher sa descente aux enfers. Pour autant, même le purgatoire de l’administration provisoire n’aura pas empêché la damnation de la Camair, vers l’enfer de la privatisation, dont le sort a été scellé le 29 juin 2006.
-1971 : naissance de la Cameroon Airlines
-15 juillet 1994 : inscription dans la liste des entreprises privatisables
-1995 : crash dans la Mangrove de Douala du Boeing 737 en provenance de Cotonou
-1995-2006 : 5 administrateurs et administrateur provisoire se succèdent :
Samuel Minko
Cyrille Etoundi Atangana
Yves Michel Fotso
Dakayi Kamga
Ngamo Hamani
-11 août 2005 : réduction des effectifs de 1300 à 900 employés sous la pression du FMI, négociation sur les départs des employés. Présentation du manuel d’exploitation de la compagnie après quatre ans de préparation et d’homologation par l’OACI.
-16 août 2005 : signature du protocole d’accord avec les ministres des finances, des transports, du travail, d’un accord de départ de 430 personnes pour une valeur de 5 milliards de francs CFA.
-16 septembre 2005 : suspension de survol du territoire français aux avions Camair par la DGAC, pour des « raisons de sécurité ».
-18 septembre 2005 : la Camair décide de desservir la France par un avion italien (Air Italy)
-26 septembre 2005 : début d’audit d’exploitation de la Camair
-4 novembre 2005 : levée de la suspension de la DGAC, estimant que la Camair avait répondu à l’audit demandé par la Direction générale de l’aviation civile française
-5 juin 2006 : grève du personnel de la compagnie pour arriérés de salaires et inquiétude sur leur sort après la privatisation. Ils reprendront le travail deux jours plus tard, après une promesse du gouvernement de payer 3 mois d’arriérés, promesse faite le 2 juin.
-29 juin 2006 : désignation de First Delta Air Services comme adjudicataire provisoire devant donner naissance à une nouvelle compagnie privée pour remplacer la Camair. Le consortium First delta Air Services est constitué de SN Brussels Airlines et Cenainvest, une société camerounaise.
François BMG
Documents joints à cet article
11 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON