Pour libérer la croissance, réduisons les inégalités
L’inégalité serait-elle, au même titre que l’appât du gain et la dérégulation à outrance, une des raisons fondamentales de la débâcle économique actuelle ? En fait, – et peu importe les batteries de mesures (à adopter) cosmétiques ou en profondeur de notre système financier -, nos économies seront à nouveau déstabilisées par de futures secousses du simple fait de l’inégalité flagrante des revenus des divers intervenants. Les dégâts causés à nos économies par ces différences abruptes de revenus étant du reste amplifiés par les réponses totalement inadaptées d’autorités politiques et économiques qui se contentent d’en prendre acte alors que, dans un pays comme les Etats-Unis (pour ne citer que lui), le revenu moyen est en baisse constante depuis 1968.
Il va de soi que l’analyse présente ne concerne pas ceux de nos contribuables et citoyens aux revenus à six, voire à sept, chiffres mais aborde plutôt les revenus de l’immense masse silencieuse des travailleurs moyens, de l’ouvrier à la vendeuse en passant par l’employé de bureau… De fait, les revenus de seuls 10% de nos citoyens Occidentaux ayant augmenté de façon totalement disproportionnée depuis 1970, diverses raisons – ou excuses – ont été avancées pour tenter d’expliquer – ou de justifier ? – la stagnation des salaires des 90% résiduels. De la taxation aux salaires minimum légaux inadaptés, de l’intensification du commerce international à la globalisation, de l’affaiblissement inexorable des syndicats à la problématique de l’immigration… tout a été invoqué afin de rationaliser ces inégalités criantes de revenus au sein de nos sociétés modernes à l’exception peut-être de la faiblesse de notre système éducatif. Une formation déficiente à bien des niveaux, qui ne rattrape en effet pas un progrès technologique qui avance tambours battants, laisse sur le carreau une masse de travailleurs peu qualifiés qui n’a souvent d’autre alternative au chômage que l’emploi précaire.
C’est ainsi que, dans le but de juguler ou de remédier aux revenus stagnants de cette gigantesque classe moyenne, nos Banques Centrales – et en tout premier chef la Réserve Fédérale US – ont misé sur un crédit (destiné à rétablir le niveau de vie) généreusement accordé via des taux d’intérêts extrêmement bas. En fait, cette politique monétaire hyper laxiste a forcé la main et les initiatives de toute une panoplie d’entreprises et de ménages : Comment et pourquoi s’empêcher en effet d’investir et de réaliser toutes sortes de projets dès lors que l’argent est facilement disponible ? Pourquoi déplorer en outre l’essor vertigineux d’un marché de l’immobilier (et donc de la construction) entièrement redevable à ces taux symboliques alors que ce secteur emploie précisément des travailleurs peu qualifiés … ceux-là même qui souffrent d’un manque de formation amoindrissant considérablement leurs revenus ? Et tant pis si la crise s’est rappelé au bon souvenir de Banques Centrales créatrices de bulles en aggravant davantage le sort de cette classe moyenne qui a acquis entre temps un bien immobilier qu’elle n’a aujourd’hui plus la capacité d’assumer.
Pourtant, face à la crise actuelle, nos autorités monétaires n’ont su réagir qu’en amplifiant cette politique de taux ridiculement bas en la menant cette fois à des extrêmes au demeurant totalement inutiles puisque ces sommes généreusement déversées dans le système n’ont pas contribué à créer de nouveaux emplois. La Fed espérait-elle vraiment relancer ainsi le boom immobilier ? En attendant, de précieuses munitions ont été gaspillées dans une conjoncture d’incertitudes où le consommateur n’a même pas la consolation d’épargner de manière constructive du fait de la rémunération insignifiante du marché de l’argent. Au lieu de nous mettre le dos au mur par l’accumulation de ces dettes qui ne ressusciteront pas cette consommation supposée être le remède à tous nos soucis, nos dirigeants ne feraient-ils pas mieux de s’attaquer aux racines mêmes de cette calamité endémique que représente l’inégalité flagrante des revenus solidement ancrée au sein de notre société ?
L’application pavlovienne des mêmes baumes – taux réduits et stimuli mal ciblés – n’auront ainsi pour effet que la fragilisation supplémentaire de nos finances publiques tout en achevant de polariser et de fracturer une société de plus en plus tentée par les extrêmes. L’inégalité salariale est un facteur déterminant qui doit être au coeur de décisions et de mesures visant à établir et à offrir à nos sociétés une croissance stable, clé de la réalisation individuelle. Encore faudrait-il que nos Gouvernants aient conscience que nos problèmes actuels nécessitent plus qu’un simple ajustement de taux d’intérêts…
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