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Accueil du site > Actualités > Europe > Constantin II de Grèce, l’un des derniers rois sans royaume

Constantin II de Grèce, l’un des derniers rois sans royaume

« Comme il faut de la vertu dans une république, et dans la monarchie de l'honneur, il faut de la crainte dans un gouvernement despotique ; la vertu n'y est point nécessaire et l'honneur y serait dangereux. » (Montesquieu).

En soins intensifs depuis cinq jours dans un hôpital à Athènes, l'ancien roi des Hellènes, Constantin II de Grèce, est mort d'un AVC ce mardi 10 janvier 2023 à l'âge de 82 ans (né le 2 juin 1940). Depuis quatre ans, sa santé était très fragile. Avec Siméon II de Bulgarie, il était l'un des derniers survivants d'anciennes monarchies d'une Europe de l'Est et du Sud particulièrement troublée après la fin de la guerre. Constantin II a été officiellement roi du 6 mars 1964 au 1er juin 1973, à la mort de son père Paul 1er de Grèce (il avait alors 23 ans).

Mais il n'a pas vraiment régné comme je l'expliquais il y a une dizaine d'années. La situation politique a été très confuse pendant les trois premières années de son règne. Se séparant le 15 juillet 1965 de son Premier Ministre Georgios Papandréou, pourtant très populaire et vainqueur des élections de 1964, en raison de l'attribution du ministère de la défense et d'un scandale politique (le fils du Premier Ministre, lui-même futur Premier Ministre, impliqué dans une conspiration avec l'armée pour abolir la monarchie), le roi a provoqué une période politique très instable ; une succession de crises ministérielles a eu lieu jusqu'au putsch des colonels le 21 juillet 1967. Loin de résister aux militaires, Constantin II a tenté de conclure un accord avec les militaires lui permettant de rester sur le trône. Après l'échec d'une tentative très mal préparée de coup d'État le 13 décembre 1967 pour rétablir l'État contre les colonels (les États-Unis lui ont refusé toute aide malgré quelques encouragements), toute la famille royale a dû s'exiler tandis qu'une régence s'est mise en place pour le suppléer, jusqu'à ce que les militaires l'aient finalement déchu formellement du trône le 1er juin 1973 en proclamant la république.

Après la chute de la dictature des colonels en raison de l'invasion désastreuse de Chypre, la transition démocratique n'a pas retenu le retour du roi au pays : le référendum organisé par Konstantinos Karamanlis le 8 décembre 1974 a effectivement validé l'installation d'une république en Grèce avec 69,2% d'approbation et 75,6% de participation. Pendant la campagne référendaire, Constantin II, qui prônait le retour de la monarchie, n'a pas pu se rendre en Grèce mais a pu faire deux discours retransmis à la télévision grecque.

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Constantin II faisait partie des grandes familles régnantes de l'Europe, ou même, oserais-je l'écrire, de "la" dynastie européenne. En effet, il était à la fois le beau-frère de l'ancien roi d'Espagne Juan Carlos (par sa sœur Sofia), oncle de Felipe IV d'Espagne, et le beau-frère de la reine du Danemark Margrethe II (par son épouse Anne-Marie). Il était aussi un arrière-petit-fils de l'empereur allemand Guillaume II (par sa mère Frederika de Hanovre), et par conséquent, un arrière-arrière-arrière-petit-fils de la reine Victoria. Il était aussi un cousin du roi Michel Ier de Roumanie, et le parrain du prince héritier du Royaume-Uni William.

Constantin II n'a jamais retrouvé sa nationalité grecque (déchue en 1994 par Andréas Papandréou) car il ne voulait pas renoncer à ses droits dynastiques et se choisir un patronyme (en 1983, il a obtenu la nationalité danoise, patrie de son épouse). Il a cependant pu revenir habiter près d'Athènes à partir de 2013 et a enfin normalisé ses relations avec les autorités grecques (la famille Papandréou était très remontée contre lui pendant plusieurs décennies). Celui qui avait obtenu la médaille d'or de la voile avec le reste de son équipage aux jeux olympiques d'été de 1960 à Rome avait continué à travailler pour le comité international olympique (CIO) et la fédération mondiale de voile. Il avait préparé en particulier les JO de Barcelone en 1992 et les JO d'Athènes en 2000.

La classe politique en général, très républicaine depuis soixante ans, et la gauche en particulier, a toujours contesté l'autorité de Constantin II qui n'a jamais joui d'une forte popularité, malgré, c'est le paradoxe, le soutien de l'ex-roi au Premier Ministre de gauche Alexis Tsipras lors de la crise de la dette souveraine. Constantin II, à l'évidence, a raté un rendez-vous de l'histoire en 1974 pour faire la transition démocratique. Sa collaboration initiale avec la dictature des colonels l'a certainement desservi. Un an plus tard, son beau-frère Juan Carlos réussissait, au contraire, la transition démocratique en Espagne après la mort de Franco. Malgré ces destins très différents, les deux pays ont rapidement adhéré à ce qui est devenue l'Union Européenne (respectivement en 1979 et en 1986) pour s'arrimer au socle de démocratie et d'État de droit que constitue la communauté européenne.

Le dernier roi des Hellènes sera enterré près des restes de sa famille au cimetière du Palais royal de Tatoï, à 15 kilomètres au nord d'Athènes. Malgré la demande de deux de ses fils, le Premier Ministre grec Kyriakos Mitsotakis a pris la décision, le 11 janvier 2023, après la réunion de son gouvernement, de refuser l'organisation de funérailles nationales. Seule la ministre de la culture représentera discrètement les autorités républicaines de l'État dans une cérémonie privée, mais le défunt roi devrait être accompagné dans le chemin vers sa dernière demeure par plusieurs monarques européens qui font partie de sa famille.

Son fils Pavlos, né le 20 mai 1967 à Tatoï, fondateur de plusieurs fonds d'investissement à New York et à Londres, remplace son père comme prince royal et prétendant au trône de Grèce. S'il est l'aîné des fils, il n'est pas l'aîné des enfants puisqu'il y a aussi sa sœur Alexia née deux ans plus tôt. En tout, Constantin et sa femme (désormais veuve) Anne-Marie ont eu cinq enfants et neuf petits-enfants. Avec ce décès, la monarchie grecque est définitivement morte.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (11 janvier 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Guillaume II.
Siméon II de Bulgarie.
Nicolas II.
Otto de Habsbourg-Lorraine.
Michel Ier  de Roumanie.
Dynasty.
Élisabeth II.
Henri VI, comte de Paris, ou l’impossible retour du roi.
Henri VII : le roi de France est mort un 21 janvier.
Constantin II de Grèce.
Vangelis.
Christos Sartzetakis.
Jean-Louis Trintignant.
Philip Mountbatten.
Victoria, mamie Europa.
Spiro Agnew.
Michael Dukakis.
Pierre Vidal-Naquet.
Méditerranée orientale : la France au secours de la Grèce face à la Turquie.
Grèce : la défaite de l’expérience Syriza.
Les élections européennes du 26 mai 2019.
C'est Xénophon qu'on assassine !
Le plan Tsipras.
L'oxi mord la Grèce.
Alexis Tsipras.
Antonis Samaras.
Mauvaise Grèce ?

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6 réactions à cet article    


  • Brutus paparazzo 12 janvier 2023 10:34

    « Son fils Pavlos, né le 20 mai 1967 à Tatoï, fondateur de plusieurs fonds d’investissement à New York et à Londres, remplace son père comme prince royal et prétendant au trône de Grèce. »

    Il manque pas d’air le gars !

    Mais bon, avec un bon coup de main de tonton Samuel, rien n’est impossible : lien1lien2



    • charlyposte charlyposte 12 janvier 2023 11:27

      @paparazzo
      Un détail si je puis dire... en souvenir de Jules Gros roi de la Guyane et d’ Antoine de Tounens roi de Patagonie et d’Araucanie sans oublier le roi du Vietnam et ainsi de suite....................................


    • Seth 12 janvier 2023 17:44

      @charlyposte

      Et ne pas oublier que le siège du Royaume d’Araucanie est toujours à Tourtoirac. Eh oui ! smiley


    • armand 12 janvier 2023 10:57

      Il y en a beaucoup en fait, et surtout certains qui ont un royaume mais aucun pouvoir.


      • Brutus paparazzo 12 janvier 2023 15:01

        @armand

        ça fait rien : ils se consolent avec le pognon 


      • zygzornifle zygzornifle 13 janvier 2023 09:13

        La pauvre, j’en suis tout ému.

        Par contre Momo le SDF bouffé par les morpions qui crève le ventre vide couché dans ses excréments au coin d’une rue dans le froid on s’en tamponne grave .....

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